Jorge Queiroz
VeneKlasen / Werner / 14 mars - 26 avril 2014
Pour un artiste, passer d’un médium à un autre est une chose particulièrement difficile. Il faut apprendre de nouvelles techniques, et la main comme le cerveau doivent quitter les automatismes, réflexes et habitudes quotidiennes. C’est prendre le risque de perdre son identité plastique. Jorge Queiroz est connu pour ses grands dessins sur papier (on a vu ses oeuvres à plusieurs reprises à la galerie Nathalie Obadia) où formes abstraites, personnages, paysages et fragments d’objets s’associent pour former une cartographie mentale. Pour son exposition à Berlin – la première où il présente exclusivement des peintures sur toile –, Queiroz surprend et transforme l’essai avec brio. Il joue avec l’huile et l’acrylique, la craie grasse, le crayon et les encres, et manipule la matière avec les doigts tout en peignant de parfaits aplats. Mais il n’y a là aucune démonstration de virtuosité, car chacune de ses figures trouve le juste médium pour exister sur la toile. La couleur, avec des pourpres, des orange et des verts profonds et saturés, renforce l’impression d’admirer un paysage de science-fiction. Sa peinture prolonge ce que sont ces dessins : des narrations fragmentaires et inconscientes qui débutent dans un coin pour envahir l’espace de la toile tandis que des effets de zoom, d’avant- et d’arrière-plan, les rapprochent du cinéma. Celui qui se laissera entraîner et prendra le temps d’entrer dans la peinture y fera un magnifique voyage.
Artists find it particularly difficult to go from one medium to another. There are new techniques to be learned, and both hand and brain have to unlearn deeply ingrained habits and reflexes. There is a risk of losing one’s visual identity. Jorge Queiroz is known for his large drawings on paper (on view several times at the Nathalie Obadia gallery) combining abstract shapes, characters, landscapes and fragments of objects to create a mental cartography. His Berlin show— the first presenting paintings on canvas exclusively—was surprising, spirited and successful. Queiroz plays with oils and acrylics, crayons, pencils and inks, manipulating the materials with his fingers while producing perfectly flat color surfaces. But there is no hot-dogging involved—each of his figures finds just the right medium to exist on canvas. The introduction of color—deep and saturated purples, oranges and greens—reinforces the impression of admiring a science fiction landscape. His painting takes up what is in his drawings and goes further: fragmentary, unconscious narrations that start out in a corner and then take over the whole space of the canvas, with cinematic zoom-in and zoom-out effects. Visitors who took the time and let themselves be swept up in these paintings had a terrific trip.
Translation, L-S Torgoff