Nadine Satiat
Au miroir de Louise
Flammarion
C’est un essai sur « la vieille dame de l’exposition, la vieille dame des spirales et des cages » qui oeuvre avec un « grand jésus barbu », a un filsmaison et rencontre une blonde aux yeux vert amande, conservatrice au MoMA. Pas de noms propres ! Découverte lors de son exposition au Centre Pompidou en 2008, Louise Bourgeois devient une vraie toquade pour Nadine Satiat, biographe reconnue pour son travail sur Gertrude Stein. Louise Bourgeois, femme attachante et artiste à la reconnaissance tardive, déclenche une vive empathie et stimule à la fois les souvenirs et l’imaginaire prolixe de l’auteur. D’où les allers et retours entre les oeuvres et sa subjectivité qui font la singularité de cette approche, un livre parmi d’autres dit-elle, pour raconter une vie marquée par « le traumatisme de l’abandon » et dire une oeuvre où tous les sujets sont tirés de l’enfance de l’artiste. Ce récit, qui ne comporte ni appareil de notes ni chronologie ni références historiques ni images, relève plus de la non-fiction que de l’histoire de l’art ! Et pourtant il est d’une précision extrême, dévoile implicitement une recherche scrupuleuse et révèle des détails inattendus sur la vie de l’artiste. Nadine Satiat, happée par l’oeuvre, part en quête de Louise Bourgeois et s’y projette. Évitant le « je », elle s’adresse constamment à un « vous », dont on se demande qui il peut être, l’artiste, un analyste ? D’ailleurs, son écriture relève de l’association libre : elle use et abuse d’une continuité radicale, d’un flux qui s’adonne aux figures d’une langue parlée, qui efface toute scansion, qui exclut toute articulation, donc tout chapitre. Entre Proust et Butor, l’auteure fait un travail d’écriture, privilégiant à l’analyse interprétative ce qui relève de l’identification, au plus près de son inconscient. Le miroir, donc.