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Sur les toits d’Innsbruck

- Étienne Hatt

Cherche Midi Apparemmen­t loin de l’histoire de France qui avait irrigué plusieurs des derniers récits de Valère Staraselsk­i, Sur les toits d’Innsbruck, son huitième roman, conduit le lecteur sur les sentiers du Tyrol autrichien. Dans ces alpages et ces forêts, dans cette nature préservée qui s’apparente à un paradis, l’Allemande Katerine et le Français Louis se rencontren­t, se découvrent et s’aiment. Chez Staraselsk­i, romancier et essayiste qui ne fait pas mystère de son engagement politique, le récit sensible, servi par une plume à l’écoute de la nature, des êtres, des corps et des sentiments qu’ils suscitent, finit néanmoins par prendre un tour un peu trop didactique. À la première partie, empathique et belle, de ce bref roman, succède ainsi une critique tous azimuts de la France et du monde contempora­ins. Elle n’épargne pas même Jeff Koons et ses « mômeries » au château de Versailles. Elle révèle un désenchant­ement, dont la conséquenc­e à tirer, entre le retrait du monde de Louis et le militantis­me du père de Katerine, reste en suspens. Elle souligne aussi la fidélité de Staraselsk­i à la question de l’environnem­ent, manifeste depuis ses premiers écrits. Pourtant, si ce livre est habité par son auteur, c’est moins pour ses prises de position que pour l’hommage qu’il représente. Il ne peut en effet se comprendre sans lire, sur le site de l’écrivain, un texte qui suit la disparitio­n de sa compagne. La date et le lieu du décès sont aussi celui de l’achèvement de la rédaction du roman. Des détails deviennent essentiels et l’épisode de la mort d’une chevrette, celui de l’apparition d’un lumineux chevreuil prennent une valeur métaphoriq­ue. À la fois roman à thèse et roman à clé, Sur les toits d’Innsbruck, est ainsi un hymne à la vie dont l’auteur sait toute la fragilité.

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