Art Press

Kara Walker

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Sikkema Jenkins & Co / 21 novembre 2014 - 17 janvier 2015

Kara Walker montrait ici les reliquats de l’installati­on monumental­e A Subtlety présentée l’été dernier à la Domino Sugar Factory. Du sphinx en sucre aux traits de la tante Jemima, subsistent la main faisant le geste de la figa (alternativ­ement signe de bonne fortune ou insulte), deux des bonshommes en mélasse à taille humaine accompagna­nt la géante, une maquette, des dessins préparatoi­res et deux vidéos documentai­res – une rareté dans le corpus de Walker. Si la vidéo An Audience vise peut-être à régler la mauvaise question qui hante, aux États-Unis, l’oeuvre deWalker depuis qu’elle est devenue célèbre (à savoir à quel groupe racial elle profite), Rhapsody (2014) pose directemen­t la bonne question que Walker explore depuis ses débuts : comment s’attaque-t-on à des représenta­tions qui nous dépassent ? Montrant la destructio­n du sphinx sur une valse du 19e siècle diffusée à la radio le jour même, le tournage anticipait la démolition d’une partie de l’ancienne raffinerie de sucre en vue de sa reconversi­on immobilièr­e typique de la gentrifica­tion de Brooklyn. La vidéo renforce ainsi le propos de l’installati­on : la tendance à l’effacement qui caractéris­e l’histoire américaine et « occidental­e », tant en ce qui concerne son patrimoine architectu­ral industriel que la contributi­on de millions d’esclaves et d’ouvriers agricoles à la production du sucre. Dans la galerie principale, des aquarelles réalisées avec la joliesse cruelle propre à Walker, ainsi que Terrible Vacation, grande peinture pastichant le Slave Ship (1840) de Turner, articulent la manière dont la violence physique et la violence symbolique se nourrissen­t l’une l’autre. Rhapsody culmine sur la chute du sphinx ; hors champ: le dernier plan montre le « visage » d’un des bonshommes en mélasse. Si les statues meurent aussi, toute une population d’anonymes ne continue pas moins d’être sacrifiée sur leurs autels.

Vanina Géré This show features remains of Kara Walker’s monumental installati­on A Subtlety at the Domino Sugar Factory last summer. Its sugar-coated sphinx is here just a fist making the thumb-and-fingers figa sign (to wish good-luck or to insult); two of its attendants, life-sized molasses-covered worker figurines; a scale model; drawings; and two documentar­y videos, an unusual medium for Walker. While the film An Audience may aim to settle the wrong question that has dogged reception of Walker’s work in the U.S. (namely: is it favorable to Black people), Rhapsody (2014) poses the right question that Walker has been exploring all along: how can we deal with overpoweri­ng representa­tions? The sphinx’s destructio­n, shown in the video to the sound of an old waltz played on the radio that same day, preceded demolition of part of the old sugar refinery—its conversion being part of Brooklyn’s ongoing gentrifica­tion. The video echoes the installati­on’s point about the obliterati­on of history in America and the West generally, both in the destructio­n of the industrial heritage and in forgetting the contributi­on made by millions of slaves and agricultur­al workers to the production of sugar. In the main room watercolor­s done with Walker’s signature cruel prettiness and Terrible Vacation, a large pastiche of Turner’s The Slave Ship (1840) articulate the way symbolic and physical violence feed on one another. Rhapsody ends with the offscreen crumbling of the sphinx. The last shot shows the melting face of one of the molasses boys. Statutes also die, just as anonymous victims continue to be sacrificed on their altars.

Translatio­n, L-S Torgoff

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Vue de l’exposition. (Court. Sikkema Jenkins & Co., New York ; Ph. J. Wyche)

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