VINCENT MEESSEN
C’est un projet des plus ambitieux qui est porté par la Fédération WallonieBruxelles, en charge du pavillon belge. Artiste pluridisciplinaire avec une prédilection pour la photographie, la vidéo et l’installation, Vincent Meessen (né en 1971) est paradoxalement peu connu en Belgique, et sa désignation n’a pas été sans mal et a dû affronter nombre de recours. On ne peut le dissocier de sa commissaire, Katerina Gregos, qui avait fait sensation en investissant le pavillon danois, avec l’exposition elle aussi collective Speech Sensation, lors de la Biennale de 2011. Si présenter une exposition monographique dans un pavillon national à Venise tient par avance du quitte ou double pour l’artiste concerné, y organiser une exposition collective à connotation historique et politique, dont le protagoniste principal est l’artiste, constitue une véritable gageure, tant en termes de lisibilité que de pertinence. La nomination de Vincent Meessen est en tout cas originale et montre une ouverture d’esprit assez inhabituelle pour ce type de manifestation à forte identité nationale. One. Two. Three, cette nouvelle oeuvre de Vincent Meessen, revisite la participation largement méconnue d’intellectuels congolais à l’Internationale situationniste et constitue l’installation phare du pavillon. Elle en occupe la partie centrale, à partir de laquelle sont distribuées les autres salles que se partage la dizaine d’artistes originaires de quatre continents invités par le duo (1). Il s’agit donc d’un pavillon qui se veut pluriel et partagé, aux voix et positions multiples, mêlant accents poétiques et politiques, au risque assumé d’une certaine confusion visuelle. Si la plupart des artistes réalisent pour l’occasion une nouvelle oeuvre, tous sont engagés dans une réflexion en lien avec la « modernité coloniale », concept exploré par Vincent Meessen (le Congo fut une colonie belge, jusqu’à son indépendance en 1960). L’exposition trouve son origine dans l’histoire du pavillon belge et le contexte historique de la Biennale, puisque tous deux sont issus des expositions internationales et coloniales du début du 20e siècle. Son but est d’explorer les conséquences et les prolongements des enchevêtrements politiques, historiques, culturels et artistiques entre l’Europe et l’Afrique à cette époque de la « modernité coloniale », par ailleurs toujours considérée avec nostalgie par certains. Un des principaux défis consiste à révéler la dimension poétique de ces oeuvres cachée sous un poids historique, dont la critique et la réévaluation ne sont sans doute pas la préoccupation primordiale des populations concernées, à la différence des artistes.
Bernard Marcelis