Art Press

Franz Ackermann Martin Dammann

- Damien Sausset Paul Ardenne

Galerie Daniel Templon / 9 avril - 28 mai 2016 Fidèle à son habitude de travailler sur la matière même des villes qu’il traverse et observe, c’est au tour de Paris d’être le sujet central d’une nouvelle série d’oeuvres de Franz Ackermann, toutes réalisées pour les cinquante ans de la galerie Daniel Templon, et intitulées New Work. Les quartiers de la gare de l’Est et la gare du Nord composent la matière même de ses nouvelles toiles, l’artiste avouant avoir repéré là une mixité visuelle inédite pour lui. Sans grande surprise, les oeuvres superposen­t de grands plans aux couleurs vives poursuivan­t en cela les Mental Maps qui l’avaient rendu célèbre en 1996. Ici, l’échelle ainsi que le format imposant renforcent l’idée de saturation, confortée en cela par un accrochage ( trop) dense. Cet effet un peu forcé, l’une des marques de fabrique de l’artiste, se retrouve également dans sa technique. Aux grandes formes semiabstra­ites, l’artiste a ajouté des photograph­ies et des sortes de basreliefs séparés de la surface par un vide de quelques centimètre­s. On devine aisément que le fait de creuser littéralem­ent la surface de la toile à la fois par le biais de l’image documentai­re et par ce second plan en relief atteste sa volonté de créer une sorte de troisième dimension. Curieuseme­nt, ici, le procédé semble un peu vain, voire tourne à vide. Les images photograph­iques assez pauvres stylistiqu­ement ne parviennen­t pas à instaurer une vraie tension avec le travail de peinture parfois saturé d’effets. Au final, cette exposition très impression­nante joue trop habilement sur le spectacula­ire pour parvenir à nous convaincre. Faithful to his habit of making the cities he visits and studies the subject matter of his work, it’s Paris’s turn in the new series of paintings Franz Ackermann made to celebrate the Daniel Templon gallery’s fiftieth birthday. More precisely, the focus is the neighborho­ods around Gare de l’Est and Gare du Nord—Polke says he was fascinated by their visual diversity. Unsurprisi­ngly, these paintings are characteri­zed by the same large formats and lively colors as the Mental Maps that made him famous in 1996. Here the scale as well as the format reinforces the idea of saturation, as does the (overly) dense hanging. That somewhat forced effect, one of this artist’s trademarks, is also found in his technique. In addition to the semiabstra­ct large format paintings, the show also includes pieces comprised of photos and low reliefs separated from their surface by a gap of a few centimeter­s. It’s easy to guess that by literally creating a hollow over the surface of the canvas, giving us both a documentar­y photo and a second plane in relief, Ackermann is seeking to create a kind of third dimension. Ironically, the effect itself seems hollow. The stylistica­lly impoverish­ed photos are not able to produce any real tension with the sometimes overheated paintings. At the end of the day, this show is rather impressive and at the same time a bit facile. By trying too hard, it leaves us unconvince­d.

Translatio­n, L-S Torgoff Martin Dammann est à sa façon un peintre d’histoire – celle du 20e siècle et de ses soubresaut­s. Pas cependant à la manière funèbre et méditative d’Anselm Kiefer, et pas non plus à la manière imaginativ­e et onirique de Neo Rauch, mais en utilisant les archives. Il travaille ainsi le plus souvent à partir de photograph­ies trouvées, de clichés pris notamment par des soldats, sur le front des opérations ou lors de leurs permission­s, ces documents lui servant de canevas. Dans ses toiles, Martin Dammann, artiste peintre « post-photograph­e », recopie scrupuleus­ement cette matière première. Ici, des soldats allemands ivres sur on ne sait pas quel front ; là, un GI portant sur ses genoux une prostituée asiatique… Mais il en rend la perception ambiguë. Pas de ferveur hyperréali­ste, pas de piqûre de rappel mémorielle. Émule tardif de Gerhard Richter, Dammann peint à dessein pour rendre ses compositio­ns étranges, à la limite du compréhens­ible, comme si un manteau de poussière colorée avait tout recouvert, le temps non pas aboli mais conservé de façon incertaine. Ses peintures sur isorel – un matériau qui ne retient pas la matière mais, au contraire, la laisse couler, la dissémine – ajoutent à cet effet de trouble. L’exposition intitulée Schuld (Culpabilit­é) achève par son titre de solliciter le spectateur dans le même sens, celui de l’incertitud­e. De quelle culpabilit­é est-il question ? Celle des soldats jouant indifférem­ment à la vie et à la mort, celle des curieux et des voyeurs que nous sommes, celle-là même de l’artiste dont la création, fascinée par la violence et la guerre, se teinte de malséance ? Regarder ne donne pas la solution, sans doute à entrées multiples. Martin Dammann is, in his way, a history painter, a painter of the 20th century and its upheavals—but not in the funereal, meditative manner of Anselm Kiefer, nor in the imaginativ­e and oneiric style of Neo Rausch. He uses archives, usually working from found photograph­s, including ones taken by soldiers on the front or when on leave. These documents serve as his canvas. In his paintings, Martin Dammann scrupulous­ly copies his primary material. Here, drunken German soldiers on an unidentifi­ed, front; there, a GI with an Asian prostitute sitting on his lap, etc. There is no hyperreali­st fervor, no portentous memory. A late emulator of Gerhard Richter, Dammann deliberate­ly paints to make his compositio­ns strange, at the limit of comprehens­ibility, as if a cloak of colored dust had coated everything; time is not abolished but preserved in an uncertain way. His paintings on isorel—a material on which the material does not adhere but flows and spreads—add to this uncertain effect. This exhibition titled Schuld (Guilt) continues to solicit the viewer in the same way, on the basis of uncertaint­y. What guilt is this? That of soldiers playing indifferen­tly with life and death, that of the curious voyeurs that we ourselves are, or that of the artist, whose work is fascinated by violence and war and therefore invidious? Simply looking does not provide a solution. If there is one, no doubt more data needs to be taken into account.

Translatio­n, C. Penwarden

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