Guillaume Basquin
Jean-Jacques Schuhl. Du dandysme en littérature Honoré Champion, 202 p., 30 euros
C’est un essai enlevé, incisif et ciselant que Guillaume Basquin livre sur un des grands écrivains qui nous sont contemporains. Un portrait de Jean-Jacques Schuhl en ghost writer, un portrait rose poussière évidemment, une image évanescente, avec toute l’odeur (et le charme !) des vieilles Seventies ; et de leur usage aujourd’hui. Basquin livre plus qu’il ne signe, en se hissant ici, désinvolte et réjoui, à la hauteur de son sujet : usage immodéré des citations sans guillemets, éloge du plagiat, du cut-up, du détournement, de la circulation des phrases et des idées. Il donne à entendre Schuhl, et tout ce qui résonne en lui, une certaine idée de la littérature comme mécanique, comme montage, au sens du montage filmique, mais aussi dada ; puis le Paysan de Paris, Lafcadio, Baudelaire, Poe, le tout parcouru par les résultats des courses hippiques, et un peu sous LSD, comme lorsque dans Rose poussière Frankenstein- leDandy dit à Zouzou la chanteuse : « Je vois l’intérieur de ta tête, les os de ton crâne, les circuits nerveux des lobes de ton cerveau, la face interne de tes globes oculaires, ton nerf optique, j’ai des rayons X au bout des yeux, j’ai peur… » En dépit d’une analyse fine, ou grâce à sa finesse, Basquin ne psychologise pas et n’entre pas, surtout pas, dans les détails de la biographie, il respecte le silence de Schuhl, sa qualité fantomatique, presque transparente, d’autres diraient mythique. Seul le texte compte. C’est être entièrement fidèle et dévoué à son beau sujet : « Je suis si romanesque : je prends vite parfois la fiction pour la réalité », écrit Schuhl. Et en exergue de l’ultime chapitre du livre, cette citation de Silver Phantom (Obsessions) : « Si je vous abandonne votre peu de réalité, me laisserez-vous rêver debout?… »