Pierre Schneider Le Droit à la beauté. Chroniques de l’Express (1960-1992) Hazan, 288 p., 25 euros
De 1957 à 1992, l’historien de l’art Pierre Schneider (1925-2013) a été responsable de la rubrique des arts de l’Express. Ses chroniques hebdomadaires, dont les éditions Hazan publient une sélection, ont été un véritable terrain de jeu – au sens noble – et ont offert à cet homme, qui s’est toujours méfié des institutions, une liberté financière, intellectuelle et poétique. La variété des sujets abordés témoigne de sa curiosité (les églises de Paris, les graffitis, Warhol ou encore Matisse, auquel il a aussi consacré une impressionnante monographie). Il n’est pas anodin qu’un de ses textes porte sur Baudelaire. Il y a aussi du partial chez Pierre Schneider. En 1971, il compare les musées d’art moderne à « une espèce de chaîne d’hôtels pour l’art actuel », en référence à ces expositions circulant de pays en pays, dont l’élaboration risque toujours le consensus facile. En 1972, il déplore que le ministère de la Culture ne cherche qu’à « enfourner les foules dans les musées », sans se préoccuper de la culture « au sens large et vivant du mot ». En 1977, au sujet de l’art islamique, il parle d’ailleurs d’un « éblouissement » qui « rend accessible au niveau même de la vie quotidienne ce que l’Occident parque, sous le nom de culture, dans ses institutions spécialisées ». Pour Pierre Schneider, tout comme pour Baudelaire, il était important que l’art s’ancre dans son temps. En 1982, il évoque l’incompatibilité entre la création – l’« exception » – et l’État démocratique – la « règle » –, l’oeuvre étant désormais un « monde » basé sur ses propres valeurs. Ses métaphores ont été ses plus belles armes. C’est à travers elles que son humour si caractéristique se distille dans ses écrits. Grâce à elles aussi que sa pensée n’est pas près de se figer.