Michel Parmentier rétrospective; Présence de César
Michel Parmentier. Décembre 1965 - 20 novembre1999. Une rétrospective Loevenbruck, 220 p., 50 euros
« Je parle d’un art qui s’en détourne avec dégoût, las de ses maigres exploits, las de prétendu pouvoir, las de pouvoir […], las de faire quelques petits pas de plus sur une route morne. » Ces mots de Samuel Beckett, cités par Michel Parmentier en prélude à un texte écrit peu avant sa mort, en juin 2000, traduisent bien ce qu’a été son projet. Au milieu des années 1960, le peintre met en place sa méthode, empruntée à Simon Hantaï. Systématiquement pliée dans le sens horizontal, la toile est uniformément recouverte de peinture, de sorte qu’apparaissent, lorsqu’on la déplie, des bandes alternativement peintes et non peintes. Parmentier entend donner à voir de cette manière le négatif de la peinture. Sa démarche prend ensuite la forme d’une série d’actions critiques en association avec ses amis peintres, Daniel Buren, Olivier Mosset et Niele Toroni. Ainsi, en écho à la dénonciation par Guy Debord de « la société du spectacle », les artistes, considérant que la peinture est « par vocation objectivement réactionnaire », déclarent lors d’une manifestation collective dans le cadre du Salon de la jeune peinture en 1967 : « Nous ne sommes pas peintres. » Dans le prolongement de ces actions, connues comme celles du groupe B.M.P.T., Parmentier décide de se « gommer plus encore ». Il cesse alors de peindre « définitivement », tout en continuant de lire et d’écrire. Ceci, jusqu’en 1983, date à laquelle, choisissant « presque le silence, mais dit », il accepte de produire à nouveau, mais pour « en finir encore ». S’ensuivent quelques expositions (dont deux à la galerie Durand-Dessert en 1984 et 1988) et un livre d’entretiens croisés avec Buren. GAGEURE L’ouvrage édité par la galerie Loevenbruck après l’exposition que la Villa Tamaris à La Seyne-sur-Mer a consacrée à l’artiste, sous le commissariat de Guy Massaux et de l’Association Michel Parmentier (AMP), tenait donc de la gageure. Il s’agissait de publier un livre dûment illustré sur un artiste en grève pendant quinze ans, de rendre son travail visible et compréhensible, sans trahir ni son désir d’effacement ni son refus d’une posture romantique susceptible de ressortir d’une mauvaise interprétation de son propos. Les difficultés n’étaient pas minces, d’autant que les tableaux de Parmentier – qui en a tout de même réalisés quelques-uns, et de fort beaux – se révèlent peu commodes à reproduire. La plupart, en effet, souvent carrés, sont traversés de bandes de couleur crème, gris perle ou jaune très clair se détachant à peine sur un fond blanc. Or, malgré ces embûches, le livre est une réussite. Bénéficiant d’une mise en pages aérée, il est non seulement vivant et agréable à feuilleter, mais aussi parfaitement en accord avec l’activité théorique et pratique du peintre dont il invite à suivre le parcours à travers toutes sortes d’images : reproductions d’oeuvres et de vues d’expositions, fac-similés de correspondance, de tracts, d’articles (parfois annotés par l’artiste), de pages de catalogue, de couvertures de revues (dont les artpress n°12 et 128, en 1974 et 1988), de cartons d’invitations, etc. Une véritable plongée dans l’épaisseur de la pensée du peintre. Avec les contributions de Philip Armstrong, Robert Bonaccorsi, Agnès Foiret et Jean-Marc Poinsot.