AFRIQUE DU SUD Candice Breitz et Mohau Modisakeng
Depuis quelques semaines, la presse française rapporte régulièrement des échos inquiétants de la situation en Afrique du Sud. Les difficultés économiques et sociales servent de fond à des attaques xénophobes très violentes. Des émeutes étudiantes avaient secoué le pays en 2015, qui se sont étendues de la ville du Cap à Johannesburg. Pour les uns ce moment est passé, tandis que pour les autres le pays est au bord de l’explosion. Pour cette nouvelle édition de la Biennale de Venise, le pavillon sud-africain sera le reflet de cet état du pays, ainsi que de son histoire complexe: une colonisation marquée par les violences de l’Apartheid, puis une transition démocratique pacifique qui n’a pas été suivie d’effets économiques ni sociaux. Les artistes ont aussi cherché, dans une perspective plus large, à s’exprimer sur les migrations forcées. Pour la première fois, le pavillon ne montrera pas une exposition de groupe à proprement parler, mais les travaux de deux artistes qui se répondent même s’ils n’ont pas travaillé ensemble. « À travers des installations vidéo, les visiteurs seront invités à explorer le pouvoir perturbateur de la narration au sujet des vagues de migrations historiques et contemporaines, par rapport à l’expérience du déplacement et de l’exclusion. Qu’est-ce qui est visible dans la vie quotidienne, et invisible dans les représentations culturelles, politiques et économiques ? », dit Lucy MacGarry, l’une des commissaires de l’exposition. Selon un modèle original, le commissariat du pavillon est assuré par la plateforme digitale Connect Channel, qui est aussi une compagnie de production de télévision dirigée par Basetsana Kumalo. Les objectifs de cette exposition, dont le commissariat est assuré par Lucy MacGarry, curatrice de la FNB Joburg Art Fair de 2014 à 2016, et Musha Neluheni, conservatrice en chef et responsable des collections contemporaines de la Johannesburg Art Gallery (JAG) sont de créer de nouvelles images accessibles au plus grand nombre. Figure internationalement reconnue de la scène sud-africaine depuis une quinzaine d’années, Candice Breitz, originaire de Johannesburg et formée aux États-Unis, produit surtout des photographies et des vidéos. Son travail s’appuie souvent sur la culture populaire et l’industrie du divertissement pour questionner les notions d’identité et de stéréotype, les rapports de l’individu à la société et à la communauté. D’une autre génération, Mohau Modisakeng quant à lui, est né dans les townships de Soweto en 1986. Centré sur la sculpture à laquelle il mêle parfois la performance, la photographie et la vidéo, son travail envisage la situation de l’Afrique post-coloniale sous la forme de combats symboliques qui passent par la catharsis et l’expérience du deuil. Il montrera des photographies et une nouvelle installation vidéo. Comme beaucoup des participants à la Biennale, ni les commissaires ni les artistes ne souhaitent révéler à l’avance la nature véritable des oeuvres en production.
Anaël Pigeat
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Articles published in the press have recently given a rather worrying picture of the situation in South Africa, where economic and social difficulties are the backdrop for violent racist attacks. In 2015 the country was shaken by student riots that spread from Cape Town to Johannesburg. But while some see the country as on the brink of explosion, others think the moment has passed. For this year’s Venice Biennale, the South African Pavilion will reflect the state of the country and its complex history: colonisation marked by the violence of apartheid, and then a peaceful democratic transition which has failed to deliver the hoped-for economic and social benefits. Taking a broader perspective, artists have also expressed themselves on the subject of forced migrations.
For the first time, the pavilion will not be putting on a group show as such. Instead, there will be two artists whose work has connections, even if they have not worked together. “Video installations will invite visitors to explore the disruptive power of narrative with regard to the historical and contemporary migration in relation to the experience of displacement and exclusion. What can be seen in everyday life and is invisible in cultural, political and economic representations?” asks Lucy MacGarry, one of the show’s curators. The curating formula is original, since this is enabled by the Connect Channel digital platform, which is also a TV production company directed by Basetsana Kumalo. The objective of this exhibition, which is curated by Lucy MacGarry, curator of the FNB Joburg Art Fair from 2014–2016, and Musha Neluheni, head curator in charge of contemporary collections at the Johannesburg Art Gallery (JAG), is to create new images that are widely accessible. An internationally renowned figure for some fifteen years now, Candice Breitz was born in Johannesburg and trained in the United States. Her work, mainly photographs and videos, often references popular culture and the entertainment industry in order to question notions of identity and stereotype, and the way individuals relate to society and community. Representing another generation, Mohau Modisakeng was born in the township of Soweto in 1986. Centering on sculpture, with which he sometimes combines performance, photography and video, his work considers the situation in post-colonial Africa in the form of symbolic combats that involve catharsis and the experience of grieving. He will be showing photographs and a new video installation. As is so often the case at the Biennale, however, neither the curators nor the artists are giving too much away about the true nature of the works being prepared.
Translation, C. Penwarden