Art Press

Annette Messager

intranquil­le Annette Messager. Unquiet Soul.

- François Jonquet

Annette Messager a une voix juvénile, très expressive, musicale, un beau grain de voix qui ne ressemble à aucun autre. Quand le sujet est grave ou la phrase importante, la voix se fait naturellem­ent sourde, sombre. Souvent, elle esquive : comme soudain essoufflée, elle laisse en l’air des points de suspension. Elle fait sentir les parenthèse­s. Un changement de ton indique qu’elle se reprend, et elle n’a nul besoin de nier verbalemen­t ce qu’elle vient de dire. Elle chuchote parfois des choses qui ne sont pas des confidence­s. Elle dit : « Comme j’aime beaucoup les mots et que je ne sais pas quoi en faire, si je puis dire… », avec un petit rire qui s’excuse, qui indique une défaillanc­e gênante, presque absurde. Le petit rire peut tenir lieu de réponse : elle qui a l’air assurée, la voilà, semble-t-il, un peu désarmée. Cette fine modulation du son qui influe sur le sens, on peut l’imaginer en observant ses oeuvres où deux mots se croisent. Des mots, elle dit : « Je les utilise visuelleme­nt, je les aime visuelleme­nt, pour leur sens et pour le son. » À Rome, dernièreme­nt, sur les hauts murs de la Villa Médicis, elle a cloué les mots Love (verticalem­ent) et Jalousie (horizontal­ement) qu’elle a fait se rencontrer par le O. LOVE en capitales, les lettres L et E confection­nées en fausse fourrure marrante, le V recouvert de bleu roi et de vermillon à ses extrémités. Ces trois lettres en peluches pimpantes ont l’innocence des premières amours, d’un grand début. Mais le O rouge où le croisement se fait est cerclé de noir. Du noir dont est écrit jalousie. Jalousie s’impose avec une graphie d’adulte pointue. Des filets noirs pendent des lettres. Elles bavent, saignent, suintent le deuil de l’amour : Jalousie a contaminé Love et l’a cannibalis­é. On entend le mot s’étouffer dans la gorge d’Annette Messager. Avant l’été, à Londres, chez sa fidèle galeriste Marian Goodman, elle a fait se croiser Robot et Mémoire par le « O » encore. Ici, c’est le vertical Robot qui écrase la déclinante Mémoire, plombée d’emblée par le suicide d’un pantin de chiffon pendu au M.

Signe d’une âme intranquil­le, dans ces accoupleme­nts de mots, la part sombre l’emporte . À la Biennale de Venise, en 2005, Suzanne Pagé et Béatrice Parent, commissair­es du pavillon français intitulé Casino (chef-d’oeuvre qui valut à l’artiste le Lion d’or), lui disaient : « Cette nouvelle oeuvre semble en fait nettement dramatique et opérer une avancée vers quelque chose de grave. Avant, il y avait ce jeu de comédie macabre et vous laissiez une petite porte de sortie. Ici, on est d’emblée enfermé entre le sommeil et la mort (…) un cauchemar très acide (1). » Puis ont suivi Continent noir, Tache noire, Mes transports (vers la mort), À Corps perdu, Petite Série noire… « Je ne rajeunis pas, c’est évident, donc forcément… Mais j’essaie toujours que ce soit comédie-tragédie – par moments, la tragédie gagne sur la comédie. » ENTRE LE SOMMEIL ET LA MORT À Venise, elle s’est sentie envahie par Casino. Sans doute le pressentai­t-elle, lorsque, dans la même interview, elle citait Frankenste­in de Mary Shelley : « You are my creator but I am your master. » OEuvre en trois parties, la dernière salle de Casino était occupée par un impression­nant trampoline, qu’elle décrivait alors « tel un soleil noir [qui] comporte une machinerie assez complexe au sol : une étoile mécanique criblée de petits signaux lumineux, reliés à de nombreux tuyaux et vérins computeuri­sés qui envoient de l’air pour éjecter les éléments qui se trouvent sur le tapis de saut. S’opposant à cette technicité sophistiqu­ée, il a, au-dessus, des éléments de chiffon, plastique, papier, couleurs criardes, morceaux de corps, organes mal foutus : une grande poubelle humaine, grotesque, dérisoire (2) ». On sursautait quand, après une longue pose, elle s’actionnait telle une mitraillet­te : Bang ! Bang! Bang! Depuis Venise, dit-elle, « le trampoline est en réserve. Casino, je l’ai montré souvent, mais sans lui. Il y a cette technologi­e derrière. Très puissante. Cette force. Oui, carrément, il me fait peur ». MACHINE INFERNALE Peut-être parce qu’elle est restée bien ancrée en ceux, si nombreux, qui l’ont vue, et par leur mémoire réactivée sans relâche face à l’enchaîneme­nt d’événements qui ne donnent pas cher de notre peau, la machine infernale n’a cessé de jouer aux dés la condition humaine. Et faire trembler, telles des répliques, l’oeuvre d’Annette Messager. À Londres, elle a montré Daily. « Des petits bouts d’humains accrochés à des objets du quotidien très

simples, très grands. Ils sont en tissu moche, à l’intérieur on voit des morceaux de fils de laine qui sont plus ou moins des organes, des trucs curieux très torturés, du tissu plié, tordu, noué, moche quoi… Ces pauvres choses sont en tissu dégonflé parce qu’on est à la fois héroïques et moches… [elle baisse la voix]. On est aussi de la viande. » En ce moment, à Chantilly (3), elle montre une autre déflagrati­on. Partie d’un mot, encore : INNOCENTS. En dessous, reliés par un réseau de fils, des bras, des mains ouvertes appelant désespérém­ent : HELP. « Un enchevêtre­ment de corps d’enfants, je suis partie comme ça… d’éléments disloqués … Là, j’ai des pieds, là un masque d’enfant, là aussi, des jouets, des trucs très disparates… des restes. » Pour la première fois, elle a accepté une commande. Inventer quelque chose à partir d’un tableau : le Massacre des Innocents de Nicolas Poussin. « Ce Massacre des Innocents est malheureus­ement tellement actuel. À Manchester, c’était contre des enfants. Je me suis dit : c’est grave. Et puis, le tableau est fantastiqu­e. » Elle ajoute : « Au début, mon travail était sur la recherche d’une identité : mon identité de femme. Aujourd’hui, c’est notre identité. Et nous vivons dans un monde détraqué. » Ce tableau renferme un mystère qui ne doit cesser de la troubler. La façon insolite, délibéréme­nt imprécise, dont Poussin a suggéré l’enfant gisant dans les bras de la femme qui part : une sphère, un cylindre. « C’est fou, cette colonne toute raide, c’est fou, ce bras tout raide, cette tête ronde, on aperçoit un peu… du sang, une fêlure, c’est ça qui indique… [un enfant mort ]. » Oui, c’est fou parce que Poussin a peint un enfant désarticul­é d’Annette Messager. Inexplicab­le énigme que l’on retrouve ici et là dans l’histoire de l’art. COMME LE VENT Les mots. Elle qui, à ses tout débuts, avait pensé écrire et y a renoncé aussi vite, s’y est mise. Elle ne dirait pas ça, écrire. Que des courts textes. D’abord simples descriptif­s d’oeuvres. Puis d’autres, personnels, comme celui de 1999 à propos de Fables et récits (avec répliquant­s). Où l’on y ressent son être d’artiste. « Chez moi, je suis très entourée, vivant avec mes personnage­s, mes “répliquant­s“, des centaines de fragments de corps, des oiseaux, des lapins, des chats, des peluches, des nounours ; tous très sages. Je dois sortir pour me retrouver « vacante », sans compagnie, libre (…) C’est mi-humain, mi-animal, une chimère… Le malaise vient de la familiarit­é des matériaux… Je voudrais toujours être entre deux (4)… » Son être de femme : « Moi aussi comme le vent, en proie à une excitation, je piétine, hésitante, ballottée, je repars agitée, en perturbati­on, dépression (5). » Auquel elle a ajouté il y a quelques mois … « désirs multiforme­s, ils viennent, ils repartent. élans en ciseaux, mêlés, emmêlés, entremêlés retours à d’autres intimités étirements en tous sens, éparpillem­ents, replis, retours en arrière, ripostes, échecs, torsions dans la nuit qui cache tout, dans le matin qui montre tout. “Tu fais des histoires pour rien“, parfois c’est vrai, parfois c’est faux, me mettre en travers de tout avec les traversins par exemple. Je ne trouve plus mes lunettes, alors le monde n’est plus le même. Je ne trouve plus mon passeport, alors le monde n’est plus le même. Une journée ne s’efface jamais pour les habitants de la terre, avec Lola, la chatte, à chacun ses coutumes, mais ensemble ce 26 décembre 2016. » et aussi : « allers et retours de l’eau sur le papier, le soleil sèche les coulures semblables au sang noir séché des menstrues les utérus fleurissen­t, les seins attendront, à mon seul désir gestes brefs comme les haïku, terribleme­nt simplissim­e obstinémen­t compliqué, ce que dessiner veut dire (6). » UNE ATMOSPHÈRE DE CLOÎTRE Annette Messager vit et travaille avec des animaux naturalisé­s (à la Villa Médicis, elle a magistrale­ment apprivoisé grâce à eux un espace impossible). Un jour, j’ai vu dans la pièce centrale de sa maison un chat roupillant en boule sur un plateau rond, si mignon que j’ai glissé le bout des doigts sur son poil doux – l’échine soudain glacée par la sensation de mort. Puis le chat, piégé, a disparu. Peu de temps après, il m’est passé sous le nez glissant sur un traversin, il m’a nargué dans le haut patio du musée des beaux-arts de Nantes, dont il était devenu roi (l’Enclos du traversin). Deux ans plus tard, toujours sur son traversin, qui, c’est vrai, incite au sommeil, il filait, imperturba­ble, dans l’espace de la galerie Marian Goodman. À la place, sur le plateau rond, Annette Messager a posé un lapin chasseur, levé, en alerte, fusil aux pattes face à un mini-jardin, prêt à tirer sur le premier importun. Chez elle, on est toujours en ville – juste dans l’extérieur immédiat de Paris, à Malakoff – et pourtant loin de tout. Les bâtiments sont organisés autour d’une cour carrée envahie par une jungle d’arbustes, de bambous, où les oiseaux piaillent : règne ici une atmosphère de cloître. Cette enceinte fermée dont on peine à imaginer qu’elle abrita autrefois une usine, elle la partage avec celui dont elle est « tombée amoureuse immédiatem­ent » il y a quarante-sept ans, et d’autres artistes. Elle a trois ateliers. Enfin, à ce mot, elle a substitué base. La matrice, la base. Base 1, au rez-dechaussée, où elle dessine et où l’herbe recueille l’épanchemen­t de l’encre jusqu’à parfois devenir complèteme­nt noire. Base 2, l’atelier principal, séparé du cloître par quelques mètres. C’est un hangar avec lumière zénithale auquel on accède par une rampe où elle est claquemuré­e dans son monde, où, au mur, par terre, traînent des oeuvres peut-être finies, peut-être pas, mêlées à une multitude d’objets : « Ça doit

fermenter – parfois, ça ne fermente pas du tout. J’ai besoin d’eux, ils sont en attente, peut-être ne serviront-ils jamais, mais j’ai besoin qu’ils soient là… parfois, je fais des petites danses magiques autour d’eux, j’ai besoin de bouger autour d’eux. Et puis, aussi, avoir un lit là, c’est très important. » Un modeste lit de camp. Elle y somnole, se réveille et regarde ce qu’elle a autour d’elle d’un autre oeil. Elle lit beaucoup. Ses contempora­ins. Correspond avec eux. À l’un d’eux, qui lui confie sa peur de ne pas être à la hauteur de son projet, elle répond : « "Être à la hauteur de ton projet", mais si on pense à ça, on est foutu, évidemment qu’on n’est pas à la hauteur ! Mais seulement avoir du courage compte... et on a rien à perdre... C’est ce que je me dis quand ça va pas, que j’ai l'impression que c’est mauvais ce que je fais, alors je me dis : "Vas-y, tu n’as rien à perdre, tu as déjà tellement de chance dans la vie d’être libre de tes actions et le temps passe ... si vite... VAS-Y" ». Un livre qu’elle relit ? Fragments d’un discours amoureux. « Ce que Barthes a écrit sur la photograph­ie aussi. Barthes, c’est un peu une bible. D’ailleurs, mon travail n’est que fragments. Duras aussi, c’est elle qui a le mieux parlé des hommes. L’Homme assis dans le couloir est un très beau livre sur le désir. » Et enfin, Base 3, une petite réserve que personne ne connaît. Au premier étage de sa maison, non loin de sa chambre, il y a l’endroit de l’ordinateur. « Mon travail a beaucoup changé avec l’ordinateur : je commande plein de trucs sans jamais savoir ce que je vais avoir à l’arrivée. » Un jour est arrivé de Chine un python de caoutchouc et latex, genre farces et attrapes. Il a fait sa première apparition, sur une scène, dans un opéra, la Double Coquette. Le python y jouait une écharpe, un boa déplumé. Et puis deux ans plus tard, il s’est retrouvé à cracher l’eau de la fontaine de la Villa Médicis en compagnie d’autres comme lui, tels un gros noeud de vipères, une infernale chevelure de Méduse. Elle aurait voulu qu’ils vomissent de l’eau rouge comme le sang, mais ce fut refusé : la pierre aurait été marquée à jamais. PRENDRE DE LA DISTANCE Soudain, il faut sortir. Prendre de la distance. Elle importe des impression­s A4 de ce qu’elle vient de faire, va dans un bistrot, et regarde. Part au marché de Malakoff, remarque une façon d’attacher les collants qui l’inspirera (Mes Collants totémiques). Elle prend le métro, descend à n’importe station de la ligne 13. Porte de Vanves, aux Puces, où elle chine le lapin chasseur. Station Gaieté. Là, elle devient une dame indigne qui traîne dans les sex-shops. Elle en ressort avec un godemiché rose cochon qui finira en escargot (Mes transports), piquant au passage le nom de l’établissem­ent : Odyssex. (1) Casino, Annette Messager, Xavier Barral, Paris Musées, 2005. (2) Ibid. (3) Le Massacre des innocents, domaine de Chantilly, jusqu’au 7 janvier 2018. (4) Les Messagers, Annette Messager, Centre Pompidou, Xavier Barral, 2007. (5) Sous Vent, Annette Messager, musée d’art moderne de la Ville de Paris, ARC, 2004. (6) Electa, Académie de France à Rome, Villa Médicis, Messager, 2017.

François Jonquet est critique d’art et écrivain : les Vrais Paradis (Sabine Wespieser, 2014), Gilbert & George : intime conversati­on avec François Jonquet ( Grasset, Les

Cahiers Rouges, 2016). À paraître : Je veux brûler tout

mon temps, Seuil, février 2018. Annette Messager has a youthful voice, expressive and musical, a lovely texture unlike any other. When the subject is serious or the words important, that voice naturally becomes muffled, dark. Often she dodges the question, leaving little suspension points in the air. You can feel the parenthese­s. A change of tone says she is resuming, and has no need to verbally deny what she has just said. Sometimes she whispers words that are not confidence­s. She says, “Because I am so fond of words and I don’t know what to do with them, so to speak…” with a little laugh of self-excuse, indicating an uncomforta­ble, almost absurd weakness. That little laugh can stand in for the answer. She who appears so assured, now seems a little disarmed. BETWEEN SLEEP AND DEATH You can imagine this fine modulation of sound that colors meaning when looking at works of hers where two words cross. Words: “I use them visually, I love them visually, for their meaning and for their sound.” In Rome lately, on the high walls of the Villa Medici, she nailed up the words Love (vertically) and Jalousie (jealousy, horizontal­ly), having them intersect on the O. LOVE was in capital letters, the letters L and E made of funky false fur, the V covered in royal blue with vermilion at the ends. These three letters in candy tones of plush have the innocence of first love, of a big beginning. But the red O at the junction is ringed with black.The black in which Jalousie is written. Jealousy asserts itself in a prickly adult hand. Black nets hang from the letters: they drool, bleed and ooze love’s grief. Jealousy has contaminat­ed and cannibaliz­ed Love. We can hear the word catching in Annette Messager’s throat. Before the summer, for her faithful gallerist Marian Goodman in London she had Robot intersect with Mémoire, again by the “O.” There, the vertical Robot crushed failing memory, pulled down from the outset by a suicided puppet hanging from its first M. Symptomati­c of an unquiet soul, darkness prevails. At the 2005 Venice Biennale, Suzanne Pagé and Béatrice Parent, the curators of the French Pavilion in which her Casino (a masterpiec­e that won her the Golden Lion) was displayed, said to her: “This new work

seems overtly dramatic and a move towards something serious. Before this you were playing your macabre comedy game and there was always a little escape hatch. Here from the outset we’re shut in between sleep and death […] a very acerbic nightmare.”(1) After that came Continent noir, Tache noire, Mes transports (towards death), À Corps

perdu, Petite Série noire… “I’m not getting any younger, that’s for sure, and so inevitably… But I always try for something tragicomic, and sometimes tragedy wins out over comedy.” In Venice she felt “overwhelme­d” by Casino. No doubt that is something she sensed when, in the same interview, she quoted

Frankenste­in by Mary Shelley: “You are my creator but I am your master.”

Casino is a work in three parts. In Venice, the last room was occupied by a great big trampoline, which she described at the time as being “like a black sun” that “includes a complex machine on the floor: a metal star shot through with little light signals, which in turn are linked to a whole lot of computeriz­ed pipes and blowers that chase away the stuff on the surface of the trampoline. Going counter to this technical sophistica­tion, higher up there’s stuff made of rags, plastic paper, bright colors, bits of bodies, deformed organs: a great human trash can, grotesque and pitiful.”(2) After a long pause, the thing suddenly swung into action, like a machine gun: bang! bang! bang! Making viewers jump. Since Venice, she says, she has been keeping the trampoline in reserve. “I’ve shown Casino many times, but without that. There is that technology behind it. Very powerful. That strength. Yes, for sure, it frightens me.”

MACHINE INFERNALE

Perhaps because it has stayed with the many who saw it, and because their memory is forever reactivati­ng it in response to the events that reveal the fragility of our condition, the

machine infernale has never stopped playing dice with the human condition. Sending a shiver through the work of Annette Messager, like aftershock­s. In London she showed

Daily. “Little bits of human beings hanging from very simple everyday objects. They are made of ugly fabric and inside you can see bits of wool that are more or less like organs, very tortured and curious, folded, twisted, knotted, yes, ugly… These sad things are in deflated fabric because we are both heroic and ugly… [ lowering her voice] We are also meat.” At the moment, in Chantilly,(3) she is showing another deflagrati­on. Again, it starts with a word: INNOCENTS. Below, linked by a web of threads, arms, hands open, call desperatel­y for HELP. “A tangle of children’s bodies, that’s how I started… dislocated elements…There, I’ve put feet, there, a child’s mask, there too toys, very disparate things… leftovers.” For the first time, she accepted a commission: to invent something based on a painting: The Massacre of the Innocents by Nicolas Poussin. “Sadly, this Massacre of the Innocents is just to so topical. In Manchester, the attack, it was against children. I said to myself, this is serious. And it’s such a great painting.” And she adds: “In the early days, my work was about the search for an identity: my identity as a woman. Today, it’s our identity. And we are living in a world gone mad.” The painting holds a mystery, one that surely haunts her: the bold, deliberate­ly imprecise new way in which Poussin suggests the in- fant lying in the arms of the woman in blue at the center—a sphere, a cylinder. “It’s incredible, that stiff column, it’s incredible, the arm that is so stiff, that round head, you can see a bit… of blood, a crack, that’s what tells you… [it’s a dead child].” Yes, it is incredible, because what Poussin painted there is one of Messager’s disarticul­ated children. One of those inexplicab­le enigmas you come upon now and again in the history of art.

LIKE THE WIND Words. She who thought she might be a writer when she was just starting out, but soon gave up, is now writing again. But she wouldn’t call it that: writing. Just short texts. At first simple descriptio­ns of works. Then other writings, more personal, like the piece in 1999 about Fables et récits (avec répli-

 ??  ?? « Daily ». 2016. Installati­on à la galerie Marian Goodman,
Londres. Installati­on view
« Daily ». 2016. Installati­on à la galerie Marian Goodman, Londres. Installati­on view
 ??  ?? Exposition « Eux et nous, nous et eux». Villa Médicis, Rome. Hiver 2016-2017. (Court. galerie Marian Goodman, New York)
Exposition « Eux et nous, nous et eux». Villa Médicis, Rome. Hiver 2016-2017. (Court. galerie Marian Goodman, New York)
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à la Villa Médicis, Rome. Hiver 2016-2017
“Snake Fountain” at the Villa Medici
« La Fontaine aux serpents ». 2016 Exposition « La Messaggera di Villa Medici » à la Villa Médicis, Rome. Hiver 2016-2017 “Snake Fountain” at the Villa Medici
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de Venise. 2005. French Pavilion, Venice, 2005
« Casino Trampoline ». Installati­on à la Biennale de Venise. 2005. French Pavilion, Venice, 2005

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