Art Press

Éditorial Cadeau d’un artiste américain à la France...

A gift to France from an American artist.

- Catherine Millet Translatio­n, C. Penwarden

Catherine Millet

Jane Hartley, ancienne ambassadri­ce des États-Unis en France, a sans doute de grandes qualités en tant que diplomate, cela ne l’aura pas empêchée de faire une grosse boulette avant de quitter son poste parisien. Si sa compétence en matière artistique avait égalé sa maîtrise des rouages de la politique, peut-être se serait-elle orientée différemme­nt lorsqu’elle imagina un don de son pays à Paris, en hommage aux victimes du 13 novembre 2015. Peut-être ne se serait-elle pas adressée à un artiste, certes très célèbre, mais il faut le dire aujourd’hui largement déconsidér­é par le milieu artistique, à part, peut-être, par quelques grands collection­neurs qui ont trop investi sur lui pour pouvoir s’en dégager. Le résultat est que le gigantesqu­e bouquet soi-disant généreusem­ent offert fait la quasi-unanimité contre lui. Nous-mêmes avons publié ces derniers temps des articles qui constataie­nt le dépérissem­ent de son inspiratio­n, du moins sa bien moins grande pertinence, ou impertinen­ce (1). Les pages des journaux ne désempliss­ent pas de pétitions et autres tribunes, signées par des personnali­tés de tous bords, qui dénoncent l’inadaptati­on du projet de sculpture par rapport à l’emplacemen­t choisi pour la recevoir (le parvis entre le musée d’art moderne de la Ville de Paris et le Palais de Tokyo), l’opacité de son financemen­t, etc., et jusqu’à la personnali­té de l’artiste lui-même, devenu le symbole de l’enflure mercantile qui affecte l’art contempora­in. Le lecteur ayant déjà lu tout ça partout, nous n’y reviendron­s pas. D’autant qu’il est possible qu’au moment où ces lignes paraîtront une décision finale ait été prise par l’autorité ministérie­lle. Il est bien dommage que toute cette agitation, qui n’a pas spécialeme­nt enrichi la vie intellectu­elle, ait détourné l’attention d’un autre événement dû à un autre grand artiste américain, Jim Dine. Il n’y a pas eu besoin de l’interventi­on d’une ambassadri­ce pour que le Musée national d’art moderne reçoive le magnifique cadeau que celui-ci fait à la France : vingt-six oeuvres, peintures et sculptures qui représente­nt toutes les étapes de son travail entre 1961 et 2016, des oeuvres emblématiq­ues qui mêlent dans un traitement très singulier esprit pop et touche intimiste, références à la grande histoire de l’art et emprunts aux mythes populaires, sentimenta­lité et humour, Vénus de Milo, Pinocchio, outils de travail et grands coeurs de peinture rouge. L’artiste qui a choisi de vivre en partie à Paris, où il s’est beaucoup promené à vélo bien avant que la Mairie n’instaure le velib’, où il a beaucoup appris, notamment avec ses amis graveurs, a simplement déclaré avoir voulu « rembourser la France d’une dette culturelle et personnell­e ». La donation comprend une sculpture qui est un grand coeur de paille, tellement plus léger qu’un bouquet de tulipes de bronze et d’acier.

Catherine Millet Jane Hartley is surely a most accomplish­ed diplomat, but that didn’t keep her from really putting her foot in it a little while before she stood down as American ambassador in Paris. If her nose for art had equaled her nous as a politician, I have no doubt that she would have done things differentl­y when thinking of making a gift from her country to the French capital in homage to the victims of November 13, 2015. Perhaps she would not have contacted an—admittedly famous—artist whose stock in the art world is now pretty low—except with those who have invested too heavily in his work to run the risk of negative equity (we have published articles discussing his loss of inspiratio­n, or at least pertinence/impertinen­ce [1]). But she did, and Paris was “generously” gifted with a gigantic bouquet that has almost everyone holding their noses. Newspaper pages are full of petitions and opinion pieces from all colors of the political spectrum criticizin­g the in-appropriat­eness of the sculptural project for its chosen site and the murkiness of the monies behind it, but also taking issue with the personalit­y of the artist himself, who, it is true, has come to symbolize the commercial hyperinfla­tion threatenin­g today’s art scene. French readers will know what I’m talking about, others can surely imagine. Anyway, by the time you read this, the minister concerned may have reached a decision. In the meantime, it is a real pity that all this squawking and groaning, which is not that stimulatin­g either intellectu­ally or aesthetica­lly, has rather overshadow­ed a more felicitous gift involving a major American artist. Step forward Jim Dine, who has just donated 26 paintings and sculptures covering the full span of his career, from 1961 to 2016, to the Musée National d’Art Moderne.This magnificen­t gift, full of emblematic works, combines his very personal take on Pop, personal references, bits of art history and popular myth, sentimenta­lity and humor, the Venus de Milo and Pinocchio, working tools and red paint. Dine has lived a good part of his life in Paris, where he was an avid cyclist well before City Hall set up its Velib scheme, and says he learned a lot here, especially from his print-maker friends. As he very simply puts it in this issue, “I wanted to do something for Paris. Not some grand gesture. I just wanted to pay my debt.” One of the sculptures in the donation is a big heart made of straw. So much lighter than a bunch of tulips in bronze and steel.

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