Arnaud Claass
Essai sur Robert Frank Filigranes, 160 p., 25 euros
Photographe et théoricien de la photographie, Arnaud Claass se présente ici comme un bon connaisseur de l’oeuvre du photographe et cinéaste suisse-américain Robert Frank, qui l’accompagne depuis toujours. Son étude apparaît destinée aux amateurs plutôt qu’au public qui viendrait de découvrir Frank à travers l’exposition Sidelines des Rencontres d’Arles cet été. Il faut avoir en tête les images de Frank, depuis ses débuts, à la fin des années 1940, jusqu’à ses plus récentes photographies, au début des années 2010, ou pouvoir se référer aux publications des éditions Steidl, qui depuis 2004 ont entrepris la diffusion de l’ensemble de l’oeuvre, livres de photographie et films. Claass s’attarde sur les Américains (1958), oeuvre phare, notamment pour son organisation et sa mise en page, mais évoque aussi avec acuité telle photographie, tel montage ou plan (le chien regardant par la fenêtre dans The Present, 1996). L’auteur manifeste un double souci bienvenu de contextualis ati onde l’ oeuvre dans son époque et d’actualisation du regard porté sur elle (citant l’essai de Philip Gefter, Photography after Frank, 2009). Il s’attache à dépasser nombre d’oppositions utilisées pour considérer ces images, varie les angles d’analyse et privilégie d’autres notions – le chapitre III s’intitule « Endurance et Mystère ». Claass souligne en particulier le talent qu’a Frank de faire partager au spectateur, aussi vivement que possible, non seulement ce que montrent ses images, mais l’expérience toujours renouvelée de leur production ; ou son attention à l’autre, au sein d’une quête personnelle constante de la vérité. En résulte une lecture de l’oeuvre exigeante et empathique, qui culmine avec cette interrogation finale : « N’est-ce pas justement ce jeu avec des émotions à la généralité feinte qui est si prenant? »