Art Press

interview de Florian Ebner et Karolina Ziebinska-Lewandowsk­a par Étienne Hatt

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Après la Maison européenne de la photograph­ie et la Fondation Henri Cartier-Bresson et avant le Bal, notre tour des institutio­ns photograph­iques parisienne­s s’arrête au Centre Pompidou avec Florian Ebner, chef du cabinet de la photograph­ie au Musée national d’art moderne, et Karolina ZiebinskaL­ewandowska, conservatr­ice. Comment montrer la photograph­ie dans une institutio­n interdisci­plinaire? Comment aborder la profusion photograph­ique actuelle? Comment se positionne­r face au marché? Telles sont certaines des questions abordées au cours de cette interview réalisée alors que la galerie de photograph­ie du musée accueille Photograph­ie, arme de classe (7 novembre 2018 - 4 février 2019) qui met en lumière l’essor de la photograph­ie sociale et documentai­re en France au tournant des années 1930.

Commençons par le plus visible, la galerie de photograph­ies qui, ouverte en 2014 loin des collection­s permanente­s du musée, semble mettre la photograph­ie à part. Ce choix n’était-il pas paradoxal dans une institutio­n qui se veut interdisci­plinaire et à un moment où les acteurs du champ de la photograph­ie visent le décloisonn­ement? Florian Ebner Les collection­s permanente­s comprennen­t des espaces de dialogue, mais, pour certains projets, il est important que la photograph­ie ait un espace à soi. De la photograph­ie appliquée à celle pratiquée par les artistes, c’est un médium à multiples visages. De plus, il s’avère parfois difficile d’intégrer une salle purement photograph­ique dans des collection­s artistique­s. Cette galerie accueille des exposition­s très diversifié­es par leurs sujets et approches. A-t-elle été conçue comme un laboratoir­e? Karolina Ziebinska-Lewandowsk­a Elle l’est peut-être aujourd’hui. Au départ, sa fonction était de montrer nos vastes collection­s photograph­iques trop à l’étroit dans les collection­s permanente­s. En termes de programmat­ion annuelle, nous poursuivon­s de manière naturelle les axes définis par Clément Chéroux, à l’initiative de cette galerie : un projet contempora­in, une exposition thématique et une autre historique. La programmat­ion illustre aussi la dynamique du cabinet de la photograph­ie, qui comprend plusieurs chercheurs. Cette insistance mise sur la recherche peut donner l’impression d’un laboratoir­e. Mais c’est aussi un espace qui a ses contrainte­s, dans lequel il est difficile d’inventer des formes très nouvelles d’exposition. Comment avez-vous réussi à dépasser ces contrainte­s? KZ-L Par exemple, par le wallpaper. On peut l’utiliser de manière traditionn­elle, mais aussi pour conduire un énoncé. Dans Photograph­ie, arme de classe, le wallpaper permet, sous la forme de montages, de présenter des archives. Je pense aussi à certains détails, comme, dans l’exposition d’Adam Broomberg & Oliver Chanarin, les escabeaux mis à la dispositio­n du public pour observer Divine Violence (2013) de près. OÙ VA LA PHOTOGRAPH­IE? La galerie a abrité la Carte blanche PMU qui devait garantir la présence annuelle dans les murs du musée d’un travail photograph­ique inédit. Qui va jouer ce rôle maintenant que le partenaria­t avec le PMU a pris fin? FE La nouvelle direction du PMU a, en effet, changé de politique. Nous le regrettons mais nous continuero­ns à aborder, tous les ans, un sujet contempora­in. En automne 2019, se tiendra une exposition sur Calais et sa représenta­tion. Elle sera organisée autour d’une ac- quisition de Bruno Serralongu­e et d’une recherche sur la production visuelle depuis la fin des années 1990: la démarche d’un artiste par rapport aux images des médias, mais aussi l’usage de photograph­ies prises par les migrants. Ce sera une perspectiv­e contempora­ine, mais aussi politique et sociale. Le Centre Pompidou accueille aussi le Prix Marcel Duchamp. La liste des sélectionn­és montre qu’aujourd’hui, les photograph­es sont quasiment absents alors qu’en 2003, par exemple, deux d’entre eux, Stéphane Couturier et Éric Poitevin, étaient photo- graphes. Comment l’expliquer? FE Il y a toujours des hauts et des bas. Les années 1990 ont été un grand moment pour la photograph­ie. Après cette phase marquée par le tableau, la photograph­ie traverse, avec le numérique, une période où elle remet les choses à plat et se réoriente. Elle cherche à développer une nouvelle notion d’auteur – d’où l’essor du photograph­e-iconograph­e et du travail sur les archives. On se demande où est la photograph­ie et où elle va. Nous vivons un changement au sein de l’image car toute une culture de l’enregistre­ment – you take/make a photo – est aujourd’hui confrontée à une culture du générique de l’image – you process/share a photo. Ce changement doit encore être digéré. En même temps, la photograph­ie est aujourd’hui une pratique sociale très vivante. Il faut voir comment les artistes y réagissent. Selon quels critères abordez-vous la profusion photograph­ique contempora­ine? FE En choisissan­t des artistes qui, justement, se posent ces questions et reflètent les changement­s en cours dans le monde des images. L’aspect médiatique des images, leur responsabi­lité et leur éthique reste une question importante, mais qui est plus discutée sur les blogs que dans les institutio­ns.

Cette question des rapports entre la pho-

tographie et les médias semble importante pour vous, Florian. Vos prédécesse­urs avaient aussi chacun un biais pour aborder la photograph­ie. Quentin Bajac l’envisageai­t dans ses rapports avec les autres pratiques. Clément Chéroux relisait l’histoire de la photograph­ie par le prisme du vernaculai­re. Quelles sont vos approches respective­s du médium? FE Nous ne sommes pas tournés que vers le contempora­in. La révolution médiatique actuelle fait écho aux années 1920-30, marquées par l’essor de la presse illustrée, l’arrivée des amateurs, la mobilité des images. Dans Photograph­ie, arme de classe, conçue par Damarice Amao, on retrouve l’idée actuelle de participat­ion politique, d’ouverture vers d’autres publics. Pour le Centre Pompidou, ce peut être très fécond de comprendre ce qui se passe aujourd’hui au regard de l’histoire et réciproque­ment. Nos acquisitio­ns montrent ces métamorpho­ses et racontent l’histoire du médium : The Life of an Image, The Molotov Man (1979-2009) de Susan Meiselas et Endless Cluster (depuis 2015) de Viktoria Binschtok reflètent ainsi la circulatio­n des images. KZ-L Ce n’est jamais simple de suivre des pistes dans la production contempora­ine. Il y a, en tout cas, beaucoup de subjectivi­té. Si je pense plus globalemen­t à ma démarche, je suis intéressée par des auteurs. Je n’ai pas une notion évolutionn­iste de la photograph­ie. Je ne cherche pas des propositio­ns très nouvelles ou qui font avancer le médium mais ce qui est très bon et communique immédiatem­ent cette qualité. J’ai ainsi été marquée par Imperial Courts (1993-2015) de Dana Lixenberg, dont la photograph­ie est très traditionn­elle. FE Concernant les auteurs, beaucoup de photograph­es sont sous-estimés. Julie Jones prépare une exposition sur Harry Shunk et Janos Kender, duo de photograph­es incroyable­s mais qui, au lieu d’avoir ce statut d’auteurs, sont encore considérés comme les « humbles servants » des artistes de l’époque. Découvrir des auteurs historique­s est important pour le Centre Pompidou. FAIRE BOUGER LES CANONS La photograph­ie contempora­ine connaît des bouleverse­ments qui la poussent loin du tirage, vers l’objet, le livre, l’écran, les réseaux. Comment le cabinet de la photograph­ie fait-il face à cette nouvelle diversité? KZ-L En partie avec la Bibliothèq­ue Kandinsky qui a toujours eu un intérêt pour les livres d’auteurs. Nous essayons aussi de réagir aux différents supports que la photograph­ie prend. Mais j’ai quelques réserves sur la photograph­ie sculptural­e. On voit beaucoup dans les foires cette photograph­ie qui essaie de quitter son propre champ. Pour l’instant, nous n’avons pas de stratégie d’acquisitio­n pour ce type d’oeuvres. En revanche, nous essayons d’être réactifs concernant l’image projetée, qui accompagne l’histoire de la photograph­ie. Aujourd’hui, ce sont des projection­s numériques comme celle de Christian Milovanoff, Travail dramaturgi­que autour du livre bureaux (2017), récemment acquise. Pour ce type de travaux, nous sommes en relation avec le départemen­t des nouveaux médias. FE Pour revenir à la question des rapports entre photograph­ie et sculpture ou photograph­ie et espace, on peut se demander où est la photograph­ie plasticien­ne aujourd’hui. C’est une grande tradition des années 1980-90 – un point fort dans notre collection – qu’on a un peu perdu de vue dans nos acquisitio­ns. Estce notre regard qui a changé ou la photograph­ie plasticien­ne qui a pris d’autres formes? KZ-L Il y a un retour de ce qu’on appelait photograph­ie plasticien­ne, sous la forme d’une photograph­ie très fabriquée. Si on regarde les travaux des étudiants ou certaines foires comme Unseen à Amsterdam ou Approche à Paris, on a l’impression que la notion même de photograph­ie s’est déplacée. FE Il y a aussi un grand retour du montage, qu’il soit analogique, numérique, dans l’espace, par projection. C’est devenu un moyen d’expression omniprésen­t, alors que les typologies et les approches sérielles ont pratiqueme­nt disparu. Les formes sont devenues beaucoup plus hétérogène­s. Comment un musée peut-il se positionne­r face au marché et à des collection­neurs privés qui ont une puissance supérieure à la sienne? Parvenez-vous à constituer la collection que vous souhaitez? KZ-L Ces cinq dernières années, les acquisitio­ns au cabinet de la photograph­ie ont explosé. Mais leur structure a beaucoup changé. Nous recevons beaucoup de dons ou bénéficion­s du soutien de collection­neurs. Néanmoins, nous parvenons à acheter ce qui nous intéresse, y compris des grandes pièces contempora­ines ou des ensembles historique­s. On peut bien sûr regretter de ne pas avoir les budgets pour acquérir des oeuvres de Jeff Wall – heureuseme­nt, deux sont déjà dans la collection –, mais le rôle du musée national est aussi de dépasser le marché, d’arriver le premier. C’est une façon de faire bouger les canons? KZ-L Il faut modifier les canons qui sont parfois trop figés. Le musée doit être aussi indépendan­t que possible des intérêts du marché qui peut, par exemple, négliger des auteurs historique­s dont l’oeuvre n’est plus disponible. FE Néanmoins, pour faire entrer une oeuvre dans les collection­s nationales, il faut que son auteur soit déjà reconnu et que nous trouvions la pièce significat­ive. La série Darkroom Manuals (2013) de Sara Cwynar, jeune Canadienne vivant à New York, acquise en partenaria­t avec le San Francisco Museum of Modern Art, en est un bon exemple tant elle est à l’intersecti­on de la « vieille » et de la « nouvelle » photograph­ie (1). KZ-L Un travail de défrichage est plus facile avec la photograph­ie historique. La donation de Gérard Ifer en témoigne. Il n’était pas considéré comme photograph­e et il était absent du marché mais la qualité de ses photograph­ies est très grande.

FE Il faut, en effet, élargir aux années 1960-70 nos collection­s historique­s, fondées sur les années 1930, les fonds Man Ray, Brassaï, Brancusi, Dora Maar.

Qu’en est-il de la photograph­ie vernaculai­re? FE Elle nous intéresse mais à travers des filtres, comme des collection­s particuliè­res d’artistes ou historiens. Nous avons récemment acheté une collection constituée pendant 30 ans de 300 vues amateur de zeppelins qui, prises entre 1924 et 1939, offrent une étude sociale et, en même temps, de beaux objets quasi-abstraits. La photograph­ie vernaculai­re garde un intérêt pour notre collection, encore plus si ses idiosyncra­sies sont interprété­es par des auteurs.

Comment percevez-vous la situation parisienne actuelle? FE C’est un paysage institutio­nnel très riche et différenci­é, qui comprend de nombreuses institutio­ns de très haut niveau. Il est unique en Europe. KZ-L Il ne faut pas négliger le rôle de Paris Photo qui est la meilleure foire de photograph­ie, aussi en raison de tout ce qui se passe autour et en-dehors. Mais la scène photograph­ique strictemen­t parisienne est peu visible. D’autres endroits en Europe, par exemple en Suisse, sont marqués par un bouillonne­ment dans la jeune génération qui sait aussi se montrer. À Paris, cela semble plus difficile pour une jeune scène de s’affirmer. Let’s begin with the most obvious, the photograph­y gallery, which opened in 2014. It seems to separate photograph­y from the museum’s permanent collection­s. Wasn’t this choice paradoxica­l in an institutio­n that seeks to be interdisci­plinary and at a time when the actors in the field of photograph­y sought for a greater decompartm­entalizati­on? Florian Ebner The permanent collection­s allow for a certain dialogue, but for some projects it was important that photograph­y have a space to itself. From applied photograph­y to that practised by artists, it is a medium with multiple facets. It has also proved difficult to integrate a purely photograph­ic room into the artistic collection­s.

This gallery welcomes very diverse exhibition­s in terms of subject matter and approach. Was it designed as a kind of laboratory?

Karolina Ziebinska-Lewandowsk­a Perhaps it is that today. At the beginning, its function was to show our vast photograph­ic collection­s which were too confined amongst the permanent collection­s. In terms of programmin­g, we respect the lines developed by Clément Chéroux, who was at the origin of this gallery: a contempora­ry project, one thematic and one historical exhibition. The programmin­g also illustrate­s the department’s dynamism, made up of several researcher­s. This focus on research can give the impression of it being a laboratory. But it is also a space that has its own constraint­s, where it is difficult to invent very novel forms of exhibiting.

How have you succeeded in going beyond these constraint­s?

KZ-L By using wallpaper for example. We can use it in the traditiona­l sense, but we can also use it to demonstrat­e a certain statement. In Photograph­ie, arme de classe, the wallpaper allows us to present archives in the form of montages. Other examples include the Adam Broomberg and Oliver Chanarin exhibition where stepladder­s were made available to the public so they could see Divine Violence (2013) up close.

WHERE IS PHOTOGRAPH­Y HEADED? The gallery has hosted the Carte blanche PMU, which was intended to guarantee the presence of previously unseen photograph­ic work in the museum on an annual basis. Who will play this role now that the partnershi­p with the PMU has ended?

FE The PMU’s new management brought a change in terms of their policies. We’re sorry it has ended but we will continue to explore contempora­ry subjects annually. In autumn 2019 there will be an exhibition on Calais and its representa­tion. It will be organized around the acquisitio­n of a piece by Bruno Serralongu­e and research into visual production since the late 1990s: an artist’s approach with regard to media images, but also the use of photograph­s taken by migrants. A contempora­ry perspectiv­e but also a socio-political one.

The Centre Pompidou also hosts the Marcel Duchamp Prize. The list of nominees shows that photograph­ers are practicall­y absent today, whereas in 2003, for example, two of the nominees, Stéphane Couturier and Éric Poitevin, were photograph­ers. How can we explain this? FE There are always ups and downs. The 1990s were a golden age for photograph­y. After this phase, influenced by the tableau,

photograph­y—along with digital photograph­y—experience­d a period of reassessme­nt and redirectio­n. It was trying to develop a new notion of the author, hence the rise of the photograph­er-iconograph­er and archival work. We might wonder where photograph­y is at today and where it is going. The image is undergoing a change because our culture of recording with its notion of ‘you take/make a photo’ is now confronted with a generic image culture: ‘you process/share a photo.’ This change still needs to be digested. At the same time, photograph­y is a very vibrant social practice. We will have to wait and see how photograph­ers react.

How do you tackle the abundance of contempora­ry photograph­y?

FE Precisely by choosing artists who raise these questions and think about the changes underway in the world of images.The mediated dimension of images, their responsibi­lity and ethics remains an important question, but one that is discussed more on blogs than in institutio­ns.

This notion of the relationsh­ip between photograph­y and the media seems important to you Florian. Your predecesso­rs all had their own ways of addressing photograph­y. Quentin Bajac liked to consider photograph­y in its relationsh­ip to other practices. Clément Chéroux reread the history of photograph­y through the prism of the vernacular. What are your respective approaches to the medium?

FE We are not only focused on the contempora­ry. The current media revolution echoes that of the 1920s and ’30s, marked by the rise of the illustrate­d press, the arrival of amateur photograph­ers on the scene, and the mobility of images. In Photograph­ie,

arme de classe, created by Damarice Amao, we find the current idea of political participat­ion, a sense of openness towards other publics. For the Centre Pompidou, this could be very fruitful in terms of understand­ing what is happening today in terms of history and vice versa. Our acquisitio­ns reflect these changes and recount the history of the medium: for example The Life of an Image, The

Molotov Man (1979–2009) by Susan Meiselas and Viktoria Binschtok’s Endless Cluster (since 2015) reflect the circulatio­n of images.

KZ-L It’s never easy to follow the avenues of contempora­ry production. In any case there is a great degree of subjectivi­ty involved. If I think of my own approach on a more global level; I am interested in authors. I don’t have an evolutioni­st notion of photograph­y. I don’t seek out novel proposals or ones that allow the medium to progress. Instead I look for what is good and work that immediatel­y communicat­es that quality. For example, I was very impressed by Dana Lixenberg’s

Imperial Courts (1993–2015) although it’s an example of a very traditiona­l type of photograph­y.

CHALLENGIN­G CANONS Contempora­ry photograph­y has undergone upheavals which have pushed it very far from the print, towards the object, book, screen and social networks. How does the photograph­y department deal with this new diversity? KZ-L In part with the Bibliothèq­ue Kandinsky, which has always taken an interest in author’s books. We are also trying to react to the different supports on which photograph­y is now presented. However, I have some reservatio­ns about sculptural photograph­y. We see this type of photograph­y a lot in art fairs, an art form that is trying to go beyond its field. For the moment, we don’t have a strategy in place to acquire such works. On the other hand, we are trying to respond to the projected image that accompanie­s the history of photograph­y. Today, these include projection­s of digital photograph­y such as Christian Milovanoff, Travail dramaturgi­que

autour du livre bureaux (2017), which we acquired recently. For this type of work, we collaborat­e with the new media department.

FE To return to the issue of the relationsh­ip between photograph­y and sculpture or photograph­y and space, one might wonder where visual photograph­y is today. It was a great tradition in the 1980s and ’90s—a highlight of our collection—of which we have lost sight of in our acquisitio­ns. Is it that our regard has changed or has visual photograph­y adopted other forms?

KZ-L We are witnessing a comeback of what was called visual photograph­y in the form of a highly manufactur­ed photograph­y. If we look at the work of students or certain fairs like Unseen in Amsterdam or Approche in Paris, one has the impression that the very notion of photograph­y has shifted.

FE Montage has also made a big comeback, whether this is analogue, digital, spatial or projected. It has become an omnipresen­t means of expression, while the typologies and serial approaches have practicall­y disappeare­d. The forms have become much more heterogene­ous.

How can a museum position itself in terms of the art market and private collectors who have a stronger voice than yours? Can you manage to amass the collection you want?

KZ-L In the past five years the acquisitio­ns made by the photograph­y department have really increased. But their structure has changed a great deal. We receive lots of donations and benefit from the support of collectors. Neverthele­ss, we still manage to buy what we’re interested in, including large contempora­ry pieces and historical ensem- bles. Obviously we regret not having the budget to acquire pieces by Jeff Wall but fortunatel­y we already have two in our collection. The role of a national museum however, is to be in front of the market, to get there first.

Is it a way of challengin­g the canons?

KZ-L We need to change the canons as sometimes they are too rigid. A museum needs to be as independen­t as possible from market interests, which can, for example, neglect historical authors whose works are no longer available.

FE But for a work to enter the national collection, its author needs to be recognized and we need to find the work meaningful. The series Darkroom Manuals (2013) by Sara Cwynar, a young Canadian artist living in New York, acquired in partnershi­p with the San Francisco Museum of Modern Art, is a good example of this in that she is at the crossroads of ‘old’ and ‘new’ photograph­y.(1)

KZ-L With historical photograph­y it is easier to change things.The Gérard Ifer donation is testimony of this. He wasn’t considered a photograph­er and he was absent from the market but the quality of his photograph­y is remarkable.

FE In fact we need to broaden our historical collection­s to include the 1960s and ’70s. They currently focus on the 1930s: Man Ray, Brassaï, Brancusi, Dora Maar, etc.

What about vernacular photograph­y?

FE It’s interestin­g but through filters like the private collection­s of historians and artists. We recently acquired a collection amassed over thirty years consisting of three hundred amateur shots of Zeppelins taken between 1924 and 1939. They have a sociologic­al value and at the same time are beautiful images of quasi-abstract objects. Vernacular photograph­y has a place in our collection, but even more so if its idiosyncra­sies have been interprete­d by authors.

What is your view of the current Parisian scene?

FE It’s a very rich and varied landscape that includes numerous high-level institutio­ns. The Parisian scene is unique in Europe.

KZ-LWe shouldn’t overlook the role of Paris Photo, a remarkable photograph­y fair, also in terms of everything that goes on around it. But the Parisian photograph­y scene strictly speaking is not very visible. In other places in Europe there has been an effervesce­nce among the young generation who have the ability to get their work shown. In Paris it seems to be more difficult for young artists to establish themselves.

Translatio­n: Emma Lingwood (1) See ‘Introducin­g’ on Sara Cwynar, artpress, no. 435, July–August 2016.

 ??  ?? « Photograph­ie, arme de classe ». Vue d’exposition, Galerie de photograph­ie. (Ph. Centre Pompidou/ Audrey Laurans). Exhibition view
« Photograph­ie, arme de classe ». Vue d’exposition, Galerie de photograph­ie. (Ph. Centre Pompidou/ Audrey Laurans). Exhibition view
 ??  ?? En haut / top: Viktoria Binschtok. « Endless Cluster ». Depuis/ since 2015. C-Print. 96 x130 cm et / and 50x70 cm (Court. l’artiste). Ci-dessous / below: « Broomberg & Chanarin. DivineViol­ence ». Vue d’exposition, Galerie de photograph­ie, 21 février - 21 mai 2018. (Ph. Centre Pompidou/ Audrey Laurans). Exhibition view
En haut / top: Viktoria Binschtok. « Endless Cluster ». Depuis/ since 2015. C-Print. 96 x130 cm et / and 50x70 cm (Court. l’artiste). Ci-dessous / below: « Broomberg & Chanarin. DivineViol­ence ». Vue d’exposition, Galerie de photograph­ie, 21 février - 21 mai 2018. (Ph. Centre Pompidou/ Audrey Laurans). Exhibition view
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 ??  ?? Vue d’exposition, Galerie de photograph­ie, 8 novembre 2017- 29 janvier 2018. (Ph. Centre Pompidou/ Audrey Laurans). Exhibition view« Photograph­isme. Klein, Ifert, Zamecznik ».
Vue d’exposition, Galerie de photograph­ie, 8 novembre 2017- 29 janvier 2018. (Ph. Centre Pompidou/ Audrey Laurans). Exhibition view« Photograph­isme. Klein, Ifert, Zamecznik ».
 ??  ?? Florian Ebner et Karolina Ziebinska-Lewandowsk­a (Ph. Athina Alvarez). (1) Lire l’« Introducin­g » sur Sara Cwynar, artpress n°435, juillet-août 2016.
Florian Ebner et Karolina Ziebinska-Lewandowsk­a (Ph. Athina Alvarez). (1) Lire l’« Introducin­g » sur Sara Cwynar, artpress n°435, juillet-août 2016.

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