TOURCOING
Le Laboratoire de la nature Le Fresnoy - Studio national des arts contemporains / 1er février - 21 avril 2019
Cette exposition collective regroupe une dizaine d’artistes contemporains et sert un double objectif. Dans une perspective historique, on y sonde le rapport particulier qu’entretient l’homme occidental avec la nature : un rapport pétri de scientificité et de fascination. On y met aussi en lumière des correspondances et des continuités entre les premières représentations modernes de la nature et diverses approches plasticiennes actuelles. Le point de départ de cette proposition aussi sobre que spectaculaire, conçue par Pascale Pronnier (commissariat) et Christophe Boulanger (scénographie), est le travail photographique du Britannique William Henry Fox Talbot. Inventeur, dans les années 1830 du calotype, Talbot fixe sur papier, en 1834, l’empreinte photosensible de végétaux. Le Laboratoire de la nature se présente comme un vaste plateau ouvert où viennent dialoguer des documents d’archive, tels que des planches graphiques ou des animaux taxidermisés (ceux, notamment, qu’a prêtés le Musée d’histoire naturelle de Lille), et des propositions plastiques contemporaines faisant écho à ces « représentations » pionnières avant tout soucieuses de conserver au matériau naturel son entière vérité. L’intérêt manifesté pour Talbot s’y concrétise au plus haut point à travers un environnement virtuel 3D signé Mat Collishaw, significativement intitulé Thresholds, (Seuils), où l’artiste britannique reconstitue la première exposition des travaux photographiques de son vénérable compatriote, qui eut lieu en 1839 à la King Edward’s School de Birmingham, et qui fit date. Mark Dion, présent dans l’exposition avec de multiples propositions, interroge la passion du classement et de la taxinomie durablement attachée à l’observation scientifique de la nature. Reprenant le modèle canonique du cabinet de curiosités, il essaime dessins et sculptures d’oiseaux, de coraux ou de mollusques dont on pressent qu’ils sont, à l’égal, le reflet de la réalité et le résultat de sa mise en forme fantasmagorique. Patrick Van Caeckenbergh, féru lui aussi de classifications fantasques, expose maints dessins de très vieux arbres. Si le traitement est précis, la forte présence symbolique de ces austères végétaux tire vers le magique, l’animisme, en une contradiction finement mise en oeuvre. Dans un même esprit de respect sacral pour les créations de la nature et de jeu avec leur offre, entre duplication et sortilège ou culture des mirabilia, du merveilleux, Hicham Berrada, avec Mesk-ellil, installation plongée dans le noir, promène le visiteur à travers un théâtre botanique où s’activent des fleurs connues pour diffuser leur musc la nuit venue. Hideyuki Ishibashi, avec Macula, incite ce dernier à capter sa silhouette grâce à un dispositif proto photographique qui en retient l’ombre de manière éphémère. Lisa Oppenheim, avec Lunagram, expose ses reproductions de clichés historiques de la Lune, réalisés par John William Draper au 19e siècle, obtenus cette fois en utilisant le rayonnement lunaire… Où l’art, comme la nature et avec elle, fait valoir sa nature processuelle.
This collective exhibition brings together a dozen contemporary artists and serves a dual purpose. In a historical perspective, it probes the particular relationship between nature and Western humankind, a relationship steeped in scientificity and fascination. It also brings to light correspondences and continuities between the first modern representations of nature and various contemporary visual approaches. The starting point of this proposal, as sober as it is spectacular, conceived by Pascale Pronnier (curator) and Christophe Boulanger (scenography), is the photographic work of the British William Henry Fox Talbot. Inventor in the 1830s of the calotype, Talbot fixed the imprint of plants on photosensitive paper in 1834. The Nature Laboratory is a vast open platform where archival documents such as artboards and stuffed animals interact with one another (in particular those lent by the Lille Natural History Museum), and contemporary art proposals echoing these pioneering representations, above all concerned with preserving natural matter’s entire reality. The interest shown in Talbot is concretized to the highest degree through a virtual 3D environment signed Mat Collishaw, significantly entitled Thresholds, where this British artist reconstructs the first exhibition of photographic work of his venerable compatriot, which had taken place in 1839 at King Edward’s School in Birmingham. Mark Dion, present in the exhibition with multiple proposals, questions the passion for classification and taxonomy permanently attached to the scientific observation of nature.Taking up the canonical model of the cabinet of curiosities, he multiplies drawings and sculptures of birds, corals and molluscs, which one feels are, equally, the reflection of reality and the result of its phantasmagoric shaping. Patrick Van Caeckenbergh, also a fan of fanciful classification, exhibits numerous drawings of very old trees. If the treatment is precise, the strong symbolic presence of these austere plants tends towards magic, animism, into a finely implemented contradiction. In the same spirit of sacred respect for the creations of nature and of playing with their offer, between duplication and enchantment and culture of mirabilia, the magical, Hicham Berrada, with Mesk- ellil, an installation plunged into darkness, takes the visitor through a botanical theatre with flowers known to diffuse their musk at night. Hideyuki Ishibashi, with Macula, encourages the capturing of this theatre’s silhouette through a proto-photographic device that ephemerally retains shadow. Lisa Oppenheim, with Lunagram, exhibits her reproductions of historical photographs of the Moon, taken by John William Draper in the 19th century, obtained this time using lunar radiation ... Where art, like nature and with it, asserts its procedural nature.