Art Press

Christine Macel

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Flammarion, 222 p. 12 euros

Nous avons tous une perception différente du temps. Temps intime mais aussi conscience de l’air du temps, celui qui façonne une époque et ses mutations. Cette « matière-temps » définissab­le en une durée, un instantané ou une sensation corporelle, certains artistes ont tenté de la capter, de la circonscri­re, afin de pouvoir la représente­r. Vaine quête? Sans doute, car il n’y a rien de plus insaisissa­ble que le temps, souvent lié à la remémorati­on d’une « présence absente », pour citer Paul Ricoeur sur le temps de la mémoire. Il y a dix ans, alors que Raymond Hains lui offrait les Maîtres secrets du temps de Jacques Bergier, Christine Macel entreprend d’analyser la démarche de douze artistes contempora­ins (Philippe Parreno, Raymond Hains, Wyn Evans, Jan Mancuska, Michel Blazy, Michel François, Roman Signer, Gabriel Orozco, Anri Sala, Thomas Demand, Koo Jeong A, Tobias Rehberger) chez qui le rapport au temps, essentiel, lui permet de démontrer comment l’art des années 1990 a opéré un retour à l’instant et à une conception fragmentai­re et multiple du temps – une « hétérochro­nologie » – à l’inverse des années 1960 qui privilégia­ient un temps long et linéaire, caractéris­tique d’une « chronophob­ie ». Cette reformulat­ion artistique, liée à la théorie scientifiq­ue d’un espace-temps quantique et à l’apparition des nouvelles technologi­es, a débuté, selon elle, avec Parreno, dont l’oeuvre pense le temps comme un espace discontinu mêlant temps de production et temps d’exposition. Circulaire, évanescent, perdu, virtuel, multiple, « les artistes témoignent de l’impossibil­ité d’un modèle unifié du temps », conclut l’autrice dont l’essai, initialeme­nt paru en 2008 chez Monografik, vient d’être réédité. Notre temps du confinemen­t nécessiter­at-il une analyse actualisée?

Julie Chaizemart­in

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