Jean Daive
Pas encore une image
L’Atelier contemporain, 320 p., 25 euros
Homme d’une « narration d’équilibre », Jean Daive interroge, dans ses romans comme dans sa poésie, les degrés de transparence et d’opacité des zones de ramification et de réverbération entre écriture et image. Homme de radio à France Culture de 1975 à 2009, il a participé à la création des Nuits magnétiques avec Alain Veinstein, et animé le magazine Peinture fraîche. Il a ainsi mené de nombreuses conversations avec des artistes et leur a facilité l’accès à une parole faite à la fois d’élasticité et de resserrement et qui, en prenant le risque de l’égarement, se prête volontiers à l’élargissement et au rebondissement. Ce livre est un montage constitué à partir d’un choix d’entretiens réalisés, le plus souvent, à l’occasion d’expositions. Il ne se donne pas comme une construction théorique rigide mais au contraire comme un contrepoint, une déambulation heureuse dans un espace de rencontres et d’échanges où tout suscite l’attention la plus vive, l’incitation au détour et convie au pas du promeneur. Son unité s’organise autour de questions, de figures et de motifs convoqués par une pensée de l’art toujours en écho à l’épreuve de la condition humaine : la possibilité de lumière de Mario Merz, la banalité « entre le réel et autre chose » de Toni Grand, l’exigence de survie de Nan Goldin, l’appel de l’élémentaire de Rémy Zaugg, le jeu de Sophie Calle, l’occupation d’un territoire de JeanMichel Alberola, le bricolage/racolage de Raymond Hains, l’insurrection de Claude Royet-Journoud, l’indétermination de James Turrell ou le lieu transformé de Daniel Buren. Dans ces discussions aux circonvolutions fructueuses, Jean Daive ouvre les chemins les plus sensibles pour rendre compte de ce qui parle dans l’image et de ce qui regarde dans l’écriture.
Didier Arnaudet