Collectif
Noir & Blanc
Rmn-Grand Palais/BnF, 256 p., 45 euros
Les confinements et les travaux du Grand Palais auront eu raison de Noir & Blanc dont on espère qu’elle pourra déployer ailleurs les 300 photographies, issues des collections de la Bibliothèque nationale de France, qui devaient composer l’exposition. D’icilà, on recommande vivement le catalogue qui associe richesse de l’illustration et qualité des contributions des quatre commissaires de la BnF, Sylvie Aubenas, Héloïse Conésa, Flora Triebel et Dominique Versavel, et des historiens Michel Frizot et Kim Timby. On comprend, à les lire, que le noir et blanc est une fausse évidence de l’histoire de la photographie : son invention est tardive. L’appellation n’apparaît vraiment qu’à partir des années 1930, marquées par l’essor de la photographie couleur. En réaction aux usages commerciaux puis amateur de la couleur, le noir et blanc désigne bientôt une catégorie esthétique. C’est pourquoi, d’une part, sans négliger les débuts de la photographie, Noir & Blanc met l’accent sur la période qui court de l’après-guerre à nos jours et, d’autre part, adopte un parti pris formel en pointant effets de contraste, jeux d’ombre et de lumière, travail sur les surfaces et les matières, et en montrant comment certains motifs, comme la neige, la nuit, l’architecture industrielle, sont particulièrement propices à ces recherches esthétiques. Le noir et blanc a ainsi survécu à la couleur et au numérique. Il connaît même actuellement un regain d’intérêt. Reste à savoir de quoi il est aujourd’hui le nom. S’agit-il d’une esthétique passéiste ? Son association à l’argentique pourrait le faire penser. Dans son essai en conclusion du catalogue, Héloïse Conésa préfère parler d’une « esthétique de la distance » : les photographes mettent à distance le monde « en faisant varier les états d’âme du noir et blanc ».