Margot Pietri
LEZOUX
Musée de la céramique / 1er février - 7 mars 2021
Au commencement, Margot Pietri (France, 1990) écrit. Un récit d’anticipation qui raconte un monde sans soleil. Ce monde, c’est le nôtre, mais pas totalement non plus puisqu’avec la perte de l’étoile, toute capacité à ressentir aurait disparu. Alors, ce monde, il semble aride et âcre. Il est peuplé d’individus qui ne savent pas aimer ni ne connaissent la haine, sorte d’automates hermétiques, des numéros de série. Pour fonctionner, les habitants se rechargent auprès de sculptures ; elles fournissent en énergie, approvisionnent en sensations – un simulacre d’émotions, normées et quantifiées. Ce sont elles – les sculptures – qui parsèment l’espace de l’exposition l’mfascia. Ainsi, pour son premier solo show, Pietri déploie un paysage urbain, un terrain de transaction. Marc Augé nomme « non-lieux » ces aires de passage, publiques et anonymes, avec lesquelles l’humain entretient une relation de consommation. À mi-chemin entre distributeur automatique et borne de recharge, les oeuvres qui trônent au sol suggèrent des machines aliénantes. Faites d’acier, de bois et de résine, elles semblent défaillantes et leur équilibre précaire, comme si, déjà, elles étaient obsolètes. Le vernis a laissé place aux traces de rouille et les couleurs, blêmes, humides, sont passées. Au mur, les instruments de mesure se succèdent. Ils permettent d’évaluer le niveau d’empathie, jauger un lien social maintenu tant bien que mal. Si, dans cette zone désaffectée, tout se rapporte à une humanité anesthésiée, nulle représentation de l’espèce ; seul siège un petit singe haut perché. Figure allégorique de l’évolution, il contemple la scène en se bouchant les oreilles.
———
In the beginning, Margot Pietri (France, 1990) writes. A futuristic tale of a world without sunshine. This world is ours, but not totally ours, since with the loss of the star, all capacity to feel has disappeared. So this world seems arid and harsh. It is populated by people who neither know how to love nor how to hate, kinds of hermetic automatons, serial numbers. In order to function, the inhabitants recharge with sculptures; the latter provide energy, supply sensations—simulacra of emotions, normalised and quantified. It is they—the sculptures—that dot the exhibition space L’mfascia. Thus, for her first solo show, Pietri deploys an urban landscape, a terrain of transaction. Marc Augé calls these public, anonymous areas of transit with which human beings have a consumer relationship “non-places”. Halfway between a vending machine and recharging stations, the works on the ground suggest alienating machines. Made of steel, wood and resin, they seem to be failing and their balance precarious, as if they were already obsolete. The varnish has given way to traces of rust, and the colours, pale and damp, have faded. On the wall one measuring instrument follows another. They allow us to evaluate the level of empathy, to gauge a social bond maintained as well as possible. Though in this deserted area everything refers to an anaesthetised humanity, there is no representation of the species, only a little monkey perched high up. An allegorical figure of evolution, it contemplates the scene while covering its ears.