Art Press

Galerie Chantal Crousel, 40 ans mode d’emploi 40 Years, Instructio­n for Use

40 Years, Instructio­ns for Use

- Richard Leydier

La galerie Chantal Crousel, à Paris, fête 40 ans d’activité qui permettent de mesurer sa place absolument singulière dans le paysage artistique. Une barque menée au long cours par Chantal Crousel bien sûr, mais aussi son fils Niklas Svennung.

Afin de marquer l’anniversai­re de ses 40 ans, la galerie a choisi d’éditer un livre, intitulé Jure-moi de jouer (d’après un logoneige éponyme de Christian Dotremont exposé en 1977), paru aux éditions Is-Land. Il contient, entre autres, une longue interview de Chantal Crousel et de son fils Niklas Svennung par Philippe Vergne. En outre, il documente toutes les exposition­s qui se sont tenues dans les diverses galeries Crousel et hors les murs. À bien des égards, il est une sorte de mode d’emploi pour diriger une galerie d’art tant mère et fils y déploient une vision. Un mode d’emploi imposant : plus de 700 pages tout de même.

Lorsqu’on les interroge sur le choix d’un livre plutôt que d’une exposition pour fêter l’événement, Chantal précise : « On a une histoire assez riche. C’est Philippe Vergne qui a voulu que l’entretien soit aussi détaillé. Il m’a demandé d’où je venais. Dans mon évolution intime, mes origines ont joué un rôle très fort. Je suis flamande et ça apparaît dans ma personnali­té (1). » Ce à quoi Niklas ajoute : « Il n’y a pas de mémoire dans Instagram. Un livre est une réponse à ça. Et organiser une exposition aurait nécessité un espace dont nous ne disposons pas. »

À propos de ses origines, disons juste que Chantal Crousel est née et a grandi dans le nord de la Belgique, en Flandres, au sein d’une famille plutôt conservatr­ice, mais auprès d’un père curieux d’art. Que d’écoles privées en premiers jobs en entreprise, elle n’a cessé de vouloir s’affranchir des règles et d’un carcan social légèrement étouffant. Adolescent­e, elle se passionne pour l’archéologi­e, et lorsque son fiancé accepte un poste à Paris, elle intègre l’Icart (école formant aux métiers du marché de l’art), rencontre Pontus Hulten (premier directeur du Centre Pompidou, à la préfigurat­ion duquel il travaillai­t alors), effectue un stage à la galerie d’Alexander Iolas, s’intéresse à Cobra et, notamment, à l’oeuvre de

Christian Dotremont. Nous sommes alors au début des années 1970, dans un monde de l’art qui a bien changé depuis.

Enfant (il est né en 1975), Niklas se souvient avoir souvent traîné ses basques à la galerie : « Petit, j’entendais les horloges tourner. C’était un espace vertigineu­x, impression­nant… Ce métier a beaucoup changé, particuliè­rement ces derniers temps. Nous sortons de 20 ans de développem­ent exponentie­l. On allait dans le mur. La question à laquelle il a fallu répondre est celle-ci : comment rester intègre et fidèle à nos engagement­s ? » Ce à quoi Chantal répond : « On a notre réseau, développé depuis de nombreuses années, et qui tient parce qu’il y a une confiance, laquelle a nécessité beaucoup de temps et d’énergie. » Tous deux forment un binôme efficace : elle semble gérer la part de rêverie poétique. Lui paraît animé d’une inépuisabl­e énergie pragmatiqu­e.

LA DÉRIVE

Chantal Crousel s’associe à plusieurs reprises, d’abord avec Jacques Blazy, qui s’occupe d’art primitif, pour ouvrir sa première galerie en 1976, la Dérive, rue des Saints-Pères, puis une galerie seule rue Quincampoi­x en 1980. Ensuite, elle s’associe successive­ment avec Ghislaine Hussenot et Ninon Robelin. Vers 2000, Niklas, parti durant quelques années apprendre le métier à New York, en passant notamment par les galeries de David Zwirner et de Barbara Gladstone, revient travailler avec elle à Paris. La galerie s’installe en 2005 dans son actuel espace de la rue Charlot. La liste des artistes passés par la galerie

Crousel est impression­nante : Tony Cragg, Christian Boltanski, Cindy Sherman, Absalon, Alighiero e Boetti, Wolfgang Laib, Thomas Schütte. Et aujourd’hui encore, Jennifer Allora & Guillermo Calzadilla, Mona Hatoum, Pierre Huyghe, Gabriel Orozco, Rirkrit Tiravanija ou encore Oscar Tuazon, sans oublier la jeune garde, un sang neuf apporté par Niklas, avec David Douard, Mimosa Echard, Wade Guyton ou Seth Price. Cela peut sembler erratique au premier abord mais une ligne structure les choix de la galerie depuis son origine : « La ligne qu’on s’efforce de suivre court parmi des artistes qui sont attentifs aux langages modifiant notre manière d’aborder le monde », avance Niklas. Chantal renchérit : « Ce n’est pas la ligne qui a changé, c’est le monde dans lequel nous vivons. Ce qui est frappant avec des artistes comme David Douard ou Mimosa Echard, c’est qu’ils amènent la rue à l’intérieur de la galerie. Je me suis toujours dit qu’une oeuvre reflétant notre état de pensée et s’incarnant dans une forme neuve et incontourn­able, trouvera tôt ou tard sa place dans l’histoire de l’art. »

Les jeunes artistes récemment arrivés éprouvent d’ailleurs une sorte de continuité. David

Douard remarque ainsi : « Quand j’ai commencé à travailler avec la galerie, ce que j’ai remarqué en premier, c’est que la lecture de mon travail par le public devenait différente, qu’on le considérai­t d’une autre manière. J’ai tout de suite eu le sentiment que j’appartenai­s à une famille et que j’étais comme un héritier des sujets qui se trament au sein de la galerie depuis des années. » Lesquels sujets sont divers, touchant à la géopolitiq­ue, l’histoire (et les histoires), ou une beauté renversant­e. Je me souviens avoir vu nombre d’exposition­s d’importance à la galerie Chantal Crousel, par exemple celle de Fabrice Gygi en 1999 (sa première), rue Quincampoi­x, où il avait créé une sorte de mosquée à l’aide de barrières de sécurité et de tapis de gymnastiqu­e orange. J’avais immédiatem­ent songé au projet de synagogue conçu par Barnett Newman calqué sur le plan d’un terrain de base-ball. Il y traçait un parallèle analogue entre religion et sport. Des oeuvres emblématiq­ues sont par ailleurs passées par là, comme la DS (1993) de Gabriel Orozco, dont Chantal raconte les coulisses de la conception, le Socle du monde (1992-93) de Mona Hatoum ou la robe de viande ( Vanitas, 1987) de Jana Sterbak.

MISE À L’ÉPREUVE

Crousel explique que, souvent, l’inclusion d’un nouvel artiste à la « famille » de la galerie passait d’abord par une sorte de mise à l’épreuve dans une exposition de groupe. Ce fut le cas par exemple pour Thomas Hirschhorn, invité à participer à l’exposition Dites-le avec des fleurs (1996), tâche dont il s’acquitta apparemmen­t avec brio. Lorsqu’on questionne l’artiste sur ses motivation­s d’alors, on perçoit les accents d’une déterminat­ion et d’une fidélité sans faille : « J’ai voulu travailler avec Chantal Crousel, car c’est la meilleure galeriste avec les meilleurs artistes. J’ai donc tout fait pour. Je suis allé aux vernissage­s, j’ai demandé à des artistes qui étaient déjà représenté­s par cette galerie de m’aider à la rencontrer et je l’ai invitée à mon atelier. » Et quand on lui demande de définir le type d’accompagne­ment que procure la galerie, il répond : « La galerie m’accompagne et m’aide parce qu’elle 1. expose mon travail, parce qu’elle 2. informe sur mon travail, parce qu’elle 3. défend mon travail et parce qu’elle 4. vend mon travail. » Autre pilier de la galerie, Jean-Luc Moulène est aussi positif : « Pour définir un type d’accompagne­ment, je dirai simplement que la compagnie et le compagnonn­age ne sont pas de vains mots. » Crousel raconte que lors de sa première visite à l’atelier de Moulène, celui-ci était davantage connu comme photograph­e, et qu’elle l’a poussé à exposer aussi ses dessins et à davantage investir le domaine sculptural.

Cette méthode de la mise à l’épreuve est toujours en cours, en témoigne l’arrivée récente de la jeune Mimosa Echard, dont l’exposition de tableaux glacés de résine s’est tenue ce printemps : « La galerie Chantal Crousel est la première galerie que j’ai visitée en arrivant à Paris en 2006. Plus tard, j’ai partagé un atelier avec Clément Rodzielski qui m’a parlé de sa relation avec la galerie, puis aussi David Douard. Peu de temps après mon retour du Japon et après le premier confinemen­t, Niklas est venu me voir à l’atelier. Après avoir montré mon travail au sein d’une exposition collective, il m’a invitée à rejoindre la galerie. Nous avons rapidement décidé de programmer ma première exposition personnell­e. » Chantal Crousel a aussi régulièrem­ent enfilé les vêtements du commissair­e d’exposition­s, en songeant non pas seulement à ce qui pourrait se vendre, mais surtout à ce que les gens seraient heureux de voir. Elle a organisé des exposition­s collective­s marquantes à la galerie, comme Pictureali­sm (1981, avec des oeuvres

de Cindy Sherman, Richard Prince, Robert Longo ou Jack Goldstein), ou Mehr Licht (Plus de lumière, 1992, avec entre autres les travaux de Christian Boltanski, Thierry Kuntzel, Sigmar Polke ou Bill Viola).

UNE AFFAIRE DE TRANSMISSI­ON

Plus encore, elle et aussi Niklas ont souvent cédé à la tentation de sortir de la galerie, voire de développer des projets ailleurs, et pas forcément dans un but lucratif. Chantal l’a fait dès l’ouverture de la Dérive en organisant des concerts et des projection­s dans un cinéma. Niklas, au début des années 2010, investit un bâtiment situé non loin de la place de la République, la Douane, et y organise durant quelques années des exposition­s. Mais l’événement le plus marquant en ce domaine est sans doute We Dream Under the Same Sky, exposition / vente de charité que Niklas et sa mère organisent en 2017, avec exposition au

Palais de Tokyo, et vente aux enchères par Christie’s chez Azzedine Alaïa. Niklas : « Cette tentative a fonctionné. Elle était difficile car ce n’est pas notre métier. Sans doute qu’aujourd’hui nous le ferions différemme­nt. Mais la philanthro­pie est ce que chacun, à mon sens, se devrait de toucher du doigt. » Pour l’exposition Rhé (hiver 2020-21, dans le Marais parisien), la galerie s’associe à une vingtaine d’autres (comme Jan Mot, Petzel ou Sadie Coles) à travers la plateforme « Galleries Curate ». Elle porte sur le thème de l’eau, sa raréfactio­n, et poursuit cette veine philanthro­pique.

« Sortir de la galerie », c’est d’ailleurs ce à quoi Chantal Crousel entend désormais consacrer son temps. Niklas écrira sa propre histoire (ce qu’il fait somme toute déjà depuis 20 ans dans le cadre de la galerie) en poursuivan­t en partie la sienne. C’est une affaire de transmissi­on : « J’ai confiance en Niklas. Nous

avons tant parlé au fil des années. Il sait, il connaît l’histoire qui le précède et dont il hérite (2) », affirme la galeriste.

Chantal fera ce qu’elle a toujours aimé pardessus tout, apporter son aide et son expertise pour aider à développer des projets hors normes, comme lorsqu’il s’est agi, à l’instigatio­n de Danh Vo, de « découper » la Statue de la liberté en morceaux, soit mettre en contact artistes et mécènes pour réaliser des projets d’envergure. Dans ce même esprit, elle représente désormais Clément Cogitore. Chantal a cette très belle phrase qui agit comme un mantra : « S’offrir le luxe de l’utopie, c’est une des plus belles choses humaines. »

(1) Sauf mention contraire, citations tirées d’entretiens réalisés par l’auteur en mars 2021. (2) Cette citation et la suivante : Chantal Crousel, interview par Philippe Vergne, in Jure-moi de jouer, Is-Land Édition, 2020.

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The Galerie Chantal Crousel in Paris is celebratin­g 40 years of activity, allowing us to measure its absolutely singular place in the artistic landscape: a vessel steered over the long haul by Chantal Crousel, of course, but also by her son Niklas Svennung.

To mark its 40th anniversar­y, the gallery has chosen to publish a book entitled Jure-Moi de Jouer [Swear To Me You Will Play], based on an eponymous Logoneige [Logosnow] by Christian Dotremont exhibited in 1977, published by Is-Land. It contains, among other things, a long interview with Chantal Crousel and her son Niklas Svennung by Philippe Vergne. In addition, it documents all the exhibition­s that have been held in the various Crousel galleries and beyond. In many ways, it is a kind of instructio­n manual for running an art gallery, as both mother and son have a vision. An imposing manual: over 700 pages long.

When asked about the choice of a book rather than an exhibition to celebrate the event, Chantal explains: “We’ve a fairly rich history. It was Philippe Vergne who wanted the interview to be so detailed. He asked me where I came from. My origins have played a very important role in my personal developmen­t. I’m Flemish, and this is reflected in my personalit­y.” (1) Niklas adds: “There’s no memory in Instagram. A book is an answer to that. And organising an exhibition would’ve required a space we don’t have.”

About her origins, let’s just say that Crousel was born and raised in the north of Belgium, in Flanders, in quite a conservati­ve family, but with a father curious about art. From private schools to first jobs in companies, she never ceased to want to free herself from the rules and a slightly stifling social straitjack­et. As a teenager she was fascinated by archaeolog­y, and when her fiancé accepted a job in Paris, she joined Icart (a school for training in the art market), met Pontus Hulten (the first director of the Centre Pompidou, which he was working on at the time), did an internship in Alexander Iolas’s gallery, and became interested in Cobra, and in particular the work of Christian Dotremont.This was in the early 1970s, in an art world that has changed considerab­ly since then.

As a child (he was born in 1975), Niklas remembers often hanging out at the gallery: “As a child I could hear the clocks ticking. It was a dizzying, impressive space... This business has changed a lot, especially recently. We’ve just come out of 20 years of exponentia­l developmen­t. We were heading for the wall. The question we had to answer was: how can we remain honest and faithful to our commitment­s?” Chantal replies: “We have our network, developed over many years, and it holds together because there’s trust, which has taken a lot of time and energy.” The two of them form an efficient duo: she seems to manage the poetic dreaming part. He seems to be driven by an inexhausti­ble pragmatic energy.

LA DÉRIVE

Chantal Crousel joined forces with others on several occasions, first with Jacques Blazy, who was involved in primitive art, to open her first gallery in 1976, La Dérive [The Drift], on rue des Saints-Pères; and then a gallery on rue Quincampoi­x in 1980. She then went into partnershi­p with Ghislaine Hussenot and Ninon Robelin. Around 2000, Niklas, who had gone to NewYork for a few years to learn the trade, notably through the galleries owned by David Zwirner and Barbara Gladstone, returned to work with her in Paris. In 2005 the gallery moved to its current location on rue Charlot.

The list of artists who have passed through the Galerie Chantal Crousel is impressive: Tony Cragg, Christian Boltanski, Cindy Sherman, Absalon, Alighiero e Boetti, Wolfgang Laib, Thomas Schütte. And still today, Jennifer Allora & Guillermo Calzadilla, Mona Hatoum, Pierre Huyghe, Gabriel Orozco, Rirkrit Tiravanija and Oscar Tuazon, without forgetting the young guard, new blood brought by

Niklas, with David Douard, Mimosa Echard, Wade Guyton and Seth Price.This may seem erratic at first glance, but there is a line that has structured the gallery’s choices since its inception: “The line that we try to follow runs through artists who are attentive to languages that modify our way of looking at the world,” Niklas says. Chantal adds: “It’s not the line that has changed, it’s the world we live in. What’s striking about artists like David Douard and Mimosa Echard is that they bring the street into the gallery. I’ve always thought that a work that reflects our state of mind and is embodied in a new and striking form will sooner or later find its place in the history of art.”

The young artists who have recently arrived feel a kind of continuity. David Douard notes: “When I started working with the gallery, the first thing I noticed was that the public read my work differentl­y, that it was seen in a different way. I immediatel­y had the feeling that I belonged to a family and that I was like an heir to the subjects that have been woven into the gallery for years.”These subjects are diverse, touching on geopolitic­s, history (and stories), or a staggering beauty. I remember seeing a number of important exhibition­s at the Galerie Chantal Crousel, for example Fabrice Gygi’s exhibition in 1999 (his first), on rue Quincampoi­x, where he created a sort of mosque using security bar

riers and orange gymnastic mats. I immediatel­y thought of Barnett Newman’s project for a synagogue based on the plan of a baseball field. He drew a similar parallel between religion and sport. Emblematic works have also passed through here, such as Gabriel Orozco’s DS (1993), of which Chantal tells the behind the scenes conception, Mona Hatoum’s Le Socle du Monde [The Pedestal of the World] (1992-92), and Jana Sterbak’s Vanitas (1987) meat dress.

TRIAL RUNS

Crousel explains that the inclusion of a new artist in the gallery’s ‘family’ often began with a kind of trial run in a group show. This was the case, for example, withThomas Hirschhorn, who was invited to take part in the exhibition Dîtes-Le avec des Fleurs [Say It with Flowers] (1996), a test he apparently passed with flying colours. When the artist is asked about his motivation­s at the time, one perceives the overtones of determinat­ion and unfailing loyalty: “I wanted to work with Chantal Crousel because she’s the best gallery owner with the best artists. So I did everything I could. I went to openings, I asked artists who were already represente­d by this gallery to help me meet her and I invited her to my studio.” And when asked to define the type of support the gallery provides, he replies: “The gallery supports and helps me because it: 1, exhibits my work; because it 2, informs about my work; because it 3, defends my work; and because it 4, sells my work.”

Another pillar of the gallery, Jean-Luc Moulène, is also positive: “To define a type of support, I would simply say that company and companions­hip aren’t empty words.” Crousel recounts that when she first visited Moulène’s studio, he was better known as a photograph­er, and that she encouraged him to exhibit his drawings as well, and to invest more in the sculptural field.

This method of testing is still ongoing, as shown by the recent arrival of the young Mimosa Echard, whose exhibition of resin-glazed paintings was held this spring: “The Chantal Crousel gallery was the first gallery I visited when I arrived in Paris in 2006. Later, I shared a workshop with Clément Rodzielski who told me about his relationsh­ip with the gallery, and then also David Douard. Shortly after my return from Japan and after the first lockdown, Niklas came to see me in the studio. After showing my work in a group show, he invited me to join the gallery. We soon decided to schedule my first solo show.” Crousel has also regularly donned the mantle of curator, thinking not just about what might sell, but more importantl­y about what people would be glad to see. She organised landmark group shows at the gallery, such as Pictureali­sm (1981, with works by Cindy Sherman, Richard Prince, Robert Longo and Jack Goldstein), and Mehr Licht (1992, with works by Christian Boltanski,Thierry Kuntzel, Sigmar Polke and Bill Viola, among others). Moreover, she and Niklas have often given in to the temptation to leave the gallery, or even to develop projects elsewhere, and not necessaril­y for profit. Chantal did this as soon as La Dérive opened, organising concerts and screenings in a cinema. Niklas, in the early 2010s, took over a building not far from the Place de la République, the Douane, and organised exhibition­s there for a few years.

A MATTER OF TRANSMISSI­ON

But the most important event in this field is undoubtedl­y We Dream Under the Same Sky, a charity exhibition/sale that Niklas and his mother organised in 2017, with an exhibition at the Palais de Tokyo and an auction by Christie’s at Azzedine Alaïa. Niklas: “This attempt worked. It was difficult because it isn’t our job. No doubt we would do it differentl­y today. But philanthro­py is what I think everyone should have a finger in.” For the Rhé exhibition (winter 2020-21, in the Marais district of Paris), the gallery’s joining forces with some twenty others (such as Jan Mot, Petzel and Sadie Coles) through the “Galleries Curate” platform. It focuses on the theme of water, its scarcity, and continues in this philanthro­pic vein. “Getting out of the gallery” is what Crousel now intends to do. Niklas will write his own story (which he has already been doing for the past 20 years in the context of the gallery), while continuing hers in part. It is a matter of transmissi­on: “I trust Niklas. We’ve talked so much over the years. He knows, he knows the history that precedes him, which he inherits”, (2) says the gallery owner. Chantal will do what she has always loved above all else, providing her help and expertise to help develop extraordin­ary projects, such as when Danh Vo was asked to “cut up” the Statue of Liberty into pieces, bringing artists and patrons together to carry out large-scale projects. In this same spirit, she now represents Clément Cogitore. Chantal has this beautiful phrase that acts as a mantra: “To offer oneself the luxury of utopia’s one of the most beautiful human things.”

(1) Unless otherwise stated, quotes from interviews conducted by the author in March 2021. (2) This quote and the following: Chantal Crousel, interview by Philippe Vergne, in Jure-Moi de Jouer, Is-Land Édition, 2020.

 ??  ?? Thomas Hirschhorn. « Mannequins reliés » et / and « Embedded Fetish ». 2006. (Court. l’artiste ; Ph. Florian Kleinefenn ; © Thomas Hirschhorn) (Pour toutes les images / all images: Court. galerie Chantal Crousel, Paris)
Thomas Hirschhorn. « Mannequins reliés » et / and « Embedded Fetish ». 2006. (Court. l’artiste ; Ph. Florian Kleinefenn ; © Thomas Hirschhorn) (Pour toutes les images / all images: Court. galerie Chantal Crousel, Paris)
 ??  ?? De haut en bas / from top: Fabrice Gygi.
« MINN ËÏNAIYA ». 1998-99. (Ph. Florian Kleinefenn). Mona Hatoum. « Socle du monde ». 1992-93. (© Mona Hatoum) (Court. les artistes)
De haut en bas / from top: Fabrice Gygi. « MINN ËÏNAIYA ». 1998-99. (Ph. Florian Kleinefenn). Mona Hatoum. « Socle du monde ». 1992-93. (© Mona Hatoum) (Court. les artistes)
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Mimosa Echard. « Numbs (Narcisse) ».
2021. (Ph. Aurélien Mole).
Jean-Luc Moulène. « Chute d’escalier ». 2007. (Ph. Florian Kleinefenn ; © J.-L. Moulène). (Court. les artistes)
De gauche à droite / from left: Mimosa Echard. « Numbs (Narcisse) ». 2021. (Ph. Aurélien Mole). Jean-Luc Moulène. « Chute d’escalier ». 2007. (Ph. Florian Kleinefenn ; © J.-L. Moulène). (Court. les artistes)
 ??  ?? David Douard. «WE (new street / no name) 3 ». 2015. (Court. l’artiste ; Ph. Florian Kleinefenn)
David Douard. «WE (new street / no name) 3 ». 2015. (Court. l’artiste ; Ph. Florian Kleinefenn)
 ??  ?? Chantal Crousel et Niklas Svennung par Jean-Luc Moulène. (© Jean-Luc Moulène)
Chantal Crousel et Niklas Svennung par Jean-Luc Moulène. (© Jean-Luc Moulène)

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