Fernando Bayro-Corrochano
Les Enfants du quartier du Bataclan
Langage, 110 p., 28 euros
Ce nom, Bataclan, qui désignait un lieu consacré depuis plus d’un siècle aux spectacles et à la musique, restera désormais lié à un grand moment de terreur. Les rescapés adultes de l’attentat islamiste, qui a fait 90 morts et des centaines de blessés en 2015, ont évoqué la tragédie vécue. Avaient été oubliés les enfants du quartier, eux aussi traumatisés. Certes, ils n’étaient pas présents dans la salle, ils n’en ont pas vu les images (jamais publiées dans la presse ni exhibées sur les chaînes de télé), mais ils ont été durement touchés par l’atmosphère de la sanglante soirée : les bruits, les cris, les sirènes, le va-etvient des ambulances et voitures de police, et, surtout, durablement marqués par les récits de l’événement par leurs parents et les gens du quartier, par les informations et commentaires en boucle à la radio et la télévision. D’où, chez ces enfants, divers chocs traumatiques nécessitant une prise en charge psychothérapeutique. Comment les aider, alors qu’à leur âge, la parole est malaisée ? Par le dessin. C’est ainsi que sur l’impulsion de Charles Melman a été créé un centre médical, le CMSEA, pratiquant l’art-thérapie. Un travail formidable mené par le psychanalyste Fernando Bayro-Corrochano, lequel a proposé aux enfants de se munir, pour communiquer, d’une feuille blanche, de pinceaux et de tubes de couleurs. La feuille joue le rôle d’un écran, « puissant stimulateur des images », particulièrement les « images sensorielles qui font partie de la vie psychique de l’enfant ». Bayro-Corrochano analyse les cas de ces très jeunes sujets en mal d’être qu’il a eu à traiter par cette voie. Il insiste : le but n’était pas de leur faire produire de l’art mais de les soigner. N’empêche que leurs productions sont, aussi, de très beaux dessins et peintures. C’est ainsi quand on s’affronte au mal incarné.
Jacques Henric