Sophie-Anne Delhomme
Sunset Paradise Exils, 130 p., 16 euros
Los Angeles est la ville du rêve. Sophie-Anne Delhomme y a vécu, y a rencontré les homeless, y a écrit Sunset Paradise, un livre où se croisent les désirs déçus de ceux qui sont « venus faire leur ange à Los Angeles » et qui y ont trouvé le bas-côté d’une route d’errance. Ils y ont trouvé aussi la solidarité des coiffeurs bénévoles qui, chaque samedi, coupent gratis au shelter de Santa Monica. C’est là que Delhomme a recueilli dans une langue toute en poésie les bribes de vies qui composent la rhapsodie de micro-fictions qu’est Sunset Paradise : « Inuit égaré au soleil, il vient d’Alaska », « Amélia veut très court. [Elle] remercie, récupère son chariot et pesamment retourne dans la rue », « Jairus attend qu’un météore lui tombe sur la tête, c’est une blague. Il est dans la rue depuis onze ans... », « Beau gosse, mèche blonde, tatouage, Tony Beach Boy [...] habite sur la plage de Venice. » L’auteure y a rejoint Olivia Fougeirol qui photographie depuis des années les clients sans-maison de ce salon de coiffure de fortune. La photographe est l’héroïne principale du livre et la sortie de Sunset Paradise s’est accompagnée d’une exposition des photographies d’Olivia Fougeirol à la galerie Hug. L’accrochage à même le mur, en une manière disparate presque sauvage, remettait dans leur ambiance urbaine initiale les chairs tannées et tatouées, les éclats de carrosserie, les fleurs d’autoroute… Ces images de Fougeirol rejoignent le texte de Delhomme pour demander sous l’égide du poète de Harlem, Langston Hughes : «What happens to a dream deferred? »[Qu’arrive-t-il à un rêve différé ?] Se dessèche-t-il ? Explose-t-il ? Mis en exergue de Sunset Paradise, ce poème déplace chacune des vies décrites par Sophie-Anne Delhomme du singulier vers l’universel du désir.