Art Press

Mario Santiago Papasquiar­o

- François Bordes

Conseils d’1 disciple de Marx à 1 fan d’Heidegger

Allia, 72 p., 7 euros « Quel souffle, quelle ferveur » dans ce court poème électrisan­t d’un météore de la poésie mexicaine. Proche ami de Roberto Bolaño, il inspira le Manifeste infraréali­ste et servit de modèle au personnage d’Ulises Lima dans les Détectives sauvages. L’auteur, « qu’on croirait directemen­t sorti de l’imaginatio­n d’un Borges beat a bel et bien existé ». Activiste et performeur à Mexico, il voyagea en Europe et au Moyen-Orient. Ce poème de 1975 parut en revue. Le météore ne publia de son vivant que deux plaquettes. Riches de nombreux inédits, ses oeuvres ont été rassemblée­s après sa mort à 45 ans, en 1998. Le poème juvénile et endiablé court à un rythme de bolide. Alternance de longues scansions et de courtes syncopes – diastoles et systoles chères à Octavio Paz qui accueillit le poète dans sa revue, Plural. Poèmes en forme de révolte. Une autre guerre du goût. Il s’agit de « mettre à nu le vide de la farce ». Marcuse, Reich, Rosa Luxembourg surgissent au recoin d’un vers. Heidegger reste tapi dans l’ombre de sa forêt noire. Le poète rebelle, sur une cadence verbale prépunk, le proclame en lettres capitales: « IL N’Y A PAS D’ANGOISSE ANHISTORIQ­UE/ ICI VIVRE C’EST RETENIR SON SOUFFLE/ & SE METTRE À NU. » Tombent les frusques, les masques et les voiles. Ces vers aussi électrique­s que les guitares de Frank Zappa seront précieux à qui souhaite se faire une idée verbale du souffle des années 1970: « Que la vie soit toujours ton atelier de poésie. » Saluons enfin le choix d’une publicatio­n bilingue. La traduction étant parfois un peu emprunté, pouvoir lire l’original n’en est que plus précieux. La postface de Manuel Monsalve éclaire l’itinéraire de cette comète qui sut situer l’action restreinte, mais essentiell­e, du poème: « Poésie: nous sommes encore en vie. »

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