UN A PRINCE DE BY PIERRE CRETON
Présenté en mai dernier à la Quinzaine
des cinéastes, à Cannes, où il a fait beaucoup parler, et récompensé du prix SACD 2023, le nouveau film de Pierre Creton, Un prince, sort en salle ce 18 octobre. Artiste et cinéaste d’une rare singularité, il est aussi ouvrier agricole,
et jardinier depuis 2020. C’est avec Jean-Pierre Rehm qu’il aborde ici ce film
tournant autour de Pierre-Joseph, personnage en formation de jardinier.
Y apparaît également Kutta, le mystérieux « prince ». Une fiction
végétale, entre autres.
Un prince, le titre de votre dernier longmétrage, résonne explicitement du côté de la fiction. Ce n’est pas une première dans votre filmographie, après le livre d’images déclaré qu’était Va Toto ! (2017), mais vous semblez ici souhaiter sa pente la plus fabuleuse, la plus fantastique. D’où provient ce désir de roue libre, pour faire allusion à une scène où le personnage principal dévale la route à vélo ? En roue libre, c’est le sentiment de Pierre-Joseph en quittant enfin l’enfance, même si ce sentiment de joie est aussitôt mêlé de tristesse puisque qu’il se rend sur les lieux où l’homme en qui il a trouvé un père est mort ; ce qui, dans le film, le fait passer à l’âge adulte. Un prince est clairement une fiction, au point de douter de l’existence du héros : le Prince [Kutta]. Il est à la fois une figure fictionnelle et une figure absente. Ce désir de liberté vient peutêtre d’avoir mêlé souvenirs et phantasmes.
VOYAGE DES PLANTES
Le royaume dans lequel semble se mouvoir ce conte de faits, c’est le règne végétal. Des plans d’ouverture, paysages en Inde, puis une main qui doucement délivre une plante et ses racines du sol caillouteux, jusqu’au dessin d’une main tenant haut une fleur en générique de fin. Ce sont les plantes, les fleurs, leurs représentations, leurs images filmées, jusqu’aux effets spéciaux dont bénéficie le personnage du Prince, Kutta (ses organes reproducteurs, et son évanescence conclusive dans un parterre d’herbes), qui offrent au film et à ses personnages leur éden. Pouvez-vous commenter cette insistance florale ? PierreJoseph, au prénom prédestiné (celui du naturaliste Pierre-Joseph Redouté [1], illustrateur de traités de botanique), est un demeuré. Le nom des fleurs, comme celui de la stellaire holostée, est la seule chose qu’il soit capable