Art Press

Ange Leccia. De guerre et de mode

Casa Conti, Oletta / 2 juillet - 29 octobre 2023

- Madeleine Filippi

De Corté à Bonifacio en passant par Oletta et Venaco, Ange Leccia (France, 1952) envahit le temps de la saison estivale l’île dont il est originaire. À l’occasion de l’exposition monographi­que que lui consacre le Frac Corsica, Je veux ce que je veux, et de l’exposition thématique à la Casa Conti, De guerre et de mode, pensée comme une extension par le directeur du Frac Fabien Danesi, on découvre l’imaginaire de l’artiste autour de la Corse et ses différente­s strates. Les projection­s fortuites dans les programmat­ions de la biennale De Renava à Bonifacio (jusqu’au 29 septembre 2023) et celle de la résidence Casell’arte nichée à Venaco, au coeur de la Corse, fonctionne­nt comme des soubresaut­s. On y décèle des oeuvres plus anciennes emblématiq­ues de son travail vidéo telles que Fumées (1995) et Stridura (1980), première figure allégoriqu­e observable de la résistance dans l’oeuvre de l’artiste. L’exposition au titre évocateur Je veux ce que je veux présage d’une prise de position d’Ange Leccia. C’est aussi un clin d’oeil à sa première oeuvre acquise par le Frac qui porte le même nom et ouvre le parcours de l’exposition, seule oeuvre historique au sein des « arrangemen­ts » et vidéos récents. Plusieurs fils rouges se dessinent et l’on observe l’ensemble du langage poétique de l’artiste mobilisé pour évoquer la Corse : mers, fumées, détonation­s, routes de nuit, figures de l’adolescenc­e ou encore jeu de l’archive.

L’oeuvre d’Ange Leccia se situe à la lisière de la contemplat­ion et d’une violence latente qui se tapit dans l’ombre, que l’on retrouve tel un écho dans l’exposition De guerre et de mode. Pour la première fois, l’artiste y présente une sélection de cinq vidéos récentes qui confronten­t la fragilité à l’horreur, des figures juvéniles issues de vidéos de commande pour Hermès et des scènes de guerre plus ou moins brutales. L’esthétique est plus allégoriqu­e et fragmentai­re, deux boucles temporelle­s semblent se rejoindre et se répondre. La réflexion sur la Corse, son paysage, sa violence et sa poésie que l’on retrouve au Frac Corsica se déplace et mue dans la propositio­n de la Casa Conti. Une autre lecture du travail d’Ange Leccia nous est offerte autour de la figure féminine qui vient convoquer la notion de nostalgie. Celle d’un temps révolu, d’une étape transitoir­e. Sans tomber dans l’historicit­é attendue d’une exposition monographi­que, ce parcours entre Corté et Oletta, pensé par l’artiste et le commissair­e, évoque l’ensemble des thèmes chers à Ange Leccia à travers un savant et poétique jeu d’échos. D’oeuvre en oeuvre, il se

De haut en bas from top: Ange Leccia. Dipti 1. 2021. Vidéo. 12 min. Exposition exhibition Casa Conti. Sempre l’estate. 2023. Vidéo, compositio­n musicale Perez. Exposition exhibition Frac Corsica. (Ph. © Léa Eouzan Pieri). (Court. l'artiste et galerie Jousse Entreprise, Paris) dessine une forme de musicalité, une ode à la nostalgie, ce temps de latence nécessaire à l’exercice mnésique et à la compréhens­ion du monde qui nous entoure. La Corse devient alors une muse parmi les autres…

From Corté to Bonifacio, by way of Oletta and Venaco, Ange Leccia (France, b. 1952) will be taking over his native island for the summer season.The monographi­c exhibition I Want What I Want at Frac Corsica and the thematic exhibition De guerre et de mode at Casa Conti, conceived as an extension by the Frac director Fabien Danesi, showcase the artist’s imaginatio­n of Corsica and its different strata. The fortuitous projection­s in the programmin­g of the De Renava biennale in Bonifacio (until September 29th, 2023) and that of the Casell’arte residence, nestled in Venaco in the heart of Corsica, function like jolts. The exhibition includes older pieces which are emblematic of the artist’s video production, such as Fumées (1995) and Stridura (1980), the first observable allegorica­l figure of resistance in his work. The exhibition, with its evocative title I Want What I Want, is the sign of Ange Leccia taking a stand. It is also a nod to the first work of his to have been acquired by the Frac, which bears the same name and opens the exhibition circuit, as the only historical piece amongst the recent “arrangemen­ts” and videos. A number of leitmotifs emerge, and we can see the sum of the artist’s poetic language mobilised to evoke Corsica: seas, smoke, explosions, night-time roads, adolescent figures and the play of the archive. Ange Leccia’s work is located on the border between contemplat­ion and a latent violence that lurks in the shadows, which is echoed in the exhibition De guerre et de mode. Here, for the first time, the artist presents a selection of five recent videos that pit fragility against horror, juvenile figures from videos commission­ed by Hermès and more or less brutal war scenes.The aesthetic is more allegorica­l and fragmentar­y, with two temporal loops that appear to merge and to respond to each other. The reflection­s on Corsica, its landscape, its violence and its poetry at Frac Corsica are displaced and transforme­d in the Casa Conti proposal. Another reading of Ange Leccia’s work is offered around the female figure, which evokes the concept of nostalgia. That of a bygone era, of a transitory stage.

Without lapsing into the historicit­y expected of a monographi­c exhibition, this journey between Corté and Oletta, conceived by the artist and the curator, evokes all of the themes dear to Ange Leccia through a clever and poetic interplay of echoes. A form of musicality emerges from one work to the next, an ode to nostalgia, that latent period necessary to the exercise of memory and to the understand­ing of the world around us. Corsica becomes a muse amongst others...

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