Sébastien Berlendis
Lungomare
Actes Sud, 80 p., 14,50 euros
« Un endroit où aller », c’est la collection d’Actes Sud dans laquelle Sébastien Berlendis a écrit Lungomare. Enfin j’ai lu un horizon, une envie, plutôt qu’un état de fait ou qu’un découragement. Je tiens à saluer la collection et sa volonté d’offrir une allégresse perdue. Aujourd’hui et depuis quelques temps, lire nous demande un avis et convoque notre réflexion sans autorisation, si bien que nous n’imaginons plus rien ou pas grand-chose. Cette fois, j’ai ressenti la langueur, la jubilation et la gratitude qui m’avaient fait aimer la littérature. Qu’on se le dise : ce livre n’a pas d’idée ni même de direction, mais il n’en a pas vraiment besoin. Court, photographique et rythmé, il n’offre rien d’autre qu’une image étendue. Mais quelle image ! C’est l’hiver en France, le ciel est triste. Et Lungomare, immédiatement, nous emmène à Sanremo en Italie dans les années 1970. Le soleil bronze les peaux, les filles portent des mini-jupes et d’un seul geste rejettent des avances malvenues, sans drame aucun, la mère du narrateur pose en photo près d’un hors-bord dans un style tapageur, mais « peut-on aimer l’Italie et refuser son extravagance ? » Le récit nous rappelle une désinvolture qui nous semblait disparue et dont, pourtant, nous avons cruellement besoin. Il paraît que les jeunes ne font plus l’amour. À cette tristesse de fait, entendue ce matin à la radio, a répondu Berlendis : « J’observe les regards qui jouent l’ennui, les peaux ont la couleur du cuivre, le rouge au coeur des bouches, la chanson dit à ce moment les caresses d’après minuit, les visages qu’on cherche dans l’ombre, j’observe certains bustes dégrafés et transparents, les rires, l’impudeur propre à la nuit. » Berlendis transforme ses souvenirs en commune espérance, sinon en nostalgie, et c’est précisément ce qu’écrire permet et ce que lire présume.