Le Covid plus fort que la fête à Rouen
Le couvre-feu a eu raison des derniers espoirs de voir la foire Saint-romain ouvrir ses portes.
LES AMATEURS de sensations fortes vont devoir se faire une raison : à Rouen (Seine-maritime), l’édition 2020 de la foire Saint-romain n’aura pas lieu. La décision est tombée jeudi soir après une ultime réunion avec les représentants de la mairie. Il faut dire qu’avec une métropole classée depuis peu au sixième rang des agglomérations françaises en matière d’incidence de l’épidémie de Covid-19, avec 275 cas pour 100 000 habitants, les dernières chances de voir les lampions s’allumer comme prévu le 23 octobre venaient de disparaître.
Une catastrophe pour les 220 familles qui font de cet événement la plus importante fête foraine de province. « La Saint-romain, c’est 30 % de notre chiffre d’affaires annuel et près de 1,5 million de visiteurs sur quatre semaines », résume, dépité, Karl Morel, propriétaire d’un manège d’autotamponneuses pour enfants et président du comité de promotion. Il faut se rendre à l’évidence, le coronavirus est plus fort que la fête. »
Coup dur pour les forains
Et pourtant, comme il le rappelle, les forains ont tout tenté pour parvenir à travailler. « Malgré la jauge à 5 000 visiteurs, puis à 1 000, malgré les contraintes sanitaires drastiques, nous avons toujours proposé des solutions pour ouvrir. Mais là, le couvre-feu, c’est trop… Economiquement, ce n’est pas viable, désespèret-il. Un manège emblématique comme le King, c’est 17 semiremorques, dix jours de montage pour six personnes. Forcément, il faut pouvoir le rentabiliser. Là, il faut se rendre à l’évidence, ce n’est plus possible. Certains d’entre nous n’ont pas travaillé depuis près d’un an et ne savent pas comment ils vont passer l’hiver avec une trésorerie à sec », s’alarme le gérant.
Après 2015, où un violent conflit avait opposé forains et municipalité sur fond de déménagement conduisant à l’annulation de l’événement, c’est la seconde fois en peu de temps que la Saint-romain n’aura pas lieu. Et l’année dernière, ce sont les effluves venus du site incendié de l’usine de Lubrizol qui avaient parfumé aux hydrocarbures les barbes à papa, avec comme résultat une édition 2019 en demi-teinte.
Des familles itinérantes déjà installées
Sur l’esplanade Saint-gervais qui devait accueillir la foire, quelques structures avaient pourtant commencé à être montées. Elles n’iront pas plus loin, donnant au site une atmosphère de ville fantôme. Tous les professionnels ne sont pas venus évidemment. Mais comme l’indique Nicolas
Mayer-rossignol, maire PS de Rouen, « ceux qui vont s’installer comme ils l’avaient prévu vont pouvoir le faire dans des conditions d’accueil dignes d’une ville comme la nôtre avec l’eau, l’électricité »…
Car, pour certains de ces commerçants itinérants, venir en Normandie fait partie d’une tournée qui rythme leur quotidien. « Certains ont déjà inscrit leurs enfants à l’école à Rouen. Malgré tout, il faut que la vie continue », souligne Karl Morel, qui estime qu’entre 30 et 50 familles vont rester sur la commune. Avec un espoir : que la Saint-romain puisse se dérouler au début de l’année prochaine. Mais là encore, ce sera au Covid-19 de décider si la fête pourra avoir lieu…