Macadam cowboy
Il est l’homme fort du groupe Peter SAS, aux côtés de Patrick Peter qui a fait renaître en 1992, entre autres épreuves organisées par la structure, le Tour de France Automobile sous la forme d’une course historique annuelle : le Tour Auto. Grégory est aus
Ltexte Pierre Suze - photos Bertrand Brémont
a vocation, c’est avoir pour métier sa passion », disait Stendhal. Grégory Miellou semble avoir ce privilège assez rare de pouvoir nourrir son amour pour l’automobile - il est aujourd’hui l’heureux propriétaire d’une Porsche 993 Carrera RS 3,8 l - avec une activité professionnelle qui ne l’éloigne jamais très longtemps des belles voitures ni des circuits. Directeur associé de l’agence Peter, il chapeaute une série d’événements plus prestigieux les uns que les autres, parmi lesquels figure le Tour Auto, une course historique de renommée internationale, résurgence du Tour de France Automobile créé en 1899. C’est un ballet de 240 voitures que l’on peut voir passer sur les petites routes de France chaque année en avril et également disputer des épreuves sur circuit et des spéciales sur routes fermées. Le Mans Classic fait également partie des grands événements de Peter Auto pour lesquels Grégory est fortement mobilisé. Cette incroyable rétrospective des mythiques 24 Heures du Mans constitue le plus grand rassemblement de voitures anciennes du pays avec 800 modèles de course en piste et 8 500 automobiles de collection dans l’enceinte générale. L’édition 2023 sera d’ailleurs celle à ne manquer sous aucun prétexte puisque les cent ans des 24 Heures y seront célébrés à travers l’exposition et la parade des voitures qui ont gagné ou marqué l’épreuve. Et puis comme la course automobile n’est pas qu’une affaire d’hommes, loin s’en faut, Peter Auto organise le Rallye des Princesses, un événement 100 % féminin avec, au programme, plus de 1 000 km à travers les plus belles routes de France. Voilà de quoi occuper sainement le quotidien de Grégory. Comme beaucoup, une fois son travail terminé, il pourrait tirer le rideau, ranger les clés dans la boîte à gants. Mais non, Grégory Miellou continue de vivre sa passion hors du bureau et des événements qu’il organise, au volant d’une Porsche 993 Carrera RS de 1996. « Une auto très particulière dans l’histoire de la marque puisqu’il s’agit de la dernière génération refroidie par air (une marque de fabrique chère au coeur des puristes, NDLR). La Porsche 993 RS en est la version ultime avec son moteur atmosphérique. » La sonorité et les sensations offertes par cette technologie sont, pour beaucoup, plus envoûtantes que celles des moteurs suralimentés, pourtant potentiellement plus puissants. « Il n’a été fabriqué qu’un peu plus de mille Porsche 993 Carrera RS. » Au-delà de sa rareté qui en fait une pièce exceptionnelle, la 993 Carrera RS a l’énorme avantage d’être une sportive (320 chevaux au banc) tout à fait apte à avaler les kilomètres sur route en toute sécurité. Bien plus que sa devancière, la 964 RS, « plus radicale » et donc plus compliquée sur route, à performances à peu près
équivalentes. « Ce modèle a un look intemporel. Il reste relativement mesuré par rapport aux productions actuelles. Son châssis est merveilleux. En dehors de sa valeur qui a fortement augmenté ces dernières années, c’est ce que l’on appelle une “daily car”, qui sait tout faire très facilement. Par rapport aux “anciennes” que nous faisons rouler sur nos courses (911 2.0 l, 2.7 l RS, 2.5 l ST, 2.8 l RSR…), c’est une voiture très facile et efficace. Et, étonnamment, elle reste très confortable. Son poids modéré permet d’adopter des réglages pas trop extrêmes… ce que l’on perd beaucoup avec les productions actuelles qui sont plus lourdes. » À l’écouter, on comprend vite que la passion de Grégory pour les voitures et pour la course ne date pas d’hier. Sa retenue naturelle n’altère pas l’enthousiasme qui entoure ses explications, accessibles et précises à la fois. S’il existait un master en histoire de l’automobile, nul doute qu’il en serait titulaire. C’est toujours fascinant de croiser quelqu’un de totalement épris. On se demande à quel moment a eu lieu l’étincelle, quel a été l’événement déclencheur. Dans le cas de Grégory, on peut émettre l’hypothèse que c’est son père, Grenoblois et amateur de conduite sur neige, qui lui a donné le goût des sports mécaniques, de la vitesse. Aussi, dès qu’il a été en âge de le faire, Grégory a passé son permis. Et puis le destin s’en est mêlé. Alors qu’il était jeune étudiant, Grégory s’est retrouvé à donner un coup de main sur le Grand Prix de l’Âge d’Or, en 1992. C’est là qu’il a rencontré 054
Patrick Peter qui en était l’organisateur et qui lui a proposé de venir travailler sur toutes les courses qu’il organisait à l’époque. Grégory a terminé ses études de gestion, tout en étant présent sur les meetings d’avril à septembre. Puis il a intégré Peter Auto à temps plein. À force de voir les clients arriver à l’agence au volant de Porsche 928 GTS, 959, 964 RS, il a franchi le pas et s’est acheté sa première 911 à la fin des années 90 : une 2.4 T de 1972, son année de naissance. Bonne surprise, le bloc avait été changé pour un S, plus performant. Il s’en est séparé un peu à regret quand un amateur lui a proposé un peu plus du double de ce qu’il avait payé. Ce fut l’occasion de goûter aux Anglaises : d’abord une Lotus Elise, pour le quotidien, puis une Seven dont il dit que « on n’a pas fait mieux en termes de toucher de route », puis une type E série 1 avant de revenir aux Porsche, avec l’acquisition d’une 991. Non pas qu’il ait été déçu par les autos de Coventry et de Hornsey - mais il aime la fiabilité des Porsche, leur facilité de conduite : « Les Anglaises sont géniales parce que, souvent, on peut les réparer soi-même, le problème c’est que c’est tout le temps. » Son rêve aujourd’hui ? Drôle de question à poser à quelqu’un d’entièrement habité qui n’envisage pas de se satisfaire d’un seul objectif. Demandez à un enfant de désigner le meilleur bonbon d’une confiserie. Le graal, ce serait peut-être une Ferrari 250 GT SWB ou non, plutôt une version turbo compressée de 993 RS, la GT, quoique...
« Quand on met le contact, les mauvaises surprises sont plus que rares, ce qui est moins le cas des vieilles Anglaises. »