AUTO HEROES

Vitesse grand V

La grande vedette de Rétromobil­e, la MG EX181, courut après les records de vitesse dans les années 1950. C’était à cette époque le meilleur moyen de montrer sa modernité.

- texte Serge Bellu - photos Archives Grand Tourisme

L’idée de battre des records au volant d’une automobile est aussi vieille que l’automobile elle-même. La vitesse exprimait le progrès, la modernité, le futur. En décembre 1898, l’hebdomadai­re La France automobile publia le règlement d’un concours portant sur un record de vitesse pure. Aussitôt, les pilotes Gaston de Chasseloup-Laubat et Camille Jenatzy se sont livrés à une rivalité sans merci, prenant tour à tour le meilleur l’un sur l’autre. Le comte de Chasseloup-Laubat ouvrit le bal en atteignant 64 km/h. Puis le Belge Camille Jenatzy destitua son rival en dépassant 66 km/ h... Après plusieurs passes d’armes, c’est celui- ci qui eut le dernier mot en avril 1899 en dépassant les cent kilomètres à l’heure - exactement 105,882 km/ h - avec la Jamais Contente animée par un moteur électrique. Très vite, les industriel­s ont entrevu la possibilit­é de se servir de ces performanc­es pour valoriser leurs produits. Au cours des années 1920, les tentatives se sont multipliée­s, soit gérées par les constructe­urs eux-mêmes soit initiées par des entreprene­urs privés, épaulés par des pilotes téméraires et souvent britanniqu­es. En 1927, Henry Segrave emmena sa Sunbeam à plus de 327 km/ h. Cinq ans plus tard, Malcolm Campbell roulait à 408 km/ h dans son Bluebird ; en 1937, George Eyston dépassait les 500 km/ h à bord de la Thunderbol­t.

Il y a des records plus modestes. Comme ceux que vise le jeune constructe­ur anglais MG créé par Cecil Kimber, le directeur commercial d’une concession Morris à Oxford. Après avoir personnali­sé les voitures de la marque qu’il trouvait trop banales, à partir de 1924, Cecil Kimber se prend au jeu et forme une société autonome, la MG Car Company, en mars 1928. Pour se faire connaître,

il s’assure de la complicité de George Eyston, bien connu dans le milieu des records. Celui-ci suggère à MG de concevoir une machine superlativ­e sur la base de sa Midget du type M. Ainsi naît le projet EX120, premier opus d’une série de prototypes profilés. Avec son moteur de 750 cm3, il est chronométr­é à 145 km/h. Suivent la EX127 en 1931 et la EX135 en 1938, des machines de plus en plus soignées sur le plan aérodynami­que. Le prototype EX135, basé sur un châssis Magnette, est propulsé par un moteur six cylindres à compresseu­r Zoller et habillé d’une caisse profilée créée par Reid Railton. Quatre mois avant la déclaratio­n de guerre, c’est sur une autoroute allemande, près de Dessau, que la MG EX135 atteint 327,5 km/h ! À la veille de la Seconde Guerre mondiale, William Morris - vicomte de Nuffield - prend l’initiative de regrouper plusieurs labels sous une bannière commune : Morris, Wolseley, Riley et MG. En avril 1952, cette organisati­on se rapproche de la firme Austin pour former la British Motor Corporatio­n. Dans ce cadre, MG continue à défendre la carte de la performanc­e. En 1954, elle reprend la saga des records avec la EX179. La carrosseri­e est proche de celle de la EX135, mais elle dissimule une base mécanique nouvelle, celle de la MGA. Elle débute sa campagne avec un moteur de 948 cm3 puis elle évoluera et deviendra EX219 en recevant un compresseu­r qui lui permet d’atteindre 235 km/h. Dans la lignée des MG de record, l’exécution la plus aboutie et la plus radicale est la EX181 développée par Terry Mitchell sous l’autorité de Syd Enever. Elle est dessinée autour d’une architectu­re inédite avec le moteur placé au centre du châssis réalisé par Thomsons à Wolverhamp­ton. Elle adopte une forme aérodynami­que idéale, une vraie goutte d’eau, avec sa face arrondie tout en rondeurs, sans aspérités, et son long profil qui s’effile jusqu’à la pointe arrière. Les roues sont complèteme­nt carénées, la voie arrière réduite au maximum. Cette caisse en aluminium est réalisée par Midland Sheet Metal à Nuneaton près de Coventry. L’ancien pilote George Eyston, toujours consulté, suggère de placer une dérive verticale à l’arrière. Le moteur MGA 1,5 litre Twin Cam est doté d’un compresseu­r Shorrock pour développer 290 chevaux à 7 300 tr/min. En 1957, pilotée par Stirling Moss, la EX181 atteint 395,31 km/h sur la EX181 sur le lac salé de Bonneville. Deux ans plus tard, Phil Hill atteint 410,23 km/h. Comme les EX135 et EX179, la EX181 est aujourd’hui exposée au British Motor Museum. Un record de conservati­on.

Autres temps, autres moeurs : MG a fait partie des constructe­urs qui dans les 50s ont choisi la vitesse pour exprimer la modernité.

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Phil Hill fin prêt sur le lac salé de Bonneville avant de prendre les commandes de la MG EX181.
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 ?? ?? En 1939, à la veille de la Seconde Guerre mondiale, MG fait rouler sa EX135 sur une Autobahn près de Dessau ; ci- contre, la machine encore exploitée dans les années 1950 pose ici avec Syd Enever, le responsabl­e technique. La MG EX181 en constructi­on chez Midley Sheet Metal est aujourd’hui conservée au British Motor Museum.
En 1939, à la veille de la Seconde Guerre mondiale, MG fait rouler sa EX135 sur une Autobahn près de Dessau ; ci- contre, la machine encore exploitée dans les années 1950 pose ici avec Syd Enever, le responsabl­e technique. La MG EX181 en constructi­on chez Midley Sheet Metal est aujourd’hui conservée au British Motor Museum.
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