Les jardins de Laussagne, la créativité partagée

Plus qu’un lieu de diversité botanique, Cédric a fait de son jardin un terrain d’expression de son sens artistique et de son imagination, entre compositions florales et créations végétales, qui sont autant d’occasions de partage et d’échange.

Nous voici à Vouzan, village charentais en plein coeur de la forêt d’Horte, à une quinzaine de kilomètres à l’est d’Angoulême. En remontant un petit tertre vers la maison en castine, une pierre calcaire typique de ce coin de Charente, nous sommes accueillis par Héliot, une boule de poils dont la beauté des yeux préfigure celle qui nous attend au jardin. L’allée est bordée de chaque côté par des massifs remplis de belles printanières : narcisses, pensées, tulipes et euphorbes, qui associent leur jaune éclatant et leur rouge intense sur le fond vert résolument de saison des feuillages et du gazon.

Jeux de couleurs

Rien de plus normal en ce – chaud – mois d’avril. Comme l’explique Cédric Maury, le propriétaire, « il faut que les couleurs s’allient avec subtilité et harmonie. Je ne suis pas du genre à mettre de tout partout. Je fais en sorte que, dans les différentes zones qui composent le jardin, il y en ait chaque fois deux qui dominent avec, toujours, un lien entre elles ». Cela fait cinq ans maintenant qu’il le compose comme on peint un tableau. Mais son envie de jardin, elle, est beaucoup plus ancienne. « À 4 ans, j’avais déjà un arrosoir à la main ! » Quelques années plus tard, un voyage en Angleterre lui fait découvrir des jardins où tout n’est

pas aligné méthodiquement comme ce qu’il voit en France, mais dans lesquels, au contraire, le foisonnement est le maître mot. C’est donc le jardin à l’anglaise qui dictera ses futurs choix ainsi qu’une interrogation qu’il garde toujours en tête : « Qu’est-ce qui va me différencier des autres jardins ? »

Créativité débordante

Le fait est que son amour de la nature va au- delà du simple fleurissement de son jardin. En effet, entre les massifs et les bordures, des éléments de décoration variés ponctuent le décor. Sphères, paniers, tontines en osier cohabitent avec sculptures, mobiles et suspensions en bois. Rien, ou presque, de ce qui est végétal n’échappe à l’inventivité de Cédric. Cette créativité se double en outre d’un vrai sens de la récupération : « Nous avons la chance d’avoir une déchetterie verte non loin de la maison. Vous n’avez pas idée des trésors qu’on peut y dénicher, notamment au moment de réaliser les décorations de Noël ! » Cette fibre artistique n’a pas tardé à se faire connaître aux alentours, notamment grâce au marché de producteurs locaux de Vouzan sur lequel Cédric vendait ses créations en vannerie avant que la crise sanitaire ne mette un terme provisoire à cette activité. « J’ai souvent entendu les clients me dire qu’ils aimeraient bien apprendre à faire ça. » Depuis, il anime donc des cours de création végétale à Vouzan ainsi que dans quelques communes voisines. En hiver, des week-ends de vannerie sont également organisés aux Jardins de Laussagne : après la matinée consacrée à la cueillette et à la connaissance des végétaux, le tout suivi d’un déjeuner convivial, place au tressage à côté d’un bon feu de cheminée. Laussagne, c’est définitivement plus que de simples jardins !

Dans la cour enherbée de la maison, trois sphères en clématites trônent devant tout ce qui fait la beauté des Jardins de Laussagne au printemps : une grande diversité botanique – ici notamment, des euphorbes characias, à gauche, et des bulbes de saison (tulipes, narcisses) –, des objets de décoration chinés ou récupérés et des créations végétales, comme cette tontine en osier tressé qui émerge de derrière les sphères. Le tout dans le respect d’un code couleur qui change selon les zones du jardin.

Au XVIIIe siècle, les tontines servaient à transporter des plantes exotiques rapportées des grandes explorations maritimes. L’osier les protégeait pendant le voyage. Aujourd’hui, on les retrouve de plus en plus dans les jardins où on les utilise comme décoration ou pour en faire des supports pour les plantes grimpantes. Ici, Cédric a choisi des osiers de couleurs différentes pour que les tontines s’harmonisent avec la partie du jardin dans laquelle il les a installées.

4 3 1. Vieux seaux en zinc, arrosoirs, lessiveuses en fer blanc… font office de pots et accueillent des joubarbes. 2. Les sphères en clématite sont garnies de leds solaires qui, allumées, donnent du jardin une autre vision. 3. Ce mobile, cadeau d’un artisan de la région, est accroché à une arche en simples fers à béton recouverts de branches de saule et de lierre. 4. Un seringat ‘Aureus’, à gauche, au feuillage vert anis persistant, des giroflées ravenelles, à droite, et un choisya à fleurs blanches voisinent les corbeilles de tulipes. 5. Réalisé par un artisan local, ce banc en châtaignier a d’abord été abrité par une canisse avant que le HORS-SÉRIE rosier grimpant JARDIN ne >> la AVANTAGES fleurisse.

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Grâce à l’imagination de Cédric, le végétal a souvent droit à une seconde vie. Ainsi cette mangeoire pour oiseaux en osier est-elle décorée de lierre mort glané dans un fossé après le passage des services espaces verts de la commune. Quant au mobile fait d’anciens couverts en aluminium, dont « le son est plus harmonieux que celui de l’acier », il est suspendu à de vieilles branches de saule tortueux.

4 1. Devant la corbeille de tulipes trônent des dames-jeannes chinées sur une brocante, dont certaines contiennent des leds solaires qui les transforment en grosses lucioles ! 2. Deux poules en acier Corten fabriquées par un créateur local encadrent un petit massif de jacinthes des bois. 3. Quant au coq qui picore non loin d’elles, il est tout en métal… recyclé, bien entendu ! 4. Les bottes de paille servent parfois de camouflage temporaire, en attendant qu’une zone du jardin soit aménagée. 5. Gerberas, tulipes, carottes et oeufs de caille : une composition florale de printemps littéralement appétissante !

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