NUTRITION. Le sucre, on aime, mais notre santé, moins. Pour ne pas sucrer la gourmandise, on apprend à doser
SUCRE LA BONNE DOSE
OUPS ! LES RECOMMANDATIONS OFFICIELLES
SONT DE NOUVEAU À LA BAISSE… ET LA GOURMANDISE ? ON NE LA SUCRE PAS. ON AJUSTE LA QUANTITÉ ET LA QUALITÉ.
Panique dans nos assiettes ! Alors que la consommation de sucre en poudre ou en morceaux a diminué, celle de sucre dissimulé dans les produits transformés a explosé. « Ce sucre “caché” perturbe le métabolisme car il est vite assimilé, ce qui renforce sa nocivité », alerte le Dr Laurent Chevallier, nutritionniste*. Petit rappel du mécanisme : en absorbant du sucre, on sécrète de l’insuline qui régule la glycémie (le taux de sucre dans le sang). « Lorsque la consommation est durablement trop élevée, ce processus se détériore et perd de sa sensibilité. On observe alors une insulino-résistance qui conduit souvent à l’apparition d’un diabète de type II et à des complications cardio-vasculaires », renchérit le Dr Réginald Allouche, diabétologue**. L’abus de sucre est également le principal responsable du surpoids, car le glucose non utilisé est mis en réserve sous forme de graisses. Alors, on sacrifie le plaisir ? Non. « Tout est question de qualité et de quantité, insiste le Dr Chevallier. En choisissant les bons sucres et en les dosant, on peut trouver l’équilibre entre santé et plaisir. »
JE DÉCODE LES ÉTIQUETTES EN 3 SECONDES
Pour adoucir, masquer l’amertume, renforcer la couleur… le sucre est la potion magique des industriels. Alors, avant de remplir son chariot de jambon, de sauces, de plats cuisinés… on checke les infos cruciales sur les emballages.
« Nature », « sans sucres ajoutés » : ok. Les laitages nature ne renferment que le sucre du lait, le lactose, contrairement aux aromatisés, aux fruits, au chocolat… gorgés de saccharose. L’allégation « sans sucres ajoutés » signifie, quant à elle, que le produit (jus de fruits, compotes…) ne contient que les sucres présents naturellement dans les aliments (fructose des fruits, lactose du lait…). On vérifie en plus dans la liste des ingrédients qu’ils n’ont pas été remplacés par des édulcorants. « Glucides, dont sucres » : je compare. Hélas, le pavé nutritionnel ne fait pas la différence entre les types de sucre et leur provenance, mais cette donnée est utile pour arbitrer entre deux produits d’une même catégorie (biscuits, chocolat…) et zapper tous les produits salés qui affichent plus de 5 g de sucres pour 100 g (par exemple : ketchup = 22 g pour 100 g…).
« Sucre », en tête de liste : je zappe ! Les ingrédients apparaissant par ordre d’importance, on vérifie que le sucre n’apparaît pas en premier. Et on boude les sucres « trafiqués » : sirops de glucose, de fructose, de glucose-fructose, de maïs, mélasse, fructose, mannitol… Tant qu’à consommer du sucre, autant que ce soit du vrai, du saccharose.
JE RUSE POUR DONNER DU GOÛT…
A mes yaourts, mais aussi aux fromages blancs, petits-suisses… Je les choisis entiers. Ils sont plus onctueux et rassasiants. Et contrairement au sucre, le gras ne provoque pas de brutale sécrétion d’insuline. 1 fruit frais ou 2-3 fruits séchés coupés en morceaux dans le yaourt, ça le sucre naturellement. Délicieux aussi : 1 à 2 cuil. à c. d’oléagineux en poudre (amande, noisette, coco…).
A mon eau. Anis, menthe fraîche… permettent de l’aromatiser pour remplacer sodas, jus, sirops… Pratiques aussi, les épices, vanille, cannelle… pour adoucir les compotes ou relever les aliments.
A mes petits plats, grâce aux huiles essentielles culinaires. Vanille, citron, combawa, fleur d’oranger, amande, noisette, badiane… Avec 5 gouttes par portion, on sublime l’aliment. Sur cuisine-aromatique.fr
A mon thé, mon café, en choisissant des mélanges aromatisés, des concentrations moins amères.
JE RÉSISTE AU CHANT DES ÉDULCORANTS
200 à 600 fois plus sucrants que le saccharose, les sucralose, aspartame et autre acésulfame K promettent du goût sans calories ni impact sur la glycémie. Une aubaine ? Pas sûr. Dans une synthèse de 20151, l’Agence nationale de sécurité de l’alimentation conclut à leur inefficacité pour perdre du poids à moyen et long terme.
Ils rendent accrocs. Quant à leur impact – supposé nul – sur la sécrétion d’insuline et la régulation de la glycémie,
les résultats sont surprenants. « Des travaux suggèrent que la consommation d’édulcorants pousse à rechercher les calories “manquantes” au repas suivant, précise le Dr Allouche. Et certains pourraient augmenter l’absorption des glucides auxquels ils sont associés au cours du repas. »
Ils sont carrément dangereux. Plus récemment, les résultats d’une longue étude menée par une équipe de l’Inserm2 indiquent que le risque de développer un diabète de type 2 est plus élevé avec une consommation modérée mais régulière de boissons light plutôt qu’avec celle de boissons sucrées normales. Consommer du light renforce l’envie de sucre, augmente l’appétit, perturbe le microbiote, ce qui favorise une résistance à l’insuline. Moralité ? Mieux vaut moins de sucre, mais du vrai ! 1) https://www.anses.fr/fr/system/files/ NUT2011sa0161 Ra.pdf 2) Publiée dans « The American Journal of Clinical Nutrition », janvier 2013.
JE M’INSPIRE DES CHEFS PÂTISSIERS
Alain Ducasse, Philippe Conticini, Michel Guérard… ont ouvert la voie avec leurs desserts divins, sans abuser du sucre. A l’image de l’enseigne Eugène (Paris 17e), il existe même des pâtisseries pour personnes diabétiques ! Leur credo : réduire la quantité de sucre indiquée de 30 à 50 %, remplacer le reste par des ingrédients naturellement sucrés pour un impact moindre sur la santé.
Des sirops, comme Ducasse. Dotés de pouvoirs sucrants supérieurs à celui du saccharose, ils le remplacent avantageusement : 65 g de miel ou 75 g de sirop d’agave équivalent à 100 g de sucre. On fait comme ce pro, on ajoute 1 à 2 cuil. à s. de sirop d’agave à ses préparations aux fruits (sorbets, mousses…) à la place du saccharose ( Nature, éd. Alain Ducasse). De la compote de pomme, comme Damien. Il s’en sert pour remplacer le sucre dans ses basiques au chocolat, tarte, fondant, coulant ! ( Mes desserts, éd. 750 g). Des jus de fruits non sucrés, comme Conticini. En réduisant, ils concentrent leurs saveurs et sucrent naturellement les préparations. Philippe Conticini utilise ainsi le jus de pomme pour réaliser les biscuits moelleux ou la crème aux oeufs, le jus de raisin pour les choux… ( Gâteaux et gourmandises sans sucre, éd. First).
Du lait infusé, comme Guérard. Son truc pour donner du goût avec moins de sucre : laisser infuser pendant 15 min de la menthe, de la verveine, du thym, des écorces d’agrumes, du café soluble, du thé… dans du lait bouilli, puis filtrer (Minceur essentielle, éd. Albin Michel).
LES FRUITS, C’EST PERMIS
Ce sont des fibres… OK, ils contiennent du sucre en quantités non négligeables, mais pas question de les supprimer.
« Leurs fibres ralentissent l’assimilation du fructose et contribuent à l’équilibre du microbiote intestinal, insiste Laurent Chevallier. Ils sont aussi riches en vitamines, minéraux et antioxydants indispensables à l’organisme. »
Ils comblent l’envie de sucre ! En plus, le plaisir sucré qu’ils apportent limite l’envie pour d’autres produits.
En consommer 2 à 3 par jour, en panachant cru et cuit si on a les intestins fragiles, et en surveillant les quantités :
1 portion = 15 à 18 g de sucre = 3 abricots = 20 cerises = 1 pomme ou 1 poire moyenne = 15 grains de raisin = 1 orange = 1/2 banane = 1 petite mangue.
J’ADOPTE LE P’TIT DÉJ À L’ANGLAISE
Car trop, c’est trop ! Avec ses céréales raffinées (pétales de maïs, grains de riz soufflés, crueslis…), pains au lait ou de mie, viennoiseries, confitures et pâtes à tartiner… la version hexagonale du premier repas de la journée est chargée en sucre ! Pour éviter d’exploser dès 9 h le quota de sucre de la journée, on lui préfère les menus salés à base de pain ou toasts avec du beurre, des oeufs, du jambon, du fromage…
Pas fana de salé au lever ? On opte pour des tartines de pain (au levain, multi-céréales, complet…) avec du beurre ou de la purée d’oléagineux ou des flocons d’avoine dans du lait ou du muesli sans sucre ajouté, et on complète avec 1 fruit frais, ou 2-3 séchés, et 1 laitage nature.