NUTRITION. Y a pas que le bio pour manger sain
SAVOURER DE BONS PRODUITS MÊME S’ILS NE SONT PAS ÉTIQUETÉS VERTS, C’EST POSSIBLE. ON FAIT COMMENT ?
B ien sûr, le logo AB rassure. Apposé sur le sachet de carottes, il garantit un légume (presque) sans pesticides ni autres additifs chimiques. Mais manger « bio » ne garantit pas l’équilibre nutritionnel. Comme le résume Frédéric Denhez*, « manger sain, c’est manger des produits variés, frais, de saison et préparés de façon à conserver toutes leurs qualités ». A condition de bien les choisir, fruits, légumes, viande et poisson non « bio », donc moins chers, ont de vrais atouts pour satisfaire nos besoins, combler nos papilles et, même, rassasier notre conscience écologique. * « Le bio au risque de se perdre », par Frédéric Denhez, coll. Dans le vif, Buchet-Chastel, 12 €.
LE FRAIS, IL N’Y A QUE ÇA DE VRAI !
On évite au maximum les produits transformés (plats, sauces, biscuits, desserts lactés…), c’est le B.A.-BA d’une alimentation plus saine. La plupart d’entre eux – bio ou non – renferme des ingrédients de faible qualité (céréales raffinées, sirops de fructose ou de glucose-fructose, huile de palme…) et de nombreux additifs peu fréquentables. Cerise sur le gâteau, les apports nutritionnels sont plus que douteux : trop de sucre, de sel, de gras, peu de protéines, acides gras essentiels, fibres, vitamines, minéraux et antioxydants. Et, par-dessus le marché, ils cumulent les emballages pas franchement écolos.
Retour aux basiques : fruits et légumes frais en vrac, comme les féculents, céréales et légumes secs. On fréquente la boucherie et la poissonnerie (ou leurs rayons en supermarché). On choisit les laitages nature, sans additifs. Les surgelés et conserves ont droit de cité dans notre panier « sain », à condition qu’ils contiennent uniquement l’aliment sans autre ajout. D’accord aussi pour un produit transformé de temps en temps, en vérifiant que les ingrédients utilisés sont nobles (sucre et non sirop de fructose, beurre et non huile de palme…) et qu’il n’y a pas plus de 2-3 additifs. Si, ça existe !
HONNEUR AUX PRODUITS LOCAUX
On résiste aux intrus. Tentant ce raisin blanc du Chili alors que nos corbeilles de fruits font triste mine entre deux saisons ? Non bio, il est copieusement arrosé de pesticides. Bio (ou non), il a subi le voyage, le stockage, l’attente… qui affectent son goût autant que ses qualités nutritionnelles. Séduisantes, ses soles tropicales dont le prix défie toute concurrence ? Elles proviennent d’élevages intensifs nourris aux croquettes. Lors de ses contrôles toxicologiques, la Direction générale de la Santé et Protection des consommateurs (DG Sanco) constate nombre de dépassements aux limites autorisées. Tant sur les méthodes de culture que les conditions d’élevage, la réglementation européenne est loin d’être la norme ailleurs.
Le réflexe « locavore », c’est bien plus qu’une coquetterie « boboïsante » ! Manger local, et donc de saison, garantit a minima peu ou pas de transport ni de stockage et donc, a priori, moins de traitements. En privilégiant les petits producteurs ou éleveurs locaux, on soutient leur façon de travailler qui se rapproche souvent du cahier des charges bio : animaux élevés en plein air, utilisation raisonnée des pesticides, recours limité aux traitements médicamenteux… Ainsi, on augmente ses chances de consommer une viande et un poisson plus fermes, des fruits et légumes mûrs à point et moins chargés en substances toxiques. Dans l’assiette, cela donne potentiellement plus de nutriments, protéines et acides gras plus qualitatifs, vitamines, minéraux et antioxydants.
PAS DE QUARTIER POUR LES PESTICIDES
On sélectionne à la source les fruits et légumes qui sont les moins traités. Tous n’ont en effet pas besoin de recevoir les mêmes doses phytosanitaires pour assurer de bonnes récoltes à leurs producteurs. Selon l’ONG Environmental Working
Group (EWG) qui publie régulièrement la liste des végétaux les plus contaminés par les pesticides, on peut sans crainte faire le plein d’avocats, de maïs, de choux et choux-fleurs, de petits pois, d’oignons, d’asperges, d’aubergines, et, côté fruits, de mangues, de papayes, de kiwis, de melons, de pamplemousses et d’ananas.
On en élimine un max, en lavant et en frottant fruits et légumes, même si on a prévu de les cuire. Pour plus d’efficacité, on peut les faire tremper 10 à 15 min dans de l’eau additionnée de bicarbonate de soude (1 cuillerée pour 500 ml) : selon une étude de l’université du Massachusetts*, c’est la technique de lavage qui permet d’enlever le plus de résidus. Puis on les épluche en retirant 1 à 2 mm avec la peau car les pesticides migrent vers l’intérieur ou on retire les premières feuilles. Ainsi, selon l’UFC- Que choisir d’octobre 2016, on pourrait diminuer jusqu’à 50 % leur teneur en pesticides. * Journal of Agricultural and Food Chemistry, 2017.
À FOND SUR LES SUPER LABELS
On fait le tri. Les logos et mentions, tous plus alléchants les uns que les autres, se font concurrence dans les rayons pour attirer le chaland. 60 millions de consommateurs en a recensé près de trente dans son hors-série d’août 2017*. « Oubliez les mentions folkloriques : “à l’ancienne”, “paysan”, “fermier”, “à l’herbe”… et concentrez-vous sur les labels qui ont fait leur preuve », conseille Frédéric Denhez.
Le Label rouge, c’est du sérieux. Rigoureusement contrôlé, il garantit une qualité organoleptique supérieure allant souvent de pair avec des modes de production respectueux de la nature. Ainsi, les volailles labellisées gambadent dans la nature, bénéficient d’une alimentation composée d’au moins 75 % de céréales et sont abattues au bout de 81 jours minimum, comme en bio, contre 35 à 40 jours dans un élevage conventionnel. Même philosophie pour le porc, le boeuf et les poissons d’élevage. Pour les fruits et légumes, le melon, certaines pommes de terre, les lingots du Nord…, un mode de culture traditionnel est imposé et un degré de maturité doit être respecté. Enfin, les grains de blé du pain labellisé sont stockés en silo ventilé sans pesticides.
Pour les produits de la mer, on opte pour le label MSC (Marine Stewardship Council), garantie d’une pêche durable. Pour les oeufs, on les prend « de plein air » et BleuBlanc-Coeur : en plus des céréales, les poules consomment du lin riche en acides gras oméga 3, ce qui augmente la teneur en oméga 3 de leur jaune. On repère la qualification « agriculture raisonnée ». En toutes lettres sur l’emballage ou dissimuler derrière la certification HVE, elle est difficile à identifier car les certifications sont en
cours de mise en place, mais elle garantit des produits issus d’exploitations respectueuses de l’environnement. L’usage des produits phytosanitaires n’y est pas interdit (différence avec le bio), mais limité au strict minimum. Et le mode de culture ou d’élevage, non productiviste, préserve le sol, la nature, la biodiversité, avec un cahier des charges et des organismes de contrôle type Bureau Veritas ou Afnor, réputés fiables. Ces pratiques agricoles « qui s’appuient sur la diversité et la richesse des écosystèmes sont plus écologiques que la fraise bio d’Espagne poussée sous serre, l’oignon bio de Nouvelle-Zélande ou le blé bio d’Ukraine cultivé de façon intensive ! », soutient Frédéric Denhez. * 60 millions de consommateurs, Terroirs de France, vérités et mensonges , hors-série n° 123S, août-sept. 2017.
TOUT SE JOUE EN CUISINE
Le bon timing. Plus un fruit ou un légume est consommé à maturité, plus il renferme de vitamines, de minéraux et d’antioxydants. On le choisit donc mûr, pas trop ferme et bien coloré. Sinon, on le garde à température ambiante, dans une corbeille, et on le surveille. Pour profiter des micronutriments, on évite de le laisser traîner des jours durant au fond du bac à légumes : on le consomme vite, en limitant au minimum l’exposition à l’air et à la lumière pendant sa préparation.
Tout doux, la cuisson. Pour préserver au mieux les apports en vitamines et en minéraux, on opte pour des modes de cuisson courts (à la vapeur, à l’étouffée, au wok) pour une consistance al dente, croquante et fondante à la fois.
LA VARIÉTÉ, C’EST BON POUR LA SANTÉ
On évite les diktats : perdue entre végétariens, végans, flexivores (ou flexitariens)… et autres adeptes des modes alimentaires qui nous promettent bien-être et longévité ? Vite, un peu de bon sens : varier ses aliments, c’est le moyen d’obtenir le meilleur rapport bénéfices/risques.
P‰tes, riz, pommes de terre, etc. Ainsi, il est impératif de prévoir des fruits et des légumes de saison et de toutes sortes à chaque repas, d’alterner les variétés grasses et maigres pour les viandes comme les poissons car les toxiques se concentrent dans les tissus adipeux qui renferment aussi tous les bons acides gras. On pense également à multiplier les sources de féculents (pommes de terre, pâtes, riz, mais aussi boulgour, semoule, lentilles, quinoa…), à consommer 2 produits laitiers par jour et à ajouter 1 cuillerée d’huile par repas pour cuire ou assaisonner, là aussi en variant olive et colza ou noix.