ÉVASION. Jour de Têt au Vietnam. Hanoi, Hué, baie d’Ha Long, on y fête l’arrivée du printemps
AU NOUVEL AN LUNAIRE, TOUT SE FÊTE : LE PRINTEMPS, LE FOYER, LES ANCÊTRES. BALADE AU NORD ET AU CENTRE DU VIETNAM ENTRE BRUME ET DÉBAUCHE DE COULEURS.
Ultrachic dans sa longue tunique noire, le portier de l’hôtel Métropole, à Hanoi, accueille les hôtes d’un Happy New Year ! À deux pas, sur le pont du lac de l’Epée, des nuées de femmes en costume traditionnel se mitraillent au smartphone. Élégantes en áo dài, rouges ou jaunes, symboles de bonheur et d’argent. Ou en pourpres pour trouver l’amour… Corsetées dans cette tenue qui couvre tout mais ne cache rien, on les croirait sorties du film Indochine. L’illusion est quasi parfaite lorsqu’elles posent, hilares, devant les fresques rétro le long de l’ancienne voie ferrée. La fête du Têt célèbre joyeusement l’arrivée du soleil dans le signe du Poissons. Grosso modo, entre la fin janvier et la mi-février. En 2019, année du Cochon terrestre, les festivités démarrent le 5 février. Honneur aux ancêtres, pagodes et temples bouddhistes croulent sous les offrandes. Dans une ruelle de la vieille ville, le Mau Ba, un temple de poche, clignote comme à Las Vegas : étonnant bric-à-brac où la statue de Bouddha côtoie celles des empereurs et des Holy Mothers
(les saintes mères protectrices). Repos oblige, les boutiques du quartier des 36 corporations ont baissé le rideau. Mais pas les restos de rue qui servent de délicieuses soupes pho saturées d’herbes fraîches, au ras du bitume.
DANS LES BRUMES DE LA BAIE D’HA LONG
Loin du tumulte de Hanoi, à quelques heures de route, se dévoile un paysage d’estampes tout en nuances de gris et de verts profonds. Fantomatiques, 2 000 rochers en pains de sucre émergent de l’eau calme. Parfois un pinceau de lumière traverse les nuages et dore les parois des récifs. Pour goûter à la quiétude du lieu, à cette saison, la balade sur une jonque s’impose. Mais la baie d’Ha Long est tout aussi envoûtante côté terrestre, à Tam Coc, avec ses cours d’eau qui serpentent entre rochers karstiques et rizières vert fluo.
CHEZ LES FILS DU CIEL
Même si elle a souffert des bombardements pendant la guerre, Hué, capitale culturelle du Vietnam, offre de superbes vestiges de la vie impériale. Il pleut ? Pas grave. De souriantes marchandes du temple fourguent chapeaux coniques et ponchos bariolés aux visiteurs pour une poignée de dôngs. Epatants pour déambuler entre palais et pavillons dans la citadelle royale construite à la Vauban, ou s’égailler dans la Cité impériale. Fier dragon à la proue, les bateaux sillonnent la rivière des Parfums. Signe des temps, la Dame céleste (dont on visite la pagode un peu plus loin) protège, en plus des marins et des pêcheurs, les automobilistes imprudents.
HOI AN, UN DÉCOR DE CINÉMA
Il faut se lever tôt pour échapper aux hordes de touristes et flâner le nez au vent dans les trois rues du centre historique d’une des plus jolies villes du pays. Parfaitement restaurées, les maisons ocre, ourlées de bougainvilliers, accrochent le regard avec leurs balcons festonnés. Le matin, tout est piétonnier. Même les scooters n’ont pas le droit de slalomer. Au marché près de la rivière, les échoppes à touche-touche (et à fleur de sol) déploient leur palette odorante : parfum terreux des champignons, acidulé des mangues, iodé des poissons… Le Vietnam est un impénitent pays gourmand. On s’arrête un peu plus loin dans la galerie-musée Precious Heritage du photographe français Réhahn, parti à la rencontre d’une cinquantaine d’ethnies et qui en a rapporté de sublimes costumes traditionnels.
Et si on veut échapper à la frénésie touristique, on saute sur un vélo pour une sage virée dans les jardins maraîchers aux allées rectilignes plantées d’oignons, de salades, de moutarde, de coriandre, et éclairées de chrysanthèmes jaune pétard (symbole de prospérité) que l’on retrouve devant chaque maison pendant la fête du Têt.