Anaïs et sa petite maison dans la prairie

« Dès que je peux, même en semaine, je file dans ma bicoque au pied de la montagne Sainte-Victoire. Là-bas, je retrouve ma liberté. Je soigne mes oliviers, je cueille des plantes sauvages : immortelles, genévriers… J'en ai répertorié une vingtaine, et je les transforme en préparations pour mon entourage. Je fais des potions, comme une vraie sorcière! J'ai toujours été beaucoup plus à l'aise en pleine nature qu'en ville. Pourtant, ma maisonnette n'a rien de confortable. Je ne vis que dans une pièce, entre la cheminée, la banquette et la table. La pièce d'à côté se résume à un réchaud et un garde-manger. Les pièces du haut sont inhabitables, les racines des arbres soulèvent les carreaux, je fais la vaisselle dans un ancien pot à fruits confits, je me douche dehors au tuyau d'arrosage. Mais c'est chaleureux, vivant et tellement beau, avec des tonnes de papillons, des abeilles, des sangliers qui viennent boire avec leurs petits (et labourent le jardin…). Mon père a acheté cette maison dans les années 1960 à des agriculteurs. On y passait tous nos dimanches quand j'étais petite. J'adore y dormir, devant le feu quand il fait froid, sous le tilleul l'été. Cet endroit est le témoin de tous les moments de ma vie, tristes comme gais. J'adore organiser des grandes tablées avec mes amis. L'été, on dîne sous les loupiotes accrochées aux arbres. À l'automne, on passe la journée à ramasser les olives et, à 16 heures, après la pesée, on mange la daube. Cette maison n'a jamais été réhabilitée. J'ai toujours entendu mon père dire que c'était impossible, notamment en raison des murs très épais. Il y aurait tant à faire, mais, en respectant l'esthétique et l'âme, c'est très compliqué… ou trop cher. J'aimerais au moins rénover les deux petites chambres du haut et installer un point d'eau chaude. Et, pourquoi pas, accueillir des petits groupes pour partager ma passion des plantes traditionnelles. En même temps, j'ai envie de garder cet endroit secret. Cette maison, c'est mon cocon. » ■