Coup de blues, LES ALTERNATIVES AUX MÉDICAMENTS
Grosse fatigue, moral dans les chaussettes, perte d’envie, trous de mémoire… Certains traitements naturels sont tout aussi – voire plus – efficaces que les antidépresseurs pour retrouver sa joie de vivre. À condition de viser juste.
Soigner une humeur en berne à coups de plantes, d’activité physique et de lumière ? Il y a quelques années encore, les spécialistes de la santé mentale étaient dubitatifs. Désormais, ils n’hésitent plus à recommander ce type d’approche lorsque le mal n’est pas trop profond.
« En revanche, si on n’arrive plus à se lever, à aller travailler, qu’on est agité, qu’on ne dort plus ou, au contraire, trop, et/ou que l’on a des pensées noires, le recours aux antidépresseurs est souvent indispensable », précise Stéphany Orain-Pelissolo, psychologue(1). « Plus la dépression est sévère, plus les antidépresseurs sont efficaces, confirme le Dr Patrick Lemoine, psychiatre(2). Mais si le médecin diagnostique une grosse déprime ou une dépression légère à modérée, il est tout à fait possible et souhaitable de se tourner vers certains traitements non médicamenteux très performants et avec peu d’effets secondaires. »
Se (re)mettre en mouvement
Pas facile de se motiver à bouger quand on se sent au fond du trou. Pourtant, il en faut peu pour être plus heureux : six minutes d’une activité physique qui fait grimper le rythme cardiaque de 30 % stimulent déjà la production de toute une panoplie d’hormones du bonheur (endorphines, adrénaline, dopamine…). Et faire de l’exercice régulièrement est quasi miraculeux pour notre humeur. Selon la Haute Autorité de Santé (HAS), suivre un programme qui mixe endurance et renforcement musculaire pendant trois mois est aussi efficace qu’un traitement médicamenteux ou une psychothérapie pour réduire les symptômes d’une dépression légère ou modérée et prévenir les récidives(3). En plus, pas besoin de se faire mal pour se faire du bien, car la pratique régulière d’activités douces comme la marche, le yoga ou le qi gong suffit à rebooster l’humeur. Le bon tempo : 30 minutes de marche à allure modérée (ou autre activité cardio) par jour, et 2 à 3 séances de renforcement de 30 minutes par semaine. Parallèlement, on limite le temps assis ou allongé : pas plus de 7 heures en journée, en veillant à se lever au moins une fois par heure. Des recherches menées à l’université de l’Iowa ont lié diminution de la sédentarité pendant quelques semaines et meilleure santé mentale.
Se lancer dans une psychothérapie
« Plusieurs études ont montré que suivre huit séances de thérapie comportementale et cognitive amène une amélioration significative de l’humeur », explique Stéphany Orain-Pelissolo. On y apprend – avec l’aide du psy – à repérer les biais de perception induits par la dépression (je suis nul, je rate tout, personne ne m’aime…) afin de pouvoir les combattre et sortir de la spirale du tout négatif. « On travaille aussi sur le manque d’envie grâce à l’activation comportementale de l’humeur. C’est la philosophie just do it :
on demande au patient d’aller au cinéma, de voir des amis, de faire une séance de sport sans réfléchir, sans se demander s’il est motivé ou non. Ça permet de reprendre les choses en main, de relancer les neurotransmetteurs du plaisir et de rentrer à nouveau dans un cercle vertueux », complète la spécialiste. On peut trouver plus de renseignements sur cette méthode sur le site aftcc.org. Autre option intéressante, les programmes de thérapie cognitive basée sur la pleine conscience (MBCT), qui ont démontré leur capacité à soigner les dépressions légères et, surtout, à prévenir les récidives. D’une durée de huit semaines, ils permettent de s’entraîner à cultiver l’attention au présent, à observer les liens corps et esprit, et à distinguer pensées et faits afin d’accueillir plus sereinement les émotions indésirables. Pour trouver une session en physique ou en ligne : association-mindfulness.org.
Réviser le contenu de son assiette
Pour rendre notre cerveau heureux, rien de tel qu’une alimentation variée et équilibrée. A contrario, mal manger nuit à l’humeur. Gare, par exemple, aux gâteaux, chocolats, glaces, etc. qui apportent du réconfort sur le moment mais entraînent une variation rapide de la glycémie et rendent irritable et triste dans les heures qui suivent. Attention aussi à l’alcool, faussement euphorisant, et qui perturbe la production de neurotransmetteurs, ainsi qu’aux aliments ultratransformés : une étude américaine sur 10 000 personnes a montré que ceux qui consommaient le plus de plats préparés, de charcuteries et de viennoiseries industrielles étaient plus enclins à souffrir d’anxiété et de dépression. La diète qui fait du bien à notre humeur ? Une à deux portions par semaine de poissons gras (sardines, maquereaux, harengs, saumons…), sources d’oméga 3, qui protègent les neurones et facilitent la transmission des messagers chimiques. Et un max de fruits, légumes, céréales complètes et légumineuses pour régaler notre microbiote intestinal. En cas de déprime, la composition de ce dernier se modifie avec, à la clé, une inflammation au niveau local qui se propage jusqu’au cerveau, car les deux organes communiquent en permanence. D’où l’idée qu’il serait possible de soigner le blues à coups de probiotiques, ces bactéries bénéfiques à la santé de l’intestin. « C’est très prometteur, mais, pour l’instant, les recherches sont en cours afin de déterminer quelle souche est intéressante et à quel dosage », nuance le Dr Alexis Bourla, psychiatre à l’hôpital Saint-Antoine. En attendant, on n’hésite pas à mettre au menu oignons, ail, poireaux, artichauts, salsifis, bananes et autres aliments riches en prébiotiques, garants d’une bonne santé de la flore intestinale.
Miser sur les bons micronutriments
On a beau mieux manger, notre humeur reste vacillante? On passe à la vitesse supérieure en augmentant les doses de micronutriments bons pour le moral. À commencer par la vitamine D, difficile à trouver dans notre alimentation, mais qu’il est possible de consommer sous forme de compléments alimentaires. Plusieurs études ont mis en relation taux de vitamine D trop bas et risque accru de dépression. Et une méta-analyse parue il y a quelques mois a démontré qu’une supplémentation en vitamine D, à raison de 2000 UI par jour, atténue les symptômes dépressifs (4). « Il est également bien établi que les oméga 3 ont un effet protecteur contre la dépression et que se supplémenter à hauteur de 1000 mg/jour (dont 70 % d’EPA, un acide gras) lutte contre la maladie », précise le Dr Alexis Bourla, qui utilise également ces stratégies nutritionnelles lorsque les antidépresseurs sont peu efficaces. Patience : il faut compter un à deux mois avant de percevoir les premières améliorations. Intéressant également, le tryptophane, un acide aminé précurseur de la sérotonine, l’hormone de la bonne humeur, à raison d’au moins 500 mg par jour (en 2 prises), à prendre en association avec de la tyrosine, précurseur de la dopamine.