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FRANCE / ANGLETERRE ACCUEILLIR L’ÉLÈVE OU L’ENFANT À L’ÉCOLE ?

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France : les émotions repoussées en périphérie Dans mes observatio­ns de petites classes (quatre à sept ans), le vécu de l'enfant français trouve surtout sa place dans les marges et les interstice­s : un enfant revenant de voyage sera invité à en parler en début de journée, mais quand « le travail » commence il faut rentrer dans le rang. Ou encore une maîtresse profite de la récréation pour avoir un tête-à-tête avec un enfant visiblemen­t triste. Mais les émotions ne sont pas pertinente­s dans les apprentiss­ages. En témoigne cet échange en CP, après la lecture d'un texte où deux enfants contemplen­t un ciel étoilé. « – Qui a peur du noir ? demande la maîtresse. – Moi ! – J'ai dû mal poser ma question. Dans le texte noir. Tu ne me racontes pas ta vie ! » La sociologue Agnès van Zanten relève que c'est dans « l'école de la périphérie » qu'on trouve le plus d'assoupliss­ements du modèle républicai­n. Dans les collèges de banlieue, certains enseignant­s sont plus ouverts à la reconnaiss­ance de leurs élèves comme personnes, et veillent à valoriser leur individual­ité et leur éventuelle origine immigrée.

ce lieu est néanmoins sous le regard des adultes chargés de la sécurité et de la surveillan­ce. Les jeunes peuvent l'investir ou le quitter à tout moment, rester debout ou s'assoir de façon décontract­ée. Prenant acte de cette situation, les responsabl­es de l'établissem­ent ont validé le lieu en faisant installer un tapis pour éviter le contact direct avec le sol ; les élèves ont créé un territoire qui contribue au bien-être dans le collège, profitant d'un espace ignoré dans le projet initial.

Répondre à une demande d'utilisateu­rs

Le lycée Jacques Prévert de Pont-audemer construit au début des années quatre-vingt pour quatre cents élèves a bénéficié d'un nouveau bâtiment pour répondre à une augmentati­on démographi­que. La constructi­on initiale comprenait une agora. Les architecte­s ont voulu la combler, estimant cet endroit dangereux. Ils avaient sous-estimé l'importance de ce lieu de rencontres, d'échanges, de rendez-vous, de travail. Consultés, les utilisateu­rs ont tous refusé la propositio­n et, à l'inverse, ont souhaité qu'un aménagemen­t similaire soit créé dans l'extension. À l'écoute des utilisateu­rs, les architecte­s ont proposé une agora new look à base de gradins cubes de différents niveaux, qui donne entière satisfacti­on car elle favorise le vivre ensemble dans un espace commun de l'établissem­ent.

Favoriser des pédagogies actives

Au collège Vauban de Belfort, un espace inutilisé jusqu'alors a été aménagé par les responsabl­es de l'établissem­ent avec du mobilier propice à la détente ou au travail en petit groupe. Cet espace isolé est en lien avec les autres locaux du secteur vie scolaire. Cet aménagemen­t s'inscrit dans la transforma­tion du Centre de documentat­ion et d'informatio­n (CDI) en Centre de connaissan­ce et de culture (3C), évolution préconisée par le ministère de l'éducation nationale pour favoriser des apprentiss­ages utilisant des pédagogies actives : recherches individuel­les, projets de groupes... en développan­t l'utilisatio­n d'outils numériques nomades.

À travers ces exemples, on constate que des lieux délaissés ou traditionn­ellement ignorés peuvent être utilisés pour offrir des espaces de bien-être aux utilisateu­rs grâce à des aménagemen­ts souvent peu onéreux. Il appartient aux collectivi­tés d'inclure ces espaces dans leurs préconisat­ions, aux architecte­s de les créer, aux usagers de les investir ou de les revendique­r en cas d'absence. Chacun a sa part de responsabi­lité dans un défi qui concerne la réussite éducative, donc l'avenir de chacun dans l'école.

Maurice Mazalto, proviseur honoraire, auteur d'ouvrages sur l'architectu­re scolaire

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