LE CANADIEN, ROI DES JUMPS ET DU BÛCHERONNAGE MASSIF !
Pour être honnête, quand on voit la bête sur le parking, on n’est pas du tout pressé de se taper les 600 m de dénivelé positif sur piste qui mènent au départ de la descente de ce premier run.
C’est vrai que le Range ressemble davantage à un bike de DH endurisé qu’à un All Mountain bodybuildé… Ce qui laisse dubitatif quant à ces capacités de grimpeur. En selle, la position est des plus agréables. L’angle de selle n’est pas parmi les plus droits du marché, mais l’est suffisamment pour offrir une position de montée efficace. Et finalement, dès que l’on prend la piste de montée on est rassuré, le Norco n’est pas du tout désagréable au pédalage. Il y a bien une légère oscillation de la suspension, qui cesse dès que l’on utilise la position Firm de l’amortisseur. En termes de vitesse d’ascension, il ne rivalise pas avec les meilleurs enduros mais il est loin d’être ridicule, on s’attendait à beaucoup moins bien compte tenu de son ADN. Pour donner un ordre d’idée, on mettait 10 minutes de plus (pour une heure d’ascension) qu’avec les meilleurs pour rejoindre le sommet, mais à peine 5 minutes de plus que la moyenne des chronos. Une prestation loin d’être catastrophique, d’autant plus que le vélo n’est pas du tout épuisant à emmener. Et de toute façon, il n’a pas été conçu pour faire de la balade, plutôt pour claquer des temps en descente sans vous ruiner physiquement en liaison. Et sur ce dernier point, c’est mission accomplie. En montée technique, la motricité est très bonne et les capacités en franchissement intéressantes, mais dans les épingles bien fermées le range est encombrant et pêche un peu en termes de maniabilité. D’autre part, il manque de nervosité pour sortir des passages les plus difficiles et son rendement s’écroule un peu face à la concurrence quand la pente s’énerve. On le préfère nettement dans les montées progressives sur piste, qui ne demandent pas de fournir de grosses accélérations. La première descente choisie est rapide et bien cassante, elle passe à travers des dalles et des rochers bien ancrés dans le sol, mais pas toujours bien agencés… Quelques rares épingles fermées jalonnent le parcours, mais on trouve surtout de beaux virages ronds, avec un sol tantôt extra, tantôt fuyant. Sans surprise, le Range est un véritable un avion de chasse dans les longs bouts droits cassants où l’on peut lâcher complètement les freins. Le bike est sur des rails, il se montre hyper rigoureux et vraiment très sécurisant. Il file droit sans perdre un iota de vitesse, c’est diablement efficace ! L’arrière encaisse les impacts sans broncher, la suspension durcit assez vite sur sa course et travaille assez haut : en conséquence, le Norco s’affaisse peu sur les impacts et ne se tanque pas dans le relief. Le côté rassurant s’estompe quelque peu au freinage, où le vélo s’avère bien physique à tenir lorsque le terrain est chaotique (un effet déjà ressenti lors du test de l’aurum il y a deux ans). Le passage du point de pivot haut au point de pivot virtuel haut est censé libérer la suspension au freinage. En effet, cela a pour effet de baisser le niveau d’anti-rise et s’il y a bien du mieux sur le terrain, ça reste exigeant physiquement. Le Range gigote un peu de l’arrière quand le terrain est truffé de pierres et de racines : il a des réactions vives qui malmènent un peu le pilote, il faut bien le tenir et cela devient éprouvant pour les bras et les jambes. Il faut dire que le châssis ne fait pas dans la dentelle, il est vraiment très rigide. On le
ON PEUT RATER SES SAUTS, POSER AUX MAUVAIS ENDROITS, AUCUN SOUCI. RENTRER COMME UNE BRUTE DANS LES VIRAGES, AUCUN SOUCI. MAIS NE COMPTEZ PAS SUR LE RANGE POUR VOUS FACILITER LA TÂCHE SUR DES TERRAINS TRÈS DIFFICILES.
ressent aussi dans les enfilades de virolos où le Norco demande à être brusqué, il faut engager constamment. À basse vitesse il n’est pas non plus très fun dans les zones sinueuses, son truc à lui c’est vraiment le speed. Un tempérament qu’il a confirmé par la suite, notamment sur des trails enduros techniques comme aux Seiglières. Rien à redire quant à l’efficacité pure : tant que l’on est en mode attaque le couteau entre les dents le Range envoie sacrément du bois, il permet de rouler très fort et très vite. Il est notamment excellent sur des parcours avec de grosses compressions qui ont tendance à casser la vitesse car il ne s’y tasse pas et conserve une vitesse supérieure à la moyenne. C’est flagrant comme ce bike reste dynamique dans ces phases. Même constat dans les gros virages relevés, si on rentre dans l’appui avec une agressivité digne de le faire reculer de deux mètres, on en ressort comme une balle. Le bike ne se comprime pas outre mesure et ressort aussi vite qu’il est entré. Grisant. En revanche, quand il faut traverser un pierrier mal agencé ça se gâte. Le cadre ne se déforme pas d’un pouce et on est malmené, même si les suspensions font très bien le job. Il faut vraiment s’employer physiquement pour garder le cap. En fait, il y a deux façons pour un bike d’être inconfortable, mais une seule impacte les pilotes moins chevronnés. Soit les suspensions talonnent trop fréquemment et le rider se fait autant malmener que le vélo souffre, soit le bike est hyper gaillard et dit sans cesse « même pas mal » dans les pires situations, en faisant souffrir le pilote. Le Norco est dans la deuxième catégorie. On peut rater ses sauts, poser aux mauvais endroits, aucun souci. Rentrer comme une brute dans les virages, aucun souci. Mais ne comptez pas sur le Range pour vous faciliter la tâche sur des terrains très difficiles. À son guidon, on s’est régalé sur des pistes techniques que l’on connaissait, dans de bonnes conditions. On pouvait attaquer franchement et profiter pleinement de son côté gaillard, notamment en saut où sa rigueur en réception est bluffante. On ne talonne jamais, on se jette sur les plus gros jumps sans aucune appréhension, c’est impressionnant pour un bike d’enduro. En revanche, on a eu plus de mal pour rouler vite sur des sentiers de montagne pris à vue et où on cherchait davantage à cruiser. Dès que l’on ne tend pas forcément à attaquer dur, le vélo se montre plus exigeant que la moyenne et plus physique à (bien) exploiter. C’est une arme de destruction plutôt destinée à des pilotes expérimentés, d’autant plus si l’adhérence est précaire : là il faudra un vraiment un gros bagage technique pour exploiter correctement un tel châssis du fait d’une tolérance toute relative.