Une carte pour tout savoir (ou presque) sur l’Antarctique
Protégé de l’activité humaine depuis 1959, l’Antarctique reste une terre relativement vierge et mal connue, d’où le grand intérêt des scientifiques, seuls autorisés à « habiter » sur le continent blanc. Pour faciliter leur travail, quoi de mieux qu’une carte ?! Le document le plus précis jamais publié est disponible depuis septembre 2018.
Des centaines de milliers d’images satellites prises entre 2009 et 2017 ont permis de créer le projet cartographique « REMA », pour Reference Elevation Model of Antarctica en anglais. Comme son nom l’indique, c’est une carte topographique très détaillée en haute résolution contenant un grand nombre de données, réalisée par des équipes de l’université d’État de l’Ohio et de l’université du Minnesota, aux États-Unis, qui se réjouissent du résultat, étant donné que jusqu’à présent, même Mars était mieux connue. D’une résolution de 2 à 8 mètres, contre 1 000 habituellement, le document offre un nombre important de détails sur l’élévation de chaque point de l’Antarctique, permettant aux chercheurs sur place de mieux préparer leurs expéditions dans des contextes géographiques et climatiques hostiles – les températures descendent jusqu’à -90°C, il ne pleut jamais, la glace occupe 30 millions de kilomètres carrés… On peut ainsi voir, par exemple, les variations de la neige, l’éclaircissement des glaciers, l’activité des rivières et des volcans. Pour les chercheurs, cette carte est un bel outil d’analyse des changements climatiques sur la planète, car l’Antarctique est l’un des premiers lieux touchés, et l’on pourra observer son évolution. Ce territoire a toujours fasciné les géographes et cartographes, même si son environnement hostile n’a pas intéressé les aventures coloniales. On trouve ainsi des représentations anciennes du XVIe siècle, alors qu’on ne savait rien de la région. Puis les grandes expéditions du XVIIIe se lancent à la conquête du pôle Sud, le Britannique James Cook (1728-1779) traversant le cercle polaire en janvier 1773, sans même avoir de carte. Mais l’espace austral est « découvert » en février 1819 par le Britannique William Smith (1790-1847) en accostant sur les îles Shetland du Sud, ouvrant ainsi la voie à d’autres navigateurs, dont le Russe Fabian von Bellingshausen (1778-1852), qui voit l’Antarctique en janvier de l’année suivante. Au XIXe siècle, les premières expéditions sur le terrain permettent de dresser des cartes, principalement marines, avec le dessin des côtes. Les hommes sont alors surtout intéressés par la chasse. Depuis, les traversées apportent des informations supplémentaires quant à la sismologie et à la gravimétrie de l’Antarctique. L’avenir du territoire est scellé en 1959 avec le traité signé à Washington, lui offrant le statut unique de réserve destinée à la science, aux actions pacifiques (toute présence militaire est interdite), à l’observation et la préservation de la biodiversité. Une quinzaine de pays, dont la France, y entretiennent des bases. Si l’Antarctique n’est pas la destination touristique de premier choix – quelque 35000 personnes par an y vont–, elle est à présent la région de la planète de la mieux cartographiée. Les données du projet « REMA » sont consultables sur www.pgc.umn.edu/data/rema/.