France : les fictions ont le vent en poupe
Les séries télévisées françaises se portent bien. Après un premier boom en 2005-2006, en particulier grâce à la chaîne Canal+, elles connaissent une progression constante depuis quelques années, notamment à l’export. Des fictions, telles que Le Bureau des légendes ou Plan coeur, sortie en décembre 2018, ont fait entrer la France dans la cour des grands, rivalisant même avec les Américains.
En 2017, deux grands festivals de séries apparaissent en France : Séries Mania en mars à Lille et CanneSéries en avril à Cannes ; le premier est soutenu par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) et le ministère de la Culture qui voulaient doter le pays d’un événement à la hauteur de l’importance que cette nouvelle forme audiovisuelle revêt dans le paysage médiatique international (1). Si le monde de la série est encore largement dominé par les productions américaines, les lignes bougent. En 2013, dans le « top 100 » des meilleures audiences en France, il y avait 12 séries, dont sept anglosaxonnes ; en 2016, il n’y en a plus que huit, mais sept françaises. Les pays européens ont ainsi réussi à se mettre à niveau en matière de popularité (parfois de qualité) à défaut de pouvoir rivaliser en quantité. Et si les séries perdent un peu de terrain en audience, c’est surtout dû à des habitudes de consommation. L’arrivée des séries Le Bureau des légendes en 2015 sur Canal+ et Marseille en 2016, la première produite par Netflix, le géant américain de la vidéo sur demande, marquent le début d’un nouveau « boom », avec la présence d’acteurs reconnus internationalement, tels que Mathieu Kassovitz dans le premier cas et Gérard Depardieu dans le second. Les ventes de produits audiovisuels français s’accélèrent avec + 6,8% (164,2 millions d’euros) en 2015, parmi lesquels la fiction (séries, téléfilms) représente 25,1%, soit 41,2 millions d’euros ; la majorité de ces ventes se fait en Europe de l’Ouest (49,8% en 2017), selon les données officielles du CNC. En 2017, la hausse continue pour le secteur de la fiction avec 63,7 millions d’euros (+ 27,8 % par rapport à 2016) ; l’audiovisuel français atteint un record de vente en dépassant la barre des 200 millions d’euros (205,2). Sur le marché français, les fictions ont réalisé 88 des meilleures audiences de l’année 2017. Si l’Europe de l’Ouest reste le plus gros acheteur de fictions françaises, sa part diminue, passant de 71 % en 2008 à 55,7 % en 2017, soit 35,5 millions d’euros, car le marché d’Amérique du Nord est en forte progression (12,5 % en 2017 contre 6,2% en 2008) et devient le troisième territoire d’exportation de la fiction française. C’est l’Europe germanophone (Allemagne, Autriche) qui représente la plus grande part (10 millions), mais l’Europe du Sud est en progression, tout comme l’Europe centrale et orientale, où les ventes ont triplé. Le marché asiatique est également en hausse, contrairement au marché africain, qui chute de 39,1 %. En effet, si l’on constate une légère hausse en Afrique anglophone, l’Afrique francophone boude la fiction française. En 2018, toutes les chaînes dynamisent ce secteur avec de plus en plus de moyens. Après Amazon et Netflix, un autre géant américain, Apple, est intéressé par la production de séries en France. Une effervescence qui ne pourra que profiter à l’étranger.
NOTE
(1) F. Fattori et J. Grandin, Dossier « Géopolitique des séries télévisées : Paix et guerre sur petit écran », in Carto no 33, p. 12-23, janvier-février 2016.