Brasilia : la banalisation capitale de 60 ans
Le 21 avril 1960, le Brésil inaugurait sa nouvelle capitale politique, recentrant géographiquement un pays concentré sur la côte atlantique. Bâtie au milieu des savanes alors quasi inhabitées du plateau central brésilien, Brasilia compte 3,01 millions d’habitants en 2019 ; 4,62 millions si l’on intègre l’agglomération. Le revenu mensuel par habitant y est de près de deux fois la moyenne nationale, dépassant même le riche État de São Paulo
ans le projet des fondateurs, Brasilia devait être exemplaire à tout point de vue : une ville au fonctionnement logique et fluide, un modèle de fraternité entre ses habitants, riches et pauvres. Mais il s’est produit une banalisation de la ville, sans doute parce que celle qu’ils ont conçue n’est plus qu’une partie d’une métropole. Brasilia ne se résume plus de nos jours au « plan pilote » de l’architecte Oscar Niemeyer (1907-2012) et de l’urbaniste Lúcio Costa (19021998) ; elle est entourée d’une vingtaine de « villes satellites » qui ont grandi plus vite qu’elle, et dans cet ensemble composite apparaissent des clivages et des évolutions contrastées.
EXPANSION URBAINE
Brasilia change d’échelle. Son espace fonctionnel réel est le District fédéral, sous juridiction directe de l’État fédéral, et ses alentours (entorno). Or ces derniers deviennent l’exutoire des courants migratoires qui y mènent une population provenant en majorité du Goiás voisin, mais aussi de tout le pays. De nombreuses petites villes y sont en formation, se construisant le long des voies de communication, ce qui explique le caractère discontinu de cette périphérie, calquée sur la géométrie du réseau de transport. La métropole en formation, contrairement à la ville planifiée qui a été son point de départ, est désormais un territoire fragmenté, marqué par des oppositions de plus en plus fortes entre quartiers riches et pauvres. Alors que le plan initial visait à faire justement cohabiter riches et pauvres dans un ensemble harmonieux et planifié, la réalité actuelle révèle une différenciation accentuée entre les quartiers, qui ont des évolutions différentes.