LA DIASPORA INDIENNE
Ancienne, la diaspora indienne fut longtemps ignorée par les autorités. New Delhi cherche à présent à en faire un réseau d’influence. C’est ainsi qu’en 2018 l’Inde estime à 31,2 millions les « Overseas Citizen of India », composés des « Non-Resident Indians » et des « Persons of Indian Origin ». Au-delà de cette classification, la redécouverte et la fabrique d’une diaspora par un gouvernement ultranationaliste hindou (BJP) renseignent sur les enjeux géopolitiques et géoéconomiques qu’elle peut représenter. Organisée en cercles concentriques (océan Indien, Empire britannique, globalisation actuelle), sa géographie est un palimpseste des mondialisations du sous-continent.
couverture universelle de santé reste l’un des objectifs de développement du siècle qui s’ouvre. De même, l’accès à l’éducation demeure inégal malgré les progrès réalisés ces dernières décennies. Si 80 % des enfants des Suds sont scolarisés en primaire, une partie des jeunes actifs arrivant sur les marchés du travail demeurent sous-formés et sous-qualifiés ; un gâchis humain qui entrave le développement. Le monde compte plus de 770 millions d’analphabètes, dont 200 millions en Afrique. En 2019, le taux d’alphabétisation des femmes, souvent les premières victimes de ces discriminations et injustices, est de 93% en Afrique du Sud, mais tombe à 50% au Nigeria et s’effondre à 24 % en Centrafrique et à 11 % au Niger. Dans de nombreux pays, le gradient des inégalités de développement se décline aux échelles régionales et locales, soulignant l’étendue des espaces marginaux dans les marges du système mondial. Si les migrations internationales sont une permanence des différentes mondialisations, le système migratoire contemporain se caractérise par son ampleur (250 millions de personnes, 3,4 % de la population mondiale, et 25 millions à 40 millions d’illégaux), son dynamisme, sa diversité et sa généralisation à l’ensemble de la planète dans une architecture de plus en plus polynucléaire. Largement contrainte, cette mobilité liée au travail et à l’emploi reflète les hiérarchies de l’espace mondial entre espaces attractifs (Amérique du Nord, Europe occidentale, golfe Persique) et répulsifs. Limités jusqu’en 1995, ces flux explosent depuis en incorporant de nouveaux territoires (Asie centrale et orientale, Europe de l’Est, Afrique centrale). En vingtcinq ans, les transferts financiers des migrants ont été multipliés par sept (706 milliards de dollars en 2019) ; aux flux Nords-Nords (24 %) et Nords-Suds (37 %) s’ajoutent les Suds-Suds (34%). Leurs volumes sont considérables dans des pays comme l’Inde (82 milliards), la Chine (70 milliards), le Mexique (38,6 milliards) ou les Philippines (35 milliards). Mais leur influence est importante dans les petits pays comme Haïti (38% du PIB), le Tadjikistan, le Népal et le Kirghizstan (30 %), le Honduras (22 %) ou les Comores (20%). Mettant en jeu des flux multiformes (personnes, informations, biens, culture) dans le cadre de circulations formelles ou informelles entre espaces interconnectés, ces mobilités contribuent à transformer économies, sociétés et territoires. Quant aux diasporas, elles sont anciennes, par leurs réseaux et leurs communautés, se révélant de puissants vecteurs de la mondialisation. Si elles furent longtemps ignorées ou méprisées par les autorités, la Chine et l’Inde notamment cherchent à en faire des réseaux d’influence.
UN MONDE SOUS TENSION
L’actualité témoigne d’un monde aux aspects désordonnés et instables, voire
chaotiques. Derrière les apparences, celui-ci demeure cependant intelligible et les grands foyers de crise sont identifiables. Ils s’inscrivent dans une architecture mondiale structurée par des dynamiques démographiques, sociales, géoéconomiques et géopolitiques qui, parfois, déstabilisent les constructions étatiques et nationales. Face à la stabilité des pays occidentaux, le reste du monde présente des échelles de risques d’une infinie variété. De même, des organismes se sont spécialisés dans l’étude des conflits. Ainsi, l’Institut Heidelberg (Allemagne) comptabilise 358 conflits dans le monde en 2019, dont 196 classés comme « violents » et 38 identifiés comme des guerres, civiles ou internationalisées (Syrie, Afghanistan, Yémen, Libye, Ukraine…). Le système international fonctionne comme un mille-feuille géostratégique. Il juxtapose des conflits d’origine, de nature et de qualité différentes : conflits asymétriques ou de basse intensité, guerres civiles… Ceux-ci fonctionnent de plus dans des échelles spatiales emboîtées et en interaction entre des enjeux qui peuvent être locaux, régionaux, nationaux et internationaux.
L’Asie, l’Afrique et le Proche et MoyenOrient se caractérisent en particulier par des niveaux d’enchevêtrement des dynamiques de conflictualité tels que leur résolution en devient problématique. D’autant que, concomitamment, le terrorisme (sabotages, attentats, assassinats, enlèvements, prise d’otages) prend depuis les années 1990 une ampleur nouvelle, en particulier avec l’apparition de mouvements transnationaux d’inspiration islamiste radicale qui instrumentalisent la religion au profit d’objectifs politiques. Les conflits débouchent sur une explosion du nombre de déplacés et de réfugiés dans le monde. Il est évalué à 79,5 millions de personnes en 2019, selon l’ONU. On peut ainsi identifier des « points chauds » : aux conflits internes (Colombie, Nigeria, par exemple), parfois internationalisés du fait de l’ingérence des puissances régionales (Yémen), répondent les grands conflits internationaux (Syrie). Un aspect conflictuel des relations internationales souvent négligé est le contrôle des mers. On recense environ 80 litiges frontaliers entre États. Si les parties en conflit sont d’accord, ils sont jugés