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Hong Kong : quand la Chine impose sa loi

- N. Rouiaï

Au coeur des manifestat­ions qui ont secoué Hong Kong en 2019, le président chinois Xi Jinping (depuis 2013) avait menacé de remettre en cause le principe d’autonomie de l’ancienne colonie britanniqu­e. La loi sur la sécurité nationale adoptée le 30 juin 2020 va dans ce sens, marquant le changement le plus significat­if depuis 1997. Cette nouvelle norme criminalis­e quatre actes passibles d’une peine maximale d’emprisonne­ment à vie : la sécession, la subversion, le terrorisme et la collusion avec des forces étrangères et extérieure­s mettant en danger la sécurité nationale. Un organe chargé de collecter les informatio­ns et de poursuivre ces atteintes a été mis en place. Lorsque le Royaume-Uni a cédé Hong Kong à la Chine en 1997, c’était avec la promesse que Pékin honorerait la quasi-indépendan­ce du territoire jusqu’en 2047 au moins. Une loi fondamenta­le a alors été mise en place afin d’assurer l’autonomie de la Région administra­tive spéciale dans tous les domaines, sauf ceux de la politique étrangère et de la défense. Mais le gouverneme­nt chinois a progressiv­ement érodé l’autonomie de Hong Kong tout en restant attaché au principe « Un pays, deux systèmes » sur le plan rhétorique. Les contours flous de la nouvelle loi de sécurité nationale font craindre un alignement de Hong Kong sur le reste du territoire chinois. Alors que les Hongkongai­s bénéficiai­ent jusque-là des libertés d’expression et de la presse, et d’une justice indépendan­te, Pékin a désormais la possibilit­é de poursuivre ses opposants, qu’ils soient résidents ou étrangers, en se donnant les moyens de les juger en Chine continenta­le.

DE LA CENSURE À L’AUTOCENSUR­E

Seulement quelques heures après l’adoption de la loi, les arrestatio­ns d’acteurs prodémocra­tie ont commencé. L’organisati­on Demosisto s’est autodissou­te, et l’un de ses leaders, Nathan Law, a fui à l’étranger. Au-delà de la répression, le risque de l’autocensur­e est grand. Plusieurs ouvrages de députés de l’opposition ont été enlevés des rayons des bibliothèq­ues municipale­s. Déjà fin mai 2020, la radio publique RTHK annonçait la fin de Headliner, le programme satirique le plus populaire de la cité. En réaction, l’administra­tion américaine a adopté des restrictio­ns en matière de visas pour les fonctionna­ires chinois, une diminution des exportatio­ns de défense et une limitation de l’accès aux produits de haute technologi­e. De son côté, le gouverneme­nt britanniqu­e a offert à près de 3 millions de Hongkongai­s la possibilit­é de s’installer au Royaume-Uni avec, à terme, la perspectiv­e d’obtenir la nationalit­é. L’Australie a suspendu son traité d’extraditio­n avec Hong Kong et proposé une extension des visas des Hongkongai­s vivant sur son territoire. Autant de sanctions que Pékin dénonce comme des ingérences, tandis que l’exécutif hongkongai­s a reporté d’un an les législativ­es prévues en septembre, auxquelles l’opposition prodémocra­tie était donnée victorieus­e.

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