Hainan : la nouvelle base sous-marine nucléaire chinoise
Au sud de la Chine, l’île d’Hainan est surtout connue pour la station touristique de Sanya. Pourtant, juste à côté, se trouvent deux grandes bases navales, l’une conventionnelle et l’autre nucléaire. Elles symbolisent l’essor maritime et naval de la puissance chinoise en ce début de XXIe siècle.
L’image couvre un espace littoral dominé au nord par des hauteurs moyennes, pour partie boisées. Au contact de la mer, le site alterne grandes baies ourlées de longues plages de sable et caps rocheux, s’avançant plus ou moins dans la mer et parfois très découpés comme au centre de la vue. Il est différent de la côte nord de l’île, plus basse, moins accidentée et ourlée d’une large guirlande de coraux, ici beaucoup plus rares. Nous sommes dans le sud d’Hainan, une île située à l’extrémité méridionale de l’immense Chine. Longtemps isolée et marginale, l’île a connu à partir des années 1990 une métamorphose, l’une touristique, l’autre géostratégique. Le tourisme joue certes un rôle important, comme l’illustre la création d’une conurbation littorale méridionale autour de la station de Sanya. Mais là n’est pas l’essentiel. Bastion insulaire sur le tropique du Cancer à plus de 2500 kilomètres de Pékin, Hainan est un avant-poste géostratégique en mer de Chine méridionale. Elle accueille depuis 2016 la base de Wenchang, qui va porter l’aventure spatiale dans les décennies à venir. Surtout, deux bases militaires navales de première importance témoignent de la reconfiguration des grands équilibres géostratégiques en Asie et dans l’océan Pacifique.
LES BASES NAVALES DE YULIN ET DE YALONG
À l’est de Sanya, les longues plages font place à un vaste promontoire tombant dans la mer. Trois caps encadrent deux baies naturellement abritées. Ce site exceptionnel est utilisé par la marine chinoise pour construire deux bases navales, car les marins sont souvent d’éminents géographes de terrain. À l’ouest, la baie de Yulin est fermée par trois grandes digues ; elle abrite une base navale conventionnelle qui se réfugie dans un étroit estuaire. À l’est, la baie de Yalong est barrée par des digues s’appuyant sur deux îlots. Deux jetées sont visibles ; elles accueillent souvent les porte-avions et leur groupe naval lors de leurs patrouilles en mer de Chine méridionale. On remarque aussi quatre pontons proches de tunnels creusés dans la roche sous la colline pour mettre sous-marins et armements à l’abri. C’est la base de Yalong, achevée en 2008. Elle héberge les sous-marins nucléaires stratégiques chinois de classe Jin dotés de missiles balistiques JL-2, de plus de 7 200 kilomètres de portée. Yalong est la plus grande base sousmarine de Chine et d’Asie, avec une capacité d’une vingtaine d’unités. Son existence rappelle que la République populaire dispose d’une soixantaine de sous-marins, dont une cinquantaine d’attaque à propulsion classique diesel-électrique de qualité bien inégale. Mais les autres sont à propulsion nucléaire, qui assure une autonomie, une discrétion et des capacités de projection meilleures.
CONFLITS FRONTALIERS EN MER DE CHINE MÉRIDIONALE
Selon les analystes américains, la Chine devrait passer de 4 à 8 sous-marins lanceurs d’engins et avoir une dizaine de sous-marins nucléaires d’attaque entre 2020 et 2030. Un cauchemar pour les stratèges de l’US Navy. La mer de Chine méridionale – plus globalement l’Asie de l’Est et du Sud-Est – est devenue l’un des cadres maritimes privilégiés de la compétition géostratégique, géopolitique et géoéconomique entre la première et la deuxième puissance mondiale. Mais comme en témoignent ces deux bases et l’effort chinois dans l’armement naval, les États-Unis ont perdu le monopole de