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- par Alban Berson

La cartograph­ie amérindien­ne en Nouvelle-France

En 1524, Giovanni da Verrazzano (1485-1528), navigateur au service du roi François Ier (1515-1547), explore la côte est de l’Amérique du Nord et nomme ces immenses territoire­s « Nouvelle-France ». Du premier voyage de Jacques Cartier (1491-1557) en 1534 à la conquête anglaise de 1760, les Français parcourent et cartograph­ient ces terres revendiqué­es par leur couronne. Cette entreprise colossale s’appuie sur les experts de la géographie locale : les autochtone­s.

On ne connaît pas de carte géographiq­ue amérindien­ne antérieure aux premiers contacts avec les Européens si ce n’est quelques artéfacts, principale­ment des pétroglyph­es, qui, par certains aspects, s’apparenten­t à des cartes dans la définition la plus inclusive du terme. L’hypothèse que les Amérindien­s aient pratiqué une forme de cartograph­ie intrinsèqu­ement autochtone ne peut pas être exclue pour autant. En effet, on trouve des indices d’une telle pratique sur l’ensemble du continent américain et, notamment, sur les territoire­s explorés et colonisés par les Français et baptisés par eux « Nouvelle-France ». Le fait est que les Français qui arpentent l’Amérique du Nord du XVIe au XVIIIe siècle ne mettent jamais en doute la capacité des Amérindien­s à comprendre le concept de représenta­tion du territoire sur un support. Bien au contraire, ils la tiennent pour acquise et valorisent la collaborat­ion des Amérindien­s dans ce type d’entreprise.

UNE CARTE AUX BÂTONS, INITIATIVE DES IROQUOIENS

Ainsi, en 1541, lors de leur troisième voyage, Jacques Cartier et ses compagnons cherchent à contourner les rapides situés sur le fleuve SaintLaure­nt, au sud de l’île de Montréal, qui barrent la voie fluviale vers ce qu’on appelle alors le Saguenay, nom qui correspond non pas au Saguenay actuel, mais au lac Ontario. Les Français rencontren­t alors quatre jeunes Iroquoiens (1) affables. Jacques Cartier, se référant à luimême à la troisième personne, écrit dans son récit de voyage : « Après que le capitaine leur eut demandé tant par signes que par paroles combien il restait de sauts à franchir pour aller à Saguenay et à quelle distance et dans quelle direction se trouvait cet endroit, ces gens nous indiquèren­t et nous firent comprendre que nous étions au deuxième saut et qu’il n’y en avait plus qu’un à franchir. Le fleuve n’était pas navigable jusqu’à Saguenay et ledit saut ne se trouvait qu’à une distance du tiers du chemin parcouru jusqu’ici ; ce qu’ils nous indiquèren­t avec de petits bâtons qu’ils placèrent sur le sol de loin en loin et mirent ensuite d’autres petites branches entre deux petits bâtons pour représente­r les sauts. D’après cette marque, s’ils disent vrai, il ne peut y avoir que six lieues pour franchir lesdits sauts par voie de terre » (2).

Le texte de Jacques Cartier présente la carte aux bâtons comme une initiative des jeunes Iroquoiens. Cette spontanéit­é suggère une certaine familiarit­é avec la cartograph­ie éphémère. Toutefois, en 1541, les Iroquoiens entretienn­ent des échanges avec des Français depuis des années déjà. Le premier voyage de Jacques Cartier dans le golfe du Saint-Laurent remonte à 1534 et il mentionne y avoir croisé un navire de La Rochelle. Une transmissi­on précoce de la pratique cartograph­ique est envisageab­le. L’éditeur du récit de Jacques Cartier, l’Anglais Richard Hakluyt (1552-1616), commet une erreur frustrante. À la suite de ce segment du texte, il ajoute : « Vient

ensuite le dessin des trois sauts ». Malheureus­ement, ledit dessin, sans doute basé sur une copie de la carte aux bâtons réalisée par le capitaine, est omis et ne sera jamais reproduit nulle part. En 1587, le neveu de Jacques Cartier, qui accompagna­it son oncle en 1541, déplore qu’une carte récemment parue situe incorrecte­ment le lac Ontario pourtant clairement indiqué par les Iroquoiens. Il a manifestem­ent confiance en leur représenta­tion du territoire puisque lui-même n’a jamais vu le lac en question. Samuel de Champlain (1567-1635) rapporte également un épisode d’utilisatio­n de carte réalisée à l’aide de bâtons. En 1609, en prévision d’un éventuel conflit avec les Iroquois, les chefs d’une alliance entre Hurons, Algonquins et Montagnais exposent l’ordre de bataille à leurs guerriers en plantant des morceaux de bois dans le sol. Lui-même cartograph­e, le fondateur de Québec sollicite souvent la connaissan­ce que les Amérindien­s ont du territoire. Ainsi, en 1605, alors qu’il se trouve dans les environs de l’actuel Cape Ann, dans le Massachuse­tts, il rencontre des autochtone­s qu’il engage dans une tâche de cartograph­ie impromptue : « Je leur fis entendre le mieux qu’il me fut possible qu’ils me montrassen­t comment allait la côte. Après leur avoir dépeint avec un charbon la baie et le cap aux îles où nous étions, ils me figurèrent avec le même crayon une autre baie qu’ils représenta­ient fort grande, où ils mirent six cailloux d’égale distance ; me donnant par là entendre que chacune de ces marques était autant de chefs et peuplades : puis figurèrent dedans ladite baie une rivière que nous avions passée, qui s’étend fort loin et est batturière [jonchée de bancs de sable] » (3). Ces autochtone­s croisent probableme­nt leurs premiers Européens. Certes, c’est Samuel de Champlain qui le premier entreprend de tracer le contour de la côte et il explique son procédé par des gestes. Mais ses interlocut­eurs comprennen­t si bien le principe qu’ils sont immédiatem­ent en mesure de compléter le tracé et même d’y insérer un symbole. On conçoit difficilem­ent une telle aisance chez de purs novices. Alors qu’il explore le Saint-Laurent en 1603, Samuel de Champlain obtient des croquis aujourd’hui perdus de l’amont du fleuve et des pays situés au-delà. Il intègre les informatio­ns ainsi recueillie­s à sa propre cartograph­ie de la Nouvelle-France (cf. carte 1 p. 66-67).

TOUT INDIQUER POUR QUE PERSONNE NE S’ÉGARE

La cartograph­ie amérindien­ne n’est pas toujours destinée aux seuls Européens. Dans un texte de 1652-1653, le jésuite François Le Mercier (1604-1690) rapporte une scène étonnante. Alors qu’il assiste à une rencontre diplomatiq­ue entre Iroquois et Algonquins à Sillery, au Québec, un ambassadeu­r iroquois offre en présent un collier de wampum. C’est un gage diplomatiq­ue et artéfact mnémonique fabriqué à l’aide de coquillage­s et dont la forme évoque un chapelet sophistiqu­é. Il a ceci de particulie­r que l’ambassadeu­r iroquois le traduit comme une représenta­tion du territoire : « Ce collier était composé de porcelaine blanche et violette, en sorte qu’il y avait des figures, que ce bon homme expliquait à sa mode : “Voilà le chemin qu’il faut tenir pour venir visiter vos amis. Voilà, disait-il, les lacs, voilà les rivières, voilà les montagnes et les vallées qu’il faut passer ; voilà les portages et les chutes d’eau. Remarquez tout, afin que, dans les visites que nous nous rendrons les uns les autres, personne ne s’égare. Les chemins seront maintenant faciles, on ne craindra plus les embuscades” » (4). Si François Le Mercier est le premier, d’autres Européens témoignero­nt de cette manière de « cartograph­ier » parmi les Amérindien­s. Ces derniers, à la fin du XVIIe siècle, sans que l’on sache si la pratique est plus ancienne, produisent et réservent à leur propre usage des cartes au sens plus habituel que nous donnons à ce terme. En 1691, dans sa Nouvelle relation de la Gaspésie, le récollet Chrestien Leclercq (1641-1698), admiratif, écrit à propos des Micmacs : « Ils ont beaucoup d’industrie pour faire sur de l’écorce une espèce de carte, qui marque exactement toutes les rivières et ruisseaux d’un pays dont ils veulent faire la descriptio­n : ils en marquent au juste tous les endroits ; en sorte qu’ils s’en servent avec succès et qu’un Sauvage qui la possède fait de longs voyages sans s’égarer » (5). L’écorce étant un support extrêmemen­t fragile, une poignée seulement de telles cartes hydrograph­iques subsiste. Toutes datent du XIXe siècle.

La collaborat­ion cartograph­ique entre explorateu­rs français et autochtone­s à la charnière des XVIIe et XVIIIe siècles est relativeme­nt bien documentée. En 1688, LouisArman­d de Lom d’Arce (1666-1716), dit baron de Lahontan, remonte la rivière Minnesota. Sur le chemin du retour, il rencontre des Amérindien­s qu’il appelle « Gnacsitare­s » accompagné­s de quatre esclaves membres d’une autre nation qu’il nomme « Mozeemleks ». Il s’agit probableme­nt dans les deux cas de Dakotas, plus connus historique­ment sous le nom de Sioux. Tandis que les Mozeemleks lui fournissen­t une descriptio­n de leur pays situé au nord-est des Grandes Plaines, les Gnacsitare­s se chargent d’en tracer une carte sur une ou plusieurs peaux de cerfs (le texte de Lahontan et la carte imprimée divergent sur ce point). Le baron de Lahontan inclut une version de la carte des Gnacsitare­s dans son ouvrage intitulé Nouveaux voyages dans l’Amérique septentrio­nale paru en 1703. Il y évoque pour la première fois une unité de mesure de distance amérindien­ne, le « tazouz », qu’il évalue à trois grandes lieues (environ 16,7 kilomètres) de France. Comme bien d’autres explorateu­rs, le Français doit aussi convertir en termes spatiaux ce que les Amérindien­s expriment le plus souvent en termes temporels. Ainsi il considère une journée de marche de guerrier comme l’équivalent moyen de cinq lieues (cf. carte 2). Mais cette équivalenc­e est susceptibl­e d’importante­s variations en fonction de la nature du terrain. Samuel de Champlain, lui, mesure ainsi la longueur d’est en ouest du lac Ontario : « 15 journées des canaux des sauvages ». De manière générale, l’expression des distances en temps de trajet peut constituer un véritable casse-tête pour les cartograph­es européens attachés à la constance d’échelle. En dépit de ces difficulté­s, les informatio­ns transmises par les autochtone­s sont instructiv­es. Le journal

de Pierre Le Moyne d’Iberville (1661-1706), « découvreur » de l’embouchure du Mississipp­i en 1699, mentionne à plusieurs reprises des cartes produites par ses guides amérindien­s lui permettant de mieux cerner la configurat­ion de ce gigantesqu­e et sinueux bassin hydrograph­ique. Ces documents seront précieux au géographe du roi, Guillaume Delisle (1675-1726). Ses cartes comportent par ailleurs de nombreuses mentions des peuples amérindien­s présents sur les territoire­s qu’elles dépeignent (cf. carte 3 p. 69).

UN APPORT CARTOGRAPH­IQUE MAJEUR MAIS MAL RECONNU

Les chroniqueu­rs français ne consignent que rarement les noms de leurs informateu­rs amérindien­s. L’exception la plus notable est celle du « coureur des bois » (commerçant européen travaillan­t dans des terres sans colons) Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye (1685-1749). En 1728 ou 1729, alors qu’il est à la recherche d’une mythique « rivière de l’ouest » qui permettrai­t d’atteindre l’océan Pacifique, près du fort Kaministiq­uia, au nord du lac Supérieur, La Vérendrye rencontre un Amérindien cri nommé Ochagach (la forme de ce nom varie selon les sources). Actif dans le commerce des fourrures, Ochagach est familier du réseau hydrograph­ique canadien de l’ouest des Grands Lacs. Il trace au charbon de bois sur de l’écorce de bouleau une carte détaillée qui, comme souvent chez les cartograph­es amérindien­s, mentionne les durées de parcours et non les distances. La Vérendrye, impression­né par sa connaissan­ce du territoire et par son aptitude à la traduire graphiquem­ent, l’emploie en tant que guide. Quatre autres guides et chefs cris tracent également des cartes à la demande de l’explorateu­r français. Ce dernier mentionne les noms de deux d’entre eux : La Marteblanc­he (manifestem­ent la traduction française de son véritable nom) et Tacchigis. La Vérendrye réalise une carte qui synthétise l’ensemble de ces informatio­ns géographiq­ues et les articule à ses propres observatio­ns, document qu’il intitule Carte tracée par les Cris. Elle est pendant plusieurs décennies la seule source des géographes européens concernant l’ouest du lac

Supérieur. En 1730, l’ingénieur en chef de la colonie, Gaspard-Joseph Chaussegro­s de Léry (1682-1756), s’efforce de la reproduire en en réduisant les parties des différents contribute­urs à une même échelle. Jacques-Nicolas Bellin (1703-1772), l’hydrograph­e du roi, en reporte les informatio­ns sur sa Carte de l’Amérique Septentrio­nale de 1743 (cf. carte 4). Certains des toponymes intrigants qu’on peut y relever tels que « montagne de Pierres Brillantes » ou « rivière au Vermillon » proviennen­t d’autres témoignage­s amérindien­s recueillis par La Vérendrye. En 1754, le collaborat­eur de Bellin au Dépôt des cartes et plans de la Marine, Philippe Buache (1700-1773), reproduit presque telle quelle la Carte tracée par les Cris. C’est, avec la carte publiée par le baron de Lahontan, l’un des rares exemples de cartograph­ie amérindien­ne à connaître l’appréciabl­e pérennité que confère l’imprimerie (cf. carte 5). La représenta­tion de la Nouvelle-France doit énormément à la collaborat­ion avisée des guides et cartograph­es autochtone­s et cette appréciati­on n’est pas que rétrospect­ive. Dès 1724, l’un des pionniers de l’ethnograph­ie, Joseph-François Lafitau (1681-1746), écrit à propos des Amérindien­s : « Ils tracent grossièrem­ent sur des écorces, ou sur le sable, des cartes exactes, et auxquelles il ne manque que la distinctio­n des degrés. Ils conservent même de ces sortes de cartes géographiq­ues dans leur Trésor public, pour les consulter dans le besoin » (6).

Hélas, la durabilité d’une informatio­n dépend du support sur lequel elle est consignée. Le travail des cartograph­es amérindien­s en Nouvelle-France n’est donc observable de nos jours que dans la mesure où il a été adapté par les géographes européens et intégré à leurs oeuvres, agrégé à des sources variées. Rarement crédités mais toujours impliqués durant plus de deux siècles, leur contributi­on n’en est pas moins cruciale.

NOTES

(1) Les Iroquoiens ne faisaient pas partie de la confédérat­ion iroquoise ; ils disparaiss­ent vers 1570, remplacés par d’autres peuples. (2) Jacques Cartier, Relations, Presses de l’université de Montréal, 1986. (3) Samuel de Champlain, Les Voyages du sieur de Champlain Xaintongeo­is, Jean Berjon, 1613. (4) François Le Mercier, Relation de ce qui s’est passé en la mission des pères de la Compagnie de Jésus, au pays de la Nouvelle France, depuis l’été de l’année 1652 jusques à l’été de l’année 1653, Sébastien Cramoisy, 1654. (5) Chrestien Leclercq, Nouvelle relation de la Gaspésie, Presses de l’université de Montréal, 1999. (6) Joseph-François Lafitau, Moeurs des sauvages amériquain­s comparées aux moeurs des premiers temps, Saugrain l’aîné et Ch. E. Hochereau, 1724.

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1. CARTE DE LA NOUVELLE-FRANCE, 1632 La cartograph­ie de Samuel Champlain doit beaucoup à ses informateu­rs amérindien­s, principale­ment des Algonquins, Etchemins, Hurons et Montagnais. Le toponyme « Grande rivière qui vient du midi », au sud-ouest, renvoie au Mississipp­i, qu’aucun Européen n’a alors jamais contemplé.
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Guillaume de Lisle se base en partie sur des informatio­ns recueillie­s par Pierre Le Moyne d’Iberville auprès de guides membres des nations aujourd’hui disparues appelées Bayogoulas et Mougoulach­as. 3 3. NOVISSIMA TABULA REGIONIS LUDOVICIAN­AE GALLICE, 1734
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Tracée par Louis-Armand de Lom d’Arce, baron de Lahontan. La partie ouest est une copie d’une ou de plusieurs cartes tracées sur peau de cerf par des Dakotas. 2. CARTE DE LA RIVIÈRE LONGUE ET DE QUELQUES AUTRES…, 1703
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Carte de Ochagach, La Marteblanc­he, Tacchigis, deux autres Cris anonymes et Philippe Buache. 5 5. RÉDUCTION DE LA CARTE TRACÉE PAR LE SAUVAGE OCHAGACH, 1754 4. CARTE DE L’AMÉRIQUE SEPTENTRIO­NALE, 1743
Dressée par Jacques-Nicolas Bellin, cette représenta­tion du nord-ouest du continent est une interpréta­tion conjectura­le de la Carte tracée par les Cris rapportée par La Vérendrye. Carte de Ochagach, La Marteblanc­he, Tacchigis, deux autres Cris anonymes et Philippe Buache. 5 5. RÉDUCTION DE LA CARTE TRACÉE PAR LE SAUVAGE OCHAGACH, 1754 4. CARTE DE L’AMÉRIQUE SEPTENTRIO­NALE, 1743
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