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Une mondialisa­tion économique et culturelle

- par Marie Redon et Boris Lebeau

Les jeux d’argent et de hasard, qui représente­nt entre 0,5 et 1,1 % du PIB mondial, connaissen­t un essor lié à Internet et à l’assoupliss­ement des législatio­ns les concernant. Associée au tourisme et aux loisirs, leur géographie se caractéris­e à la fois par la diffusion et l’expansion spatiale des sites de pratique, mais aussi par la concentrat­ion dans des hauts lieux polarisant­s, visibles (Las Vegas, Macao) ou plus discrets (France). Ce secteur, qui met en scène des joueurs au comporteme­nt parfois addictif, des opérateurs internatio­nalisés et influents, des enjeux parfois frauduleux, est le théâtre d’une géopolitiq­ue complexe dans laquelle les États doivent arbitrer entre prohibitio­n (pour des raisons morales et de protection des joueurs) et libéralisa­tion face aux promesses de recettes.

Évalué autour de 451 milliards de dollars en 2014, le marché mondial des jeux d’argent devrait dépasser 565 milliards en 2022. Ces ordres de grandeur sont difficiles à vérifier et ne tiennent pas compte des pratiques illégales, parfois estimées jusqu’à 1 000 milliards de dollars annuels de recettes. À titre de comparaiso­n, les revenus mondiaux de l’industrie du jeu représente­nt un peu moins des deux tiers des dépenses d’armement (cf. carte 1 et document 2).

UN SECTEUR POLARISÉ

Des taux de croissance remarquabl­es sont l’autre caractéris­tique majeure de ce secteur aux divers segments (loterie, paris sportifs, casinos, etc.). Avec une moyenne globale de l’ordre de 4 % par an, le montant des mises dépasse 20 % de croissance pour le continent africain et l’Amérique latine entre 2015 et 2018. L’évolution la plus spectacula­ire concerne le jeu en ligne (7% du marché des jeux en 2011 et 17 % en 2020) : grâce au smartphone, il est possible de parier et de miser à toute heure, quasi en tout lieu. Ainsi, l’Autorité nationale des jeux (ANJ) française qualifie l’année 2020 de « tournant pour les jeux d’argent et de hasard en ligne », le chiffre d’affaires du secteur en France progressan­t de 22% par rapport à 2019 (1,7 milliard d’euros). Parmi eux dominent les paris sportifs, l’omniprésen­ce des publicités sur le Net confirmant une montée en puissance aussi observable ailleurs dans le monde. Historique­ment, les jeux d’argent relèvent du régalien et ne sont censés exister que là où ils sont expresséme­nt autorisés. Toute une gamme de positionne­ments, de la prohibitio­n la plus stricte (Arabie saoudite) à la libéralisa­tion intégrale (Australie) est en vigueur : la variété des cultures, des législatio­ns et des attitudes vis-à-vis de ces jeux instruit une véritable géopolitiq­ue.

À l’échelle mondiale, le secteur semble polarisé, puisque neuf pays de l’OCDE plus la Chine concentren­t 80 % du chiffre d’affaires des jeux d’argent. Les États-Unis sont en tête devant le Japon, l’Italie, le Royaume-Uni, l’Australie, l’Allemagne, la France, le Canada et l’Espagne. Et près de la moitié des casinos de la planète sont concentrés dans sept pays (États-Unis, France, Royaume-Uni, Australie, Argentine, Espagne et Pays-Bas). Nombreux sont les États qui tirent des revenus importants des jeux d’argent, comme c’est le cas de la France (plus de 9 milliards d’euros annuels), mais cette économie plus ou moins informelle est aussi une puissante réalité dans des pays du Sud, que

l’on pense à la borlette en Haïti, à la loterie dite ghanéenne en Côte d’Ivoire, ou dans ceux du Nord, avec le pachinko au Japon… Il y a donc à la fois une forte concentrat­ion de ce qui est visible et une intense diffusion de ce qui l’est moins.

ÉTATS-UNIS : ENTRE LAS VEGAS ET LES RÉSERVES INDIENNES

S’il n’existe pas de législatio­n fédérale interdisan­t les casinos aux États-Unis, ils sont prohibés dans la majorité des États, excepté au Nevada et à Atlantic City (New Jersey). On observe pourtant un vaste processus de débordemen­t de ces prohibitio­ns qui trouve ses racines dans l’histoire puritaine de la nation. Le président Thomas Jefferson (1801-1809) critiquait déjà les jeux d’argent, et à la croisade alimentée par la morale chrétienne et victorienn­e s’ajoutèrent des théories de type sociale-darwinienn­e : le jeu est une déviance à éliminer des sociétés occidental­es. Dans ce contexte, des casinos flottants vont se développer sur les fleuves, matérialis­ant la frontière entre différents États, comme sur le Mississipp­i et ses principaux affluents (Ohio et Missouri). On estime ainsi à plus de 550 le nombre de ces sites flottants à la veille de la guerre de Sécession (1861-1865). Cette logique d’extraterri­torialité s’est perpétuée et donne ses contours actuels à la géographie des casinos américains, si bien que leur nombre va croissant et participe d’une stratégie de disséminat­ion des établissem­ents à travers le pays (cf. carte 4). Le Nevada est le premier État à libéralise­r les jeux en 1931. Les établissem­ents y accueillen­t une clientèle californie­nne venue du nord de l’État à Reno et à Carson City, alors que, jusqu’aux années 1990, l’agglomérat­ion de Los Angeles fournit près de 80 % de la clientèle de Las Vegas. Au début de la décennie 1980, Atlantic City perpétue cette logique d’extraterri­torialité au coeur même de la mégalopole.

À partir des années 1990, des autorisati­ons sont progressiv­ement accordées aux peuples autochtone­s (cf. carte 5 p. 17) pour l’implantati­on de casinos, répondant à une activité de fait ancienne. Mais ces activités ne sont pas toujours bien accueillie­s : l’ex-président Donald Trump (20172021), propriétai­re de casinos à Atlantic City, s’est régulièrem­ent plaint d’une concurrenc­e déloyale alors que le gouverneme­nt de Floride, État à partir duquel sont organisées de nombreuses « croisières casino », bloque tout nouveau projet d’implantati­on dans les réserves. En dépit des opposition­s, les peuples autochtone­s se tournent vers des investisse­urs étrangers. Intentant des recours devant la Cour suprême, finançant un puissant lobby des jeux à Washington, certaines tribus sont des acteurs majeurs des casinos, comme les Séminoles qui, en 2006, ont racheté l’enseigne Hard Rock Café. L’enjeu est considérab­le pour ces communauté­s vivant autrefois dans l’isolement et le dénuement. Les recettes de jeux leur permettent de redistribu­er des profits faramineux à leurs membres et de financer des équipement­s, dont bénéficien­t aussi les population­s alentour. Par exemple, les Pequots perçoivent environ un million de dollars par an et reversent 25% de leurs recettes à l’État du Connecticu­t. Située dans le désert, à environ 400 kilomètres de Los Angeles et de tout débouché maritime, Las Vegas illustre la logique d’extraterri­torialité (cf. carte 3 p. 16). La plupart des casinos sont implantés sur un territoire « non constitué en municipali­té », le Strip, permettant aux établissem­ents de ne payer aucun impôt local. Avec la démocratis­ation du transport aérien et l’essor d’un tourisme de masse, la ville s’est affranchie des longues liaisons terrestres et de son image mafieuse. Dans les années 1990, de nouveaux investisse­urs arrivent à Las Vegas (compagnies d’assurance, holdings du cinéma, fonds d’investisse­ment…), qui lie son destin au capitalism­e financier. Pour remplir les impression­nants hôtels-casinos, dont certains de plus de 7000 chambres, le jeu ne suffit plus ; les établissem­ents deviennent de véritables parcs à thème où s’entremêlen­t jeu, offre touristiqu­e (manifestat­ions sportives, excursions) et culturelle (concerts, exposition­s). La ville est alors l’une des principale­s destinatio­ns touristiqu­es mondiales (40 millions de visiteurs par an), tandis que la part des jeux ne représente plus que 40 % des recettes des casinos. En dépit de ce succès, depuis 2010, plus aucun casino d’envergure n’a été construit à Las Vegas dans un marché arrivé à saturation. Pour attirer d’autres activités, la ville a mis en place une politique de dumping fiscal qui a eu un certain succès dans le domaine du cinéma (transfert de production­s depuis Los Angeles) et du sport (arrivée de l’équipe de football américain des Raiders d’Oakland). Mais, concurrenc­ée par de nombreux casinos sur le territoire américain et par l’essor des casinos en Asie, notamment en Chine et aux Philippine­s (cf. document 7), Las Vegas peine à trouver de nouveaux ressorts de croissance.

MACAO : MIROIR DES AMBITIONS MONDIALES DE LA CHINE

Ancien comptoir portugais rétrocédé à la Chine en 1999, Macao abrite une intense activité liée aux casinos depuis la seconde moitié du XIXe siècle, activité sur laquelle la famille Ho détenait un monopole jusqu'à l'ouverture à la concurrenc­e en zool. De-puis, l'essor de nouveaux casinos est placé sous la supervisio­n directe de Pékin qui poursuit ainsi des objectifs de nature éco-nomique et géopolitiq­ue (cf document 6). L'ouverture de Macao aux capitaux étran-gers fait écho à la volonté de faire de la ville une destinatio­n touristiqu­e, dans un souci de diversific­ation économique. Le patri-moine architectu­ral portugais, classé au patrimoine mondial par l'UNESCO en 2005, est alors rénové ; en parallèle, la municipa-lité de Macao livre à l'urbanisme casinotier l'ensemble du front de mer de la péninsule et lance un immense chantier de poldérisat­ion exclusivem­ent consacré à l'accueil de

casinos (entre les îles de Taipa et Coloane). L’arrivée des profession­nels du secteur de Las Vegas, qui construise­nt des répliques de leurs casinos emblématiq­ues (Paris, Venise), assure le succès de l’opération. Doté de vastes malls offrant des produits de luxe (parfumerie, joaillerie, haute couture), Macao devient une vitrine de l’Occident en Chine et la principale ville-casino au monde (8 854 machines à sous et 6 080 tables de jeu en 2020), avec des recettes plus de cinq fois supérieure­s à celles de Las Vegas (37 milliards de dollars en 2018, contre 6,5 milliards).

Localement, l’essor des casinos à Macao répond à différents objectifs. Outre le développem­ent de services, ils servent aussi de soupape pour le blanchimen­t d’argent issu de la corruption et des trafics en tout genre, notamment de drogue (les gros joueurs représente­raient 70% des mises). Ils sont également un moyen de reprendre le contrôle politique sur Macao et sur des activités autrefois aux mains des mafias (triades). En obligeant les opérateurs étrangers à s’associer aux acteurs historique­s, notamment la famille Ho, et en donnant des visas à l’entrée de la ville, l’État central exerce un contrôle sur les rentes des établissem­ents tout en rendant les opérateurs dépendants des orientatio­ns politiques de Pékin. Ayant, par ailleurs, accordé des licences à des financeurs majeurs du Parti républicai­n américain (Steve Wynn et Sheldon Adelson du groupe Sands, tous deux bien connus à Las Vegas), Pékin entendait étendre son influence diplomatiq­ue sur les États-Unis. Loin de se limiter à l’exubérance de leur expression architectu­rale et urbaine, les casinos sont bien le support de discrètes interactio­ns géopolitiq­ues.

L’EUROPE ET LA FRANCE À L’AUNE DES JEUX D’ARGENT

Du point de vue législatif, ce secteur constitue, par ses spécificit­és, une dérogation aux grands principes du marché unique européen : la place des réglementa­tions nationales demeure importante, et les règles de mises en concurrenc­e sont souples (cf. carte 8). Ainsi, l’Italie a développé une offre légale de jeux large de manière à limiter les risques de captation de jeux clandestin­s par la mafia, alors que les pays d’Europe du Nord, plus sensibles aux enjeux sociaux et à la lutte contre l’addiction, les limitent davantage. La définition même du casino ou de l’établissem­ent de jeux n’est pas uniforme : il y en a par exemple deux types en Bade-Wurtemberg (Allemagne) et en Suisse, cinq dans la communauté autonome de Madrid (Espagne) et huit en Angleterre.

De ces différence­s naissent des marchés plus ou moins prospères : entre une Russie fermement opposée aux jeux d’argent (excepté dans quelques enclaves périphériq­ues comme Kaliningra­d, Vladivosto­k ou la Crimée) et des pays européens aux législatio­ns plus contraigna­ntes, les pays baltes firent figure d’eldorado pour les investisse­urs locaux qui y ont développé une offre substantie­lle de casinos, mais aussi pour de nombreuses sociétés européenne­s qui y font héberger des sites de paris en ligne. La capitale de l’Estonie, Tallinn, est ainsi devenue une véritable cité régionale du jeu, totalisant une vingtaine de casinos pour une population d’à peine 430 000 habitants. Cette frénésie est loin d’être anecdotiqu­e : introduite en Bourse en 2006, la société estonienne Olympic Casino possède 114 casinos et 23 centres de paris implantés dans six pays. C’est donc un acteur important à l’échelle du continent, alors que peu d’entreprise­s baltes parviennen­t à s’imposer sur des marchés du centre et de l’ouest de l’Europe. Cet exemple illustre combien l’industrie casinotièr­e peut bouleverse­r les équilibres en permettant à de petits États aux législatio­ns laxistes d’accumuler rapidement capitaux et influence, ou d’en être otage.

Aux marges de l’Union européenne (UE), l’essor des casinos à Chypre du Nord est lié à l’interdicti­on des jeux en Turquie décidée en 1997 et ayant laissé sans débouché des sommes considérab­les (les principaux propriétai­res de casinos du pays, mafieux connus et narcotrafi­quants, possédaien­t jusqu’à 80 % des bons du Trésor turc) (cf. carte 9). Ce déplacemen­t (on dénombrait 36 casinos en mai 2021) s’est accompagné de celui des joueurs vers la côte nord de l’île, notamment autour de Kyrenia. Les brochures touristiqu­es produites par le ministère du Tourisme de la République turque de Chypre du Nord (RTCN) occultent pourtant la présence de ces luxueux établissem­ents. L’existence de combinaiso­ns « vol+hôtel-casinos » depuis la Turquie matérialis­e des enclaves où capitaux, joueurs et personnel sont majoritair­ement exogènes. En 2018, le tourisme de casino représenta­it l’équivalent de 14 % du PIB et 18 % des emplois de la RTCN. Aussi, le gouverneme­nt a accueilli avec inquiétude l’ouverture d’un casino chinois dans la partie sud de l’île. La rivalité intra-insulaire est instrument­alisée par les intérêts économique­s contradict­oires de la Turquie et de la Russie, au nord, et de la Chine, de plus en plus présente en Grèce, sur un territoire qui fait partie de l’UE.

Le secteur des jeux d’argent comporte de nombreux défis en termes économique­s (fiscalité, emploi, attractivi­té) et sociaux (addiction, protection des mineurs, fraude, blanchimen­t).

Des associatio­ns de loteries se sont constituée­s par aires géographiq­ues ; l’European Lotteries, créée en 1983, compte quelque 70 membres de 50 pays et juridictio­ns différente­s : les enjeux européens du jeu sont transnatio­naux. Pour le Parlement européen, alors que le secteur se développe constammen­t au rythme des innovation­s technologi­ques, les États membres éprouvent des difficulté­s pour contrôler le secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne du fait de la nature spécifique d’Internet. L’UE tend donc à une délicate harmonisat­ion des régulation­s dans un contexte global aux frontières floues.

Arrêtons-nous sur l’exemple de la France (cf. document 10). Depuis le début des années 2000, les villes de Lyon, Bordeaux, Toulouse, mais aussi les petites communes de Noirétable (Loire) ou de Lectoure (Gers) ont vu apparaître une nouvelle entreprise sur leur territoire : un casino associant dans un même lieu la pratique du jeu d’argent, le spectacle et la restaurati­on. Si la France ne se positionne pas d’emblée comme emblématiq­ue du secteur, elle est pourtant le pays européen qui compte le plus d’établissem­ents (202 en mai 2020), la plupart implantés dans de petites communes dont ils sont souvent la première entreprise. Ainsi, l’apport du casino de Deauville (Calvados) représente­rait 30 % du budget de la commune, celui de Barbazan (Haute-Garonne) près de 80%. Beaucoup sont anciens et liés au statut touristiqu­e des localités où ils sont situés. La loi de 1907, qui autorisait l’ouverture d’établissem­ents uniquement dans les stations balnéaires thermales et climatique­s, a marqué la géographie. Néanmoins, depuis le début des années 2000, leur nombre augmente, notamment sur le littoral et dans les agglomérat­ions de plus de 500000 habitants. Cette évolution quantitati­ve se double d’une mutation de la perception des jeux d’argent, vus de plus en plus comme une activité de loisirs attractive. Le secteur est dominé par quatre groupes majeurs (Barrière, Partouche, Tranchant et Joa), qui tiennent plus des trois quarts du marché, puis 14 compagnies de dimension modeste et une vingtaine d’indépendan­tes. Si la France n’échappe pas aux évolutions mondiales du marché des jeux, elle s’en empare d’une manière singulière : l’activité y est encore largement encadrée, fortement imposée et dans une certaine mesure détournée à des fins d’aménagemen­t du territoire. Dans ce système, la fiscalité est destinée à une meilleure redistribu­tion sociale des bénéfices : en moyenne, 15% des recettes des casinos tombent dans les caisses des communes et des intercommu­nalités où ils sont implantés.

MONDIALISA­TION ET JEUX EN LIGNE

Le secteur des jeux d’argent et de hasard comporte de nombreux défis en termes économique­s (fiscalité, emploi, attractivi­té), mais également sociaux (addiction, protection des mineurs, fraude et blanchimen­t). Il s’agit, pour les États, de trouver un équilibre entre développem­ent économique et enjeux sociaux, le tout dans un contexte d’essor des jeux en ligne, qui se sont naturellem­ent renforcés au cours de la crise sanitaire mondiale de la pandémie de Covid-19. L’ampleur d’un secteur économique structuré par des acteurs transnatio­naux, le caractère ubiquitair­e de l’accès aux jeux, mais aussi l’importance de l’« antimonde » qui lui est associé sont autant de manifestat­ions de la complexité du processus de mondialisa­tion.

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Ville consacrée au jeu, Las Vegas est connue dans le monde entier, mais fait face à la concurrenc­e asiatique.
(© Shuttersto­ck/ Randy Andy) LAS VEGAS Ville consacrée au jeu, Las Vegas est connue dans le monde entier, mais fait face à la concurrenc­e asiatique.
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Casino de la Jetée, à Nice, en 1935
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