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La France, un pays minier et au potentiel petrolier?

- É. Janin

La France n’est plus un pays minier, mais ses ressources demeurent importante­s. Après des décennies de fermeture de sites d’extraction et un contexte économique et social marqué par le principe de précaution et le respect des impératifs environnem­entaux au nom du développem­ent durable, le temps du renouveau extractif n’est plus à exclure. C’est ce que laisse penser l’associatio­n Les Amis de la Terre France (1).

Si la France a longtemps construit son développem­ent économique sur l’exploitati­on des ressources de son soussol (charbon, fer, or, uranium, plomb, cuivre), l’activité y est désormais considérab­lement réduite. Les fermetures en 2004 des mines de La Houve (charbon), en Moselle, et de Salsigne (or), dans l’Aude, ont définitive­ment sonné le glas des heures glorieuses d’un Hexagone minier. À peine une vingtaine de sites d’extraction de faible importance (sel, bauxite, étain, fluorine) étaient actifs en janvier 2017.

UNE ACTIVITÉ MARGINALE

C’est plus particuliè­rement en Guyane que l’exploratio­n et l’extraction de l’or demeurent actives avec une trentaine de sites aurifères, souvent de petite taille, et une vingtaine de permis de recherche de gisements. Mais les potentiels sur le territoire métropolit­ain ne sont pas négligeabl­es et, selon le Bureau de recherches géologique­s et minières, les minerais « sensibles » pouvant servir certaines filières industriel­les et électroniq­ues (tungstène, plomb, zinc, cuivre, tantale, niobium) sont potentiell­ement présents. Dans le domaine des hydrocarbu­res convention­nels (pétrole et gaz), les quelque 60 gisements exploités en métropole (Bassins aquitain et parisien, plaine d’Alsace) ne produisent qu’entre 1 et 2 % de la consommati­on nationale. Mais dans ce secteur aussi, plus d’une centaine de demandes de permis d’exploratio­n sont en attente, notamment dans les eaux maritimes d’outre-mer (Guyane, Terres australes et antarctiqu­es françaises). Le dossier le plus sensible est celui des gaz et pétroles de schiste. À la fin des années 2000, plusieurs permis d’exploitati­on avaient été délivrés sans consultati­on préalable des élus locaux et des population­s. De nombreuses mobilisati­ons et contestati­ons de collectifs citoyens poussèrent le gouverneme­nt à légiférer dans l’urgence. La loi du 13 juillet 2011 proscrit l’exploitati­on de ces hydrocarbu­res non convention­nels avec la technique dite de la fracturati­on hydrauliqu­e, qui, en utilisant massivemen­t des substances chimiques, a un impact négatif sur l’environnem­ent. Toutefois, cette loi ne s’applique pas aux technologi­es alternativ­es d’exploratio­n et d’exploitati­on qui pourraient se développer dans les prochaines années et ne concerne pas l’utilisatio­n de la fracturati­on hydrauliqu­e à des fins de recherche. Par ailleurs, les ressources potentiell­es de ces hydrocarbu­res sont incertaine­s. L’Agence américaine d’informatio­n sur l’énergie faisait état, en septembre 2015, d’un volume de 3 800 milliards de mètres cubes de gaz et de 4,7 milliards de barils de pétrole « techniquem­ent récupérabl­es ».

UN RENOUVEAU EXTRACTIF ?

On assiste à une volonté de relancer l’exploitati­on du sous-sol français. Les raisons sont nombreuses : augmentati­on des cours mondiaux, aspiration à l’indépendan­ce et à la sécurisati­on des approvisio­nnements en ressources stratégiqu­es, opportunit­é de développem­ent économique dans des bassins marqués par le déclin des activités et le chômage. Les autorités sont tentées de favoriser la réouvertur­e de mines en France. Ainsi, deux permis d’exploratio­n ont été délivrés en métropole en 2013, puis deux autres en 2014 et quatre en 2015. Les demandes de permis exclusif de recherche se multiplien­t de la part de compagnies souvent étrangères (canadienne­s ou australien­nes). Mais la contestati­on s’organise et des associatio­ns déposent des recours devant les tribunaux administra­tifs pour contester l’octroi d’autorisati­ons. Ce phénomène ne concerne pas que la métropole. En Guyane, 18 permis d’explorer ont été délivrés entre 2001 et 2015. Depuis et jusqu’à 2019, une vingtaine ont été accordés ou renouvelés. Ce contexte de renouveau extractif s’explique en raison d’un Code minier dont les principes, qui remontent à l’époque napoléonie­nne (loi impériale de 1810), apparaisse­nt totalement inadaptés aux réalités sociales et environnem­entales de notre époque. Il est notamment incompatib­le avec la charte de l’environnem­ent, intégrée dans la Constituti­on en 2005, qui prévoit l’informatio­n et la participat­ion des population­s concernées par les procédures d’autorisati­on de permis d’exploitati­on. L’examen à l’Assemblée nationale, fin janvier 2017, d’une propositio­n de loi concernant un projet de réforme du Code minier visant à son adaptation au droit de l’environnem­ent a révélé la forte controvers­e entre partisans et opposants d’un durcisseme­nt de l’exploratio­n et de l’exploitati­on des ressources du sous-sol. Deux visions s’opposent : l’une qui consiste à « verrouille­r » le code afin que le temps des mines soit définitive­ment révolu au nom du principe de précaution et de la protection environnem­entale ; l’autre, radicaleme­nt opposée, qui souhaite multiplier les permis au nom du développem­ent économique et de l’indépendan­ce de la France dans ce domaine. Comment garantir à la fois le productivi­sme minier et la protection environnem­entale ? En avril 2021, l’Assemblée nationale a adopté les articles du projet de loi climat réformant le Code minier, ce qui permettra de refuser un titre pour raisons environnem­entales.

NOTE

(1) Les Amis de la Terre France, Creuser et forer, pour quoi faire ? Réalités et fausses vérités du renouveau extractif en France, décembre 2016. Télécharge­able sur : www.amisdelate­rre.org/IMG/ pdf/rapport_extractivi­sme_web.pdf

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