Vu d'en haut
par Florent Boudet et Stephane Tastet
Biarritz: les mutations d'une station balneaire basque
Cette image a été prise par un satellite Pléiades le 3 mars 2013 et dont la résolution native à 0,70 mètre a été rééchantillonnée à 0,5.
Les images satellites sont devenues incontournables dans de nombreuses pratiques tant professionnelles que personnelles. Leur utilisation dans un cadre pédagogique est désormais courante. Ainsi, Carto s’est associée avec le Centre national d’études spatiales (CNES) et le ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, qui ont développé le site GéoImage (https:// geoimage.cnes.fr), pour montrer les enjeux du monde vus d’en haut.
Dans les Pyrénées-Atlantiques, la Communauté d’agglomération du Pays basque, dont fait partie Biarritz, regroupe quelque 308 300 habitants (2020), soit 45 % de la population départementale. Haut lieu du tourisme depuis le Second Empire (1852-1870), la ville s’appuie sur des activités balnéaires et rayonne sur un large bassin de vie, avec un ancrage vers l’Espagne, au sein de l’Eurocité basque.
Biarritz se situe dans le sud de la conurbation Biarritz-AngletBayonne, un espace quasi saturé. La compacité et la densité (près de 2 600 personnes au kilomètre carré) de cette ville de 25 250 habitants posent des problèmes de gestion foncière dans le cadre d’une compétition territoriale marquée dans une zone littorale fragilisée et convoitée.
GENTRIFICATION
Longtemps dynamisée par la pêche, notamment des baleines jusqu’au XVIIe siècle, Biarritz devient un espace balnéaire thérapeutique au XVIIIe. Napoléon III (1808-1873), d’abord président (1848-1852) puis empereur (18521870), en fait la résidence d’été de la famille impériale, attirant toute l’aristocratie européenne. Ce simple village de pêcheurs se transforme alors en un lieu de villégiature à la mode. De nos jours, le tourisme balnéaire demeure avec plus de 100 000 habitants en plus l’été. Il s’appuie sur des activités comme le surf, dont Biarritz est l’un des hauts lieux mondiaux. Les pratiquants sont choyés dans le cadre d’une « culture surf » qui se surimpose à une identité culturelle basque marquée. Biarritz mise sur le surf comme outil de marketing territorial en promouvant son image de berceau de la glisse en Europe. Dans une région en croissance démographique, Biarritz perd 15 % de sa population entre 2007 et 2015. Si cette tendance semble s’inverser, la flambée des prix du foncier et de l’immobilier font de la ville une cité de résidences secondaires (40 % des logements). Confrontée au vieillissement et à la gentrification, la municipalité a relancé ses programmes de logements sociaux malgré le peu de foncier disponible.
RECOMPOSITIONS SPATIALES
Autour des 34 hectares du parcours de golf créé en 1888, on repère des infrastructures hôtelières et des constructions récentes qui accentuent l’étalement urbain avec un bâti pavillonnaire dense. Sous la falaise, de profondes cavités creusées par l’érosion la fragilisent. Les propriétaires des demeures, dont certaines déjà effondrées ou qui menacent
de l’être, s’inquiètent. La falaise, l’une des rares portions de littoral à ne pas appartenir à la mairie, a été consolidée au prix de chantiers colossaux, exigeants techniquement et financièrement, et controversés. On retrouve cette contrainte sur la Grande Plage, où des bâtisses individuelles mais aussi des complexes hôteliers ont profondément transformé la côte, qu’il faut constamment protéger des vents et de la houle. La plage sableuse, soumise à une forte érosion, se prolonge par un épi rocheux artificialisé à proximité duquel se situe un petit port de pêche. Le littoral change alors de paysage et s’ouvre sur la plage du PortVieux aux bâtiments balnéaires du XIXe siècle. L’urbanisation dense s’appuie sur une concentration exceptionnelle d’hôtels, dont l’architecture moderne tranche avec celle des plus anciens et cristallise les débats sur la protection du patrimoine. La voirie court vers la Côte des Basques, autre promontoire rocheux, dont certains projets de réaménagement sont dénoncés par des associations de surfeurs qui craignent qu’ils ne dénaturent les lieux. Des travaux d’enrochement visent la protection du front de mer. La forte urbanisation et le bitumage de sols favorisent une érosion diluvienne qui se surimpose à l’érosion marine. Les glissements de terrain s’y multiplient et accentuent le recul du trait de côte, qui pourrait atteindre 30 mètres d’ici à 2050. Quand on sait que cet espace côtier n’est pas le plus vulnérable au changement climatique en Nouvelle-Aquitaine, on réalise combien il est difficile d’agir dans des zones pourtant classées « Natura 2000 » et protégées par la loi Littoral.