LE CIEL BROIE DU NOIR
Au-dessus de nous flotte une couche invisible de gaz d’échappement.
Quand, contemplant l’azur du ciel, nous y voyons un avion argenté dérouler son ruban blanc, les voyages aériens peuvent nous paraître innocents, voire esthétiques. Une vérité plus sombre est en train de se faire jour. Prendre l’avion est l’un des choix les plus lourds de conséquences qu’un individu puisse faire en termes d’émissions de carbone. Un seul billet transatlantique aller-retour représente la même charge pour l’atmosphère que deux ans de régime alimentaire à base de viande, huit ans sans recycler aucun déchet ou encore la consommation de sacs en plastique de quatre vies entières. Et il y a pire. Aux altitudes où volent la plupart des avions de ligne, ces traînées de vapeur d’eau et de gaz à effet de serre emprisonnent la chaleur, ce qui double l’effet de réchauffement des émissions de CO2 produites par les avions. Les scientifiques le savent depuis des dizaines d’années, mais les voyageurs n’ont commencé que récemment à prendre conscience de la gravité de ces effets.
En 2018, Greta Thunberg, militante écologiste suédoise, a popularisé le terme de « flygskam » (« honte de prendre l’avion ») afin de responsabiliser les usagers et les inciter à opter pour des solutions plus écologiques, comme le train ou la téléconférence. Jusqu’à présent, cela paraît fonctionner : en 2019, le nombre de passagers dans les aéroports suédois était en baisse, tandis que la fréquentation des chemins de fer du pays atteignait des sommets. Un nouveau terme est apparu : « tågskryt » (« fierté de prendre le train »).