Cool lose
Bonne nouvelle : la « romcom » (romantic comedy) américaine classique a définitivement du plomb dans la robe. Pourquoi ? Par temps de crise et de chômage des jeunes, la success story à l’eau de rose passait de plus en plus mal. C’est là que Lena Dunham entre en scène. En 2012, cette réalisatrice féministe et sarcastique, à qui l’on donne du « Woody Allen au féminin » à longueur de journaux, crée la fameuse série Girls. Un ton cru et décomplexé qui ringardise Katherine Heigl et Drew Barrymore en un coup de talon. En devenant l’une des références de sa génération, le style de Dunham met sur orbite un tas de petits films indé, urbains et calibrés pour l’élite new-yorkaise, le festival de Sundance et Paris : Frances Ha, Swim Little Fish Swim et aujourd’hui Obvious Child, de Gillian Robespierre. L’histoire d’une trentenaire (Jenny Slate, craquante) artiste dans l’âme, qui se mange galère sur galère, perd son mec, son job, mais jamais sa foi dans la débrouille. Elle est nature, rit, pleure, picole, fait pipi entre deux voitures, danse au son du djembé, lâche des blagues caca-prout, appelle une chatte, une chatte. Une « cool loseuse » qui nous ressemble. Obvious Child n’est pas seulement une comédie affûtée sur l’époque, c’est aussi une réflexion sur l’avortement, placé au coeur du scénario. Sans drame ni culpabilité, mais sans désinvolture non plus. Du jamais-vu dans une comédie américaine. Décidément, le ton change vraiment sur les écrans populaires yankees.