Miss Bovery s’ennuie
Quatre ans après la sortie du film Tamara Drewe, voici qu’un autre roman graphique de Posy Simmonds, Gemma Bovery, est adapté au grand écran. Cette fois, c’est Anne Fontaine qui se met au service de l’humour gracieux et de la mélancolie légère de Posy, dessinatrice de presse mordante et fine observatrice *. Gemma Bovery, vous l’avez deviné, c’est « un hommage au grand Gustave », comme dit Posy, un clin d’oeil à l’Emma Bovary de Flaubert. Gemma est la petite cousine de cette amoureuse ardente et désoeuvrée devenue un archétype. Le film – fidèle au roman – se déroule en Normandie. Martin (Fabrice Luchini), un intello parisien qui a fait un retour à la terre, est le boulanger du village. Grand admirateur de Flaubert, il n’ose croire à une coïncidence lorsque Gemma et Charles Bovery, un couple d’Anglais, s’installent près de chez lui. Martin observe – voire espionne – Gemma et craint de la voir suivre le destin fatal d’Emma Bovary. La réalité s’amuserait-elle à singer la fiction ? C’est la très pneumatique Gemma Arterton qui incarne Gemma. Appétissante comme les petits pains de Martin, enveloppée de robes fleuries et de bottes en caoutchouc, l’ex-James Bond girl ( vue dans Quantum of Solace) trouble l’écran par sa seule présence. Luchini, sobre et touchant, n’en fait pas trop, même si l’on sent l’immense plaisir qu’il prend à baigner dans ce contexte littéraire. Quant à l’histoire, elle est diablement romanesque et subtile. Qu’on connaisse ou pas l’Emma de Flaubert, on s’attache à ce portrait de femme, romantique et cruel. * Voir dans Causette #47 la critique de sa dernière bande dessinée : Literary Life. Scènes de la vie littéraire. Éd. Denoël Graphic.